Fessenheim, RSA-jeunes, impôt à la source... la procrastination présidentielle

Procrastination.
Procrastination. - Infadel / Fotolia
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Des mesures décidées maintenant, appliquées demain : les "cadeaux" de François Hollande à son successeur.

Imaginez qu'au restaurant vous puissiez passer commande... et laisser l'addition au suivant. C'est un peu ce qui se passe en cette fin de quinquennat. Et la note a tendance à s'allonger.

Prenez par exemple la centrale nucléaire de Fessenheim. Hier, François Hollande a promis que le décret de fermeture du site serait bien signé cette année… Mais que l’arrêt effectif de la centrale serait engagé à partir de 2018. Ce sera donc pour l'éventuel successeur de François Hollande.

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Même constat pour le RSA "nouvelle formule", qui serait étendu aux jeunes de 18 à 25 ans. Manuel Valls a indiqué qu’il y était favorable... mais que ce serait voté cet automne pour une application plus tard, c’est-à-dire pour le prochain quinquennat. Précisons que ce chantier est évalué à 3 milliards et demi d’euros par an, de la bouche même du député PS Christophe Sirugue.

Procrastination, encore, sur l’impôt à la source : une réforme dont on sait qu’elle est pourtant très compliquée, car elle impliques de nombreux réglages techniques (imposition en temps réel et non pas sur l’année précédente, taux d'imposition parfois différenciés au sein des ménages, impôt collecté par les entreprises et non plus directement par le fisc...). Bref : pour complexe qu’elle soit, cette réforme est pourtant lancée, elle aussi, en fin de quinquennat. Avec application là encore en... 2018.

Résultat : le prochain président, quel qu’il soit, se retrouvera avec ces promesses coûteuses et ces dossiers piégés. Qu'il devra mettre en œuvre, au risque de paraître poursuivre la politique de son prédécesseur ; ou qu'il devra abroger, au risque de sembler défaire tout ce qui avait été fait.

Cela dit, François Hollande n’a pas été le seul président à agir de la sorte...

C’est même une pratique malheureusement assez courante. Pas besoin de remonter très loin : en octobre 2011, juste avant la campagne présidentielle, Nicolas Sarkozy fait voter une augmentation de la TVA : + 1 point et demi.

Sauf que cette augmentation est différée. Elle était censée s’appliquer en 2012, après la présidentielle. Nicolas Sarkozy avait ainsi l’espoir que la "douloureuse" serait indolore, du moins le temps de gagner les élections.

Lui-même, à son arrivée au pouvoir, n’avait d'ailleurs pas été épargné par les boulets de ce genre - mis dans ses pattes par ses amis du gouvernement sortant. Dominique de Villepin avait "légué" toute une série de mesures très périlleuses : le droit opposable au logement, l’interdiction de fumer dans tous les lieux publics, et, déjà, le prélèvement à la source, qui a ensuite été abrogé par Nicolas Sarkozy.

Alors s’il ne nous restait pas quelques illusions sur la politique, on serait tentés de dire « c’est de bonne guerre ». Sauf que la méthode est doublement critiquable. D’abord, bien sûr, elle dupe les électeurs : ces mesures, soumises au jeu de l'alternance, ne sont pas assurées de voir le jour.

Ensuite, ce procédé ("je décide maintenant, on exécutera plus tard") est exactement à l’opposé du personnage qu’essaient de nous vendre les proches de François Hollande : celui d’un homme bien-loin-des-effets-d’annonces, qui déteste l’immédiateté, qui préfère sacrifier son image pour l’intérêt général, pour long terme, etc… En l’occurrence, c’est précisément l’inverse : des effets d’annonce qui ne coûtent pas cher, des difficultés repoussées à plus tard. Finalement, dans ce contexte, on ne sait pas s’il faut souhaiter à François Hollande d’être réélu : il risquerait de maudire son prédécesseur.