

L'Italie fut le premier pays européen touché par la pandémie, il y a près d'un an. Bruce de Galzain, correspondant permanent de France Culture à Rome, nous raconte comment le président du Conseil Giuseppe Conte a révélé sa stature face à la crise. Même s'il fait face à une contestation croissante.
- Bruce de Galzain Journaliste, correspondant de Radio France en Italie
En France, l'exécutif a fait face à de nombreuses critiques dans sa gestion de la crise sanitaire. Et à l'étranger ? Les gouvernements ont-ils été fragilisés ou confortés, soutenus ou contestés, face à cette crise inédite ? Toute la semaine, le Billet politique vous emmène en Italie, aux Etats-Unis, en Chine, en Allemagne et au Royaume-Uni. Aujourd'hui, direction Rome. L'Italie fut le premier pays européen à subir la pandémie, en février 2019.
Bruce de Galzain : A l'époque, le président du Conseil Giuseppe Conte a fait un choix inédit : celui de confiner totalement son pays ! Il a ensuite été suivi par une grande partie du monde. Cette décision - forte - révèle un homme... qui ne cessera de monter dans les sondages d'opinion, jusqu'à récemment.
Giuseppe Conte, cet avocat sans charisme, devient l'homme fort d'Italie. Il s'est hissé "au-dessus des partis", dans un rôle institutionnel qui va convaincre les Italiens. Même si ses opposants dénoncent une gestion de la crise improvisée - car Giuseppe Conté a multiplié les interventions en direct sur Facebook à des heures improbables et sans cesse repoussées... - eh bien le président du Conseil emporte une opinion publique traumatisée par la pandémie. Il gagne 25 points de popularité : les deux tiers des sondés apprécient sa gestion de la crise !
Pourtant l'Italie, Bruce, est l'un des pays où le coût économique et sanitaire de cette crise fut le plus important... Pourtant, Giuseppe Conte est parvenue à s'imposer politiquement...
En effet, mais tout seul, c'est aussi l'Europe qui sauve l'Italie ! Qui aurait imaginé que l'Europe s'entende enfin pour emprunter en commun ?
Giuseppe Conte a été habile. Avec Angela Merkel et Emmanuel Macron, ils emportent l'adhésion de leurs homologues européens. Conte va même réussir à convaincre qu'il dépensera avec sérieux les fonds du plan de relance (ce qui n'est pas encore gagné !).
Et puis il a joué la "carte européenne" contre son opposition d'extrême-droite alors que 50% des Italiens se disaient eurosceptiques à la veille de la naissance du Fonds de relance.
Le président du Conseil a aussi dû composer avec les régions (les trois-quarts sont aux mains de l'opposition). Elles sont puissantes en Italie et ont compétence sur la santé.
En pleine crise sanitaire, leur autonomie a été mise à mal. Depuis, elles cherchent à reprendre le contrôle. Et donc, elles critiquent le pouvoir central !
D'autant que la crise sanitaire dure et que la crise économique s'aggrave... alors est-ce que les oppositions réussissent à reprendre du terrain ?
A peine, en fait ! Il y a eu des élections régionales en septembre et l'extrême-droite n'a pris qu'une région à la gauche (au niveau national, la Ligue a même perdu 10 points en un an !).
Ce fut un soulagement pour la majorité en place. Un majorité fragile, cependant, avec un Parti démocrate renforcé mais un Mouvement 5 Etoiles totalement laminé... qui pour autant ne lâche pas grand-chose à son allié !
Ce sont donc des tensions politiques internes à la majorité qui pourraient faire vaciller ce gouvernement. Son chef Giuseppe Conte est de plus en plus critiqué pour avoir concentré les pouvoirs - sans passer par le parlement, pour aller vite !
Mais dans une démocratie pleinement parlementaire, cela passe mal.
Et c'est dans sa propre majorité que Conte est le plus vivement contesté. En particulier par Matteo Renzi notamment qui lui reproche sa gestion autoritaire du fonds de relance européen de plus de 200 milliards !
La crise politique couve... mais pour l'instant Giuseppe Conte semble protégé par le calendrier à venir. L'Italie sera en première ligne avec la présidence du G20 cette année. Ainsi que le sommet mondial de la santé au mois de mai et la co-présidence de la COP 26.
Et puis surtout, la mise en place du plus vaste plan de relance européen qu'ait connu l'Italie.
Giuseppe Conte devra quand même accélérer pour présenter son plan à Bruxelles... qui pourrait commencer à s'impatienter !
Bruce de Galzain est correspondant permanent à Rome pour Radio France.
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