

BILAN 2020 - Le parti de Marine Le Pen n'est pas parvenu à asseoir une influence locale lors des élections municipales de 2020.
- Sylvain Crépon Maître de conférences en science politique à l'université de Tours, rattaché au Laboratoire d'étude et de recherche sur l'action publique (LERAP)
Quel bilan pour les principales formations politiques, à l'issue de cette année 2020 ? Ce matin avec nous, Sylvain Crépon, maître de conférences en sciences politiques à l'Université de Tours, spécialiste du rassemblement national.
Frédéric Says : Le RN fut finaliste de l'élection présidentielle 2017, mais on a le sentiment que ce mouvement n'est pas parvenu à s'implanter à l'occasion des élections municipales ?
Sylvain Crépon : Vous avez raison, il n'y a absolument pas profité des municipales. Et là, le Rassemblement National se trouve face à un de ces grands problèmes : c'est-à-dire son déficit d'implantation locale. On avait cru, il y a six ans, lors des municipales précédentes, qu'il allait réussir à tisser un réseau d'élus locaux. Et il se retrouve face à un problème structurel qui est son incapacité finalement à essaimer des militants et des réseaux qui sont en mesure de ravir de nouvelles municipalités.
A ce niveau là, on se rend compte que la ville de Perpignan est un petit peu l'arbre qui cache la forêt.
Perpignan, une ville conquise par Louis Aliot avec le soutien du Rassemblement National. Malgré tout, Sylvain Crépon, est ce que Marine Le Pen bénéficie de "l'air du temps" autour des lois sécuritaires ou anti-islamisme, qui sont des thèmes qu'elle met en avant depuis longtemps ?
Effectivement, ce sont les thématiques de prédilection du rassemblement national. Ce qu'on peut noter, c'est que le Rassemblement national et Marine Le Pen ne sont pas très présents dans ce débat. On a l'impression qu'ils sont un peu atones. Mais ce que disent tous les responsables du Rassemblement national, c'est que finalement, ils n'ont même plus besoin de faire campagne sur cette thématique puisque les autres candidats, et notamment les autres forces politiques, à commencer par la République en marche et le Rassemblement national, mais même certaines forces à gauche font campagne à leur place.
Et là, ils se retrouvent un peu dans la stratégie de François Duprat des années 1970 qui, à l'époque, était le numéro deux du Front national et qui avait défini comme stratégie d'obliger les partis de la droite de gouvernement à se positionner sur les idées du Front national. Et ensuite, selon l'adage, l'électeur préférera toujours l'original à la copie. On a l'impression que c'est un peu ce qui est en train de se passer.
Projetons-nous sur 2021, c'est bien sûr l'année des régionales. Diriez-vous que le Rassemblement national est bien parti pour ce scrutin ? Et puis, il y a en ligne de mire, bien sûr, l'élection présidentielle de 2022, pour laquelle on sent des divisions à l'intérieur du RN...
Alors, il y a des divisions au sein de ce mouvement. Mais il y en a dans tous les partis politiques. Le problème au sein du Rassemblement national est là : on voit quand même que c'est une spécificité qui le concerne. Toute division y est insupportable, toute division est insupportable à la tête, à la direction du parti politique.
Par conséquent, dès qu'il y a des voix discordantes qui apparaissent, on les marginalise. Voire on leur demande de prendre la porte.
Finalement, le Rassemblement national n'a toujours pas fait totalement sa mue démocratique puisqu'il a encore énormément de mal à démocratiser ses structures internes. Et donc, c'est quelque chose qui pose problème dans la perspective des élections régionales, mais également des autres élections - hormis l'esprit de l'élection présidentielle qui est celle à laquelle va candidater Marine Le Pen.
Il faut être en mesure de constituer des équipes, d'investir des militants, des gens qui soient compétents. Et là encore, on voit que le RN se trouve face à un déficit structurel. Il est en manque de cadres. Il est en manque de militants. Il est en manque de financement. Il est surendetté. Il est menacé de faillite. Et donc, il aborde les élections dans une position un peu délicate sur le plan structurel. Même si, idéologiquement, on a le sentiment que bien l'air du temps le porte sur le devant de la scène.
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