L'amour en politique

Face aux accusations, "jee veux dire à Pénélope que je l'aime", lance François Fillon au cours d'un meeting, le 29 janvier 2017.
Face aux accusations, "jee veux dire à Pénélope que je l'aime", lance François Fillon au cours d'un meeting, le 29 janvier 2017. ©AFP - Eric Feferberg
Face aux accusations, "jee veux dire à Pénélope que je l'aime", lance François Fillon au cours d'un meeting, le 29 janvier 2017. ©AFP - Eric Feferberg
Face aux accusations, "jee veux dire à Pénélope que je l'aime", lance François Fillon au cours d'un meeting, le 29 janvier 2017. ©AFP - Eric Feferberg
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A quel point l'exposition du couple, de l'intimité est-elle devenue indispensable dans la vie politique ?

Il y a quelques jours ici même, la chercheuse Eva Illouz nous expliquait la nouvelle "incertitude amoureuse", et l'inscription du politique dans l'intime. 

L'inverse est-il exact ? A quel point l'intime, l'amour s'inscrit-il dans la politique ? Et quel meilleur jour que la Saint-Valentin pour se poser la question. 

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Il y a d'abord l'amour brandi, l'amour proclamé. Ce fut la stratégie de François Fillon, cerné par les révélations d'emplois fictifs dont aurait bénéficié son épouse, Penelope Fillon. "Je veux dire à Penelope que je l'aime" :

L'amour pour humaniser un homme et pour former un bouclier face aux mises en cause. 

Une manière subliminale, aussi, de présenter ses accusateurs comme des agresseurs qui s'en prendraient à son couple, à sa famille, à son intimité. 

Le couple comme bouclier, le couple comme épée 

Il arrive que l'amour soit utilisé comme argument de campagne. Roger Karoutchi avait indiqué qu'il était amoureux d'un homme, lors de la pré-campagne des régionales 2010. Une façon de se distinguer de sa rivale, Valérie Pécresse, dépeinte en candidate conservatrice et traditionnelle. 

La vie maritale, amoureuse, affective, semble être devenue impossible à taire. 

Est-ce une évolution à l'américaine, où les candidats montent sur scène avec leur conjoint ? 

Le couple Macron, en 2016-2017, a vait suscité la curiosité des gazettes. Marine Le Pen s'était même, elle, prise en photo en train d'embrasser son compagnon de l'époque. 

Certes, les épouses des présidents jouent un rôle public depuis longtemps. L'on pense bien sûr à l'engagement de Danièle Mitterrand. Ou à la mise en scène au coin du feu, un soir de vœux, avec Anne-Aymone Giscard d'Estaing. 

L'amour, comme le couple, sont ici présentés comme une sorte de garantie morale, de normalité. En d'autres termes, l'homme qui a le doigt sur le bouton nucléaire est aussi un mari aimant, un bon père de famille, veulent nous dire ces images. 

Mais aujourd'hui, l'existence d'une famille cachée comme celle de François Mitterrand, pourrait-elle être occultée durant des années ? Pas sûr. 

François Hollande, pris en photo à scooter, aurait sans doute une opinion. 

A moins que la revendication de la valeur famille et donc du couple, appartienne davantage à la droite qu'à la gauche ? 

Qui a feuilleté Paris Match au début des années 2000 se souvient des photos de la famille De Villiers en robe de chambre au petit déjeuner. 

Comme si un responsable politique ne devait plus ou ne pouvait plus passer sous silence sa vie privée. 

Même le réputé pudique François Bayrou a fait entrer les caméras chez lui, à l'heure du café, pour leur présenter Babeth, sa femme :

"La campagne présidentielle, ce n'est pas pareil. Elle exige que les gens sachent vaguement - au moins vaguement - qui est celle ou celui qui va vivre avec le future président s'il le choisissent. Pour eux ça fait partie de la représentation du pays". (extrait de l'émission Envoyé spécial sur France 2 en 2007). 

La même année, Nicolas Sarkozy devenu président se séparait de sa femme, Cécilia - après avoir roucoulé sous l'œil des caméras pendant la conquête du pouvoir. 

Désormais, les responsables politiques sont pris dans un engrenage très délicat. 

Ils se sentent tenus de montrer leur couple, de disserter sur leur relation amoureuse, pour inspirer confiance. Mais ce faisant, ils ouvrent aussi la porte à ce que leurs déboires intimes soient étalés sur la place publique. 

Frédéric Says

L'équipe