La droite s'est inquiétée, ces derniers jours, d'un possible nouveau report des élections régionales 2021. Elle a fait de ce scrutin son processus de désignation d'un candidat à l'élection présidentielle.
Un psychodrame politique s’est déroulé ces derniers jours autour de la question d’un éventuel nouveau report des élections départementales et régionales prévues au mois de juin 2021.
Car le gouvernement, après avoir sollicité, la semaine dernière, l’avis des principaux responsables politiques du pays, avait chargé les préfets de départements de demander leur avis aux 35 000 maires que compte le territoire national : "Considérez-vous, oui ou non, qu’il est possible d’organiser dans vos communes les scrutins départementaux et régionaux les 13 et 20 juin prochains ?" Les maires avaient jusqu’à hier midi pour rendre leurs copies.
De nombreux responsables politiques nationaux ont alors enfourché le train médiatique pour crier à la manipulation. Comme les partis et les associations d’élus avaient plaidé en faveur du maintien, le pouvoir exécutif sollicitait, disait-on, d’autres avis pour avoir une autre réponse. Il craignait une défaite électorale et cherchait un prétexte, une bonne raison, pour les repousser, si possible au-delà de l’élection présidentielle.
La crainte était si forte que le président du Sénat, Gérard Larcher, avait sorti l’artillerie lourde, dimanche soir, et avait brandi cette menace en direction d’Emmanuel Macron et du gouvernement :
On ne confine pas la démocratie. L'article 3 de la Constitution prévoit le droit de vote. Alors je le dis, ce soir, si le gouvernement venait à demander au parlement le report de ces élections, alors sur le nouveau texte, je saisirai le Conseil constitutionnel.
Finalement, hier soir, le soufflé est retombé brutalement suite à la publication d’un communiqué du ministère de l’intérieur. Les maires avaient rendu leur verdict : à 56%, ils étaient favorables au maintien des scrutins départementaux et régionaux.
Cet emballement autour des élections régionales interroge
Il a de quoi interroger, effectivement (d’ailleurs, vous remarquerez qu’on parle essentiellement des régionales et pas des départementales dont l’organisation est pourtant prévue simultanément).
On en trouve l’explication dans le fait que les régionales sont plus que de simples élections. Ce scrutin va en effet servir de processus de sélection du candidat de la droite républicaine à l’élection présidentielle. Autrement dit, elles vont remplacer la primaire que Les Républicains avaient organisée en 2016 et qui avait vu François Fillon coiffer sur le fil Nicolas Sarkozy puis Alain Juppé.
Cette fois, il n’est manifestement pas question de primaire. Ca devrait se jouer entre Valérie Pécresse, Xavier Bertrand et dans une moindre mesure Laurent Wauquiez. Tous trois espèrent puiser dans leur réélection l’onction populaire susceptible de légitimer leur candidature à la présidentielle.
Une réélection confortable à la tête d’une région qui compte plusieurs millions d’électeurs a en effet de quoi leur fournir une quantité de carburant politique susceptible de les emmener plus loin. S'ils ne sont pas réélus, évidemment, c’est la panne sèche, raison pour laquelle Valérie Pécresse a concédé hier que si elle était battue, c’en serait fini de sa carrière politique. Xavier Bertrand avait expliqué la même chose dix jours auparavant.
C’est donc en partie la crainte de voir disparaitre ce processus de désignation qui a provoqué les réactions courroucées de bon nombre de responsables politiques, à droite et au centre, ces derniers jours.
La droite s’est aperçu qu’elle n'a pas de processus de rechange pour désigner son candidat à la présidentielle
Depuis quatre ans et l’élection d’Emmanuel Macron, la droite et les oppositions en général sont en difficulté. La crise sanitaire n’a rien arrangé. Elle a installé depuis un an une atonie politique qui fait qu’il est encore plus difficile d’exister et de faire valoir un projet alternatif. Les partis sont discrédités et ne sont plus en mesure de se lancer dans l’organisation de primaires.
Il n’y a guère que les écologistes qui en prévoit une. Ils en ont officialisé le principe hier, c’est prévu pour fin septembre. Mais jusqu’ici, ils ne sont suivis par pratiquement personne à gauche. Et même en interne, leur volonté de s’autonomiser est contestée.
Il ne reste donc comme processus de présélection des candidats que les régionales et les enquêtes d’opinion. Parce que c’est à ça que servent essentiellement ce qu’on appelle plus communément les "sondages". Bien souvent, on a tort d’y voir un outil prédictif de ce qui pourrait se passer, comme ce fût le cas avec celui publié il y a deux jours par le Journal du Dimanche.
A un an d’une présidentielle, ce type de sondage ne prend pas en compte les dizaines de millions de personnes qui se politisent au tout dernier moment, quelques mois voire quelques semaines avant le scrutin. Il ne dessine donc qu’à gros traits l’état du paysage politique. C’est une esquisse, en quelque sorte, qui ne permet pas vraiment de distinguer quelle sera la couleur dominante, le bleu, le rose, le vert, le noir.
En revanche, c’est un puissant outil de présélection des candidats. Il permet de voir qui est susceptible de fédérer et qui l’est moins. Et au vu de ce sondage, certains ont franchement de quoi s’inquiéter, d’autres peuvent y trouver des raisons d’espérer.
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