Le chef de l’État multiplie les annonces à l'approche des élections européennes.
Ces derniers temps, on ne l'arrête plus. Toujours plus vert. Le président multiplie les annonces écolo ; au point qu'on se demande s'il ne va pas finir par renoncer à l'avion, fabriquer sa propre lessive et équiper l'Elysée de toilettes sèches ?
En tout cas, le pli est pris. Le chef de l’État a dévoilé une nouvelle série de mesures cette semaine, après avoir reçu les spécialistes de la biodiversité. Recyclage intégral du plastique, lutte contre le gaspillage alimentaire, remise en cause de l'exploitation minière de la montagne d'Or en Guyane... Au point que plusieurs titres de presse ont décrit un « tournant vert » d'Emmanuel Macron.
Un tournant, car ce n'était pas, jusqu'à présent, le plus grand marqueur politique du macronisme, pour faire dans la litote.
Et si Emmanuel Macron a pu être qualifié un jour de « vert », c'était uniquement pour son côté inexpérimenté - candidat un peu vert pour sa première campagne face aux prétendants plus chenus.
Néanmoins, voici des propositions substantielles, et ceux qui déploraient leur absence, s'ils sont de bonne foi, ne peuvent que saluer le changement. Certes sans doute insuffisant, mais on est loin, en la matière, de certaines petites phrases présidentielles prononcées par le passé.
"Je voudrais dire un mot de toutes ces questions d'environnement... parce que là aussi, ça commence à bien faire !" (Nicolas Sarkozy en 2010)
Cela posé, pourquoi ces mesures arrivent-elles maintenant, au bout de deux ans de mandat ? Elles auraient pu être dévoilées dès le début, pour montrer la priorité de ce dossier. Ou lancées juste après la démission de Nicolas Hulot, pour prouver que le désespoir de l'ancien ministre était sans fondement.
Mais non, les voici en ce mois de mai 2019, bien tard pour changer le paradigme du quinquennat. L'explication tient en une date : 26 mai. Les élections européennes approchent et le vote écolo y est capital. Il a rassemblé 10% des voix la dernière fois, en 2014, et même 16% au scrutin de 2009 ! Bien loin du score des Verts aux présidentielles, respectivement 2,3% et 1,5% en 2012 et 2007.
Cela s'explique par deux facteurs :
d'abord, c'est une élection à un seul tour, à la proportionnelle. Il n'y a donc pas l'effet "vote utile", qui compresse les petites listes.
Et puis les européennes sont largement boudées par les électeurs. Les enquêtes sociologiques montrent que ce sont les CSP+, les + diplômés, qui votent davantage à ce scrutin... Et c'est une population qui opte tendanciellement plus pour les écologistes.
Alors à l'approche du scrutin, chaque liste tente de repeindre en vert son programme. Le problème pour Emmanuel Macron sera celui de la crédibilité.
Il lui faut convaincre qu'il n'y a pas deux discours, un pour les européennes, un pour la politique quotidienne française...
Certes, il serait caricatural d'affirmer que le chef de l’État propose pour l'Europe ce qu'il n'ose pas faire en France. Le bilan intérieur n'est pas nul : les quatre centrales à charbon vont être fermées, les nouvelles recherches et exploitations d'hydrocarbures sont interdites, le bétonnage de Notre-Dame des Landes a été abandonné. Et les pays industriels de taille comparable ne font guère mieux.
Mais une fois que l'on dit ça, les trous dans la raquette écologique d'Emmanuel Macron sont nombreux. Ne prenons qu'un exemple récent : la suppression annoncée d'un train pour transporter les fruits et légumes de Perpignan à Rungis.
A la place, 25 000 camions de plus par an sur les routes, selon les chiffres du journal Le Parisien-Aujourd'hui en France. On est loin du make our planet great again.
Alors encore un effort, monsieur le président. En matière d'environnement, le jugement du 26 mai n'est rien face à celui de l'Histoire.
Frédéric Says
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