

Emmanuel Macron dévoilera à la mi-juillet ses nouvelles orientations politiques, les « décisions de rupture » promises lors de la crise sanitaire. Mais les cartes ne sont pas nombreuses dans la main du chef de l'Etat.
Quel changement de cap politique ? Emmanuel Macron avait promis des "décisions de rupture" pour "l'après".
D'après l’Élysée, il doit dévoiler les nouvelles orientations retenues au cours de la première quinzaine de juillet.
Le chef de l’État va se heurter à deux difficultés : l'une de fond, l'autre de méthode.
Le fond
Emmanuel Macron va tenter d'évoluer sans paraître se renier. Pas simple, pour le candidat de "l'ouverture" lors de la dernière présidentielle. Élu presque à contre-cycle, au moment où les nations se referment, les échanges se tarissent, les flux se réduisent.
Le souverainisme écologique qui affleure déjà dans les discours de l'exécutif n'a pas grand-chose à voir avec le programme de 2017.
A l'époque, le candidat Macron vantait "l'esprit de conquête", l'attractivité française dans un monde ouvert.
C'est donc presque un deuxième quinquennat qui doit commencer, à contre-courant de la libération des forces économiques et du retrait de l’État.
François Mitterrand avait opéré en 1983 le tournant de la rigueur ; Emmanuel Macron doit lui conduire le tournant de la vigueur.
La vigueur retrouvée d'un pouvoir politique qui ne répugne pas à intervenir dans le champ économique. Pas seulement comme régulateur mais comme acteur.
La méthode
Comment symboliser ce changement de cap, ces décisions de rupture ?
La constitution offre un certain nombre d'options à Emmanuel Macron.
Pourquoi pas un référendum, d'autant que la convention citoyenne sur le climat doit rendre ses conclusions d'ici au mois de juillet.
Mais on le sait, l'arme du référendum est toujours difficile à manier.
Une dissolution de l'Assemblée nationale. Ce serait une autre manière de rendre la parole au peuple.
Dans les faits, ce serait préparer une cohabitation, ou au moins une coalition, bref : perdre les manettes. Pas certain que ce soit la fin de quinquennat rêvée d'un président.
Et puis il reste le remaniement. A nouvelles idées, nouveaux visages, pourrait-on dire ?
Dans leur jeu de cartes, c'est le joker le plus utilisé par les chefs de l’État pour se relancer. On ne compte plus le nombre de « gouvernements resserrés », de « gouvernements de combat », qui ont été mis en place.
Simplement, en l'occurrence, c'est une solution peu aisée.
D'une part, parce que le Premier ministre actuel est relativement populaire. Il avoisine les 50% de bonnes opinions, ce qui en ces temps de défiance est un score honorable quand on est aux affaires.
Un sondage paru hier dans le Point indiquait d'ailleurs que 62% des personnes interrogées souhaiteraient un remaniement... en gardant l'actuel chef de gouvernement !
Dans ce cas, pour tout de même suggérer une transformation, il faudrait changer les piliers de l'équipe. Mais là aussi, au-delà de la communication, la manœuvre est risquée.
Le contexte extrêmement tendu d'une crise sanitaire, économique et sociale, inédite, tolère très peu de période de rodage.
Qui peut imaginer la nomination d'un nouveau ministre de la Santé ? Cela revient à changer de général au milieu de la bataille, une nouvelle fois.
Et le raisonnement n'est pas très différent pour Bercy.
Le chômage partiel, les aides sectorielles, les déficits publics, la refonte du budget de l’État et de la sécurité sociale sont des dossiers si techniques, qu'il n'y aurait pas d'intérêt à modifier les titulaires.
Voilà pourquoi, à ce jour, les contraintes politiques existantes jouent contre un grand "big bang gouvernemental".
Peut-être Emmanuel Macron trouvera-t-il la clé pour s'en abstraire.
Mais jusqu'ici, tout le pousse, pour paraphraser Valéry Giscard d'Estaing, à un certain « changement dans la continuité ».
Frédéric Says
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