C'est ce que dit Jean-Claude Mailly, de Force Ouvrière.
En demandant aux sept organisations syndicales et de jeunesse qui prévoient de manifester à nouveau contre la loi travail après-demain à Paris, de ne pas défiler, mais plutôt d’organiser un rassemblement statique, place de la Nation, la préfecture de police de Paris, et derrière elle le gouvernement ont montré un curieux sens de la négociation, mais c’est vrai que ça ne surprend plus tellement.
Les arguments des autorités, qui veulent “mieux encadrer, et mieux sécuriser la manifestation”, pour “faire en sorte qu’il y ait moins de dégradations”, laissent un peu pantois. D’abord parce qu’un rassemblement statique n’empêche en rien la présence de casseurs, et d’éventuelles violences. Mais surtout, est-ce qu’une seule seconde, un Préfet ou un ministre, quelque part, a imaginé que les syndicats et organisations de jeunesse, qui bataillent depuis des mois maintenant, contre vents et marées, et contre ce projet de loi, allaient se laisser embobiner, et accepter de se transformer en sorte de “veilleurs” de gauche ?
S’est-on demandé à la Préfecture de police de Paris ce qui se passerait si, par exemple, on demandait aux musiciens qui vont déferler dans les rues de toute la France aujourd’hui de sortir, mais de ne surtout pas toucher aux platines et aux claviers ?
Ils joueraient plus fort
Et c’est ce qui pourrait bien se passer jeudi, si toutefois la manifestation n’est pas annulée d’ici là. Bernard Cazeneuve, le ministre de l’intérieur, le laisse en effet entendre, et il faut croire qu’il ne lui sera plus possible de reculer, quand les syndicats lui auront à nouveau tenu tête, sous peine de passer pour un laxiste aux yeux de l’opinion, et de l’opposition de droite, qui la joue fine évidemment, en demandant l’interdiction.
Dans l’état de tension extrême qui règne actuellement en France, où tout le monde semble à cran, un recul sur la question de la manif, aurait en effet la même portée symbolique qu’un recul sur la loi elle-même.
Alors mieux aurait valu, c’est certain, pour le gouvernement, ne rien aller faire dans cette galère, et laisser cette manifestation se préparer et se faire, comme d’habitude, plutôt que de donner des occasions de crier à l’atteinte au droit fondamental de manifestation. C’était le piège tendu, de bonne guerre, par les syndicats. Et le gouvernement est tombé dedans, démontrant chaque jour un peu plus qu’il se coupe du peuple de gauche. Et que désormais il ne s’interdit plus… d’interdire.
L'équipe
- Production