Les écologistes ont été la cible de nombreuses critiques ces derniers jours. Ils avaient lancé une campagne pour inciter les jeunes à vérifier leur inscription sur les listes électorales en vue des élections régionales. Mais cette campagne stigmatisait également les chasseurs et les boomers.
Les écologistes ont encore une fois beaucoup fait parler d’eux, ces derniers jours, sur les réseaux sociaux que sont Facebook et twitter.
Vendredi dernier, ils ont mis en ligne une série de visuels pour inciter les jeunes à vérifier qu’ils sont bien inscrits sur les listes électorales en vue des élections régionales de juin prochain. Sur une de ces affiches virtuelles, on pouvait voir des chasseurs avec leurs bottes et leurs fusils et il était inscrit : "Les chasseurs, eux, ont prévu d’aller voter".
Sur une autre de ces affiches, ce sont des personnes âgées, tout sourire, qui étaient représentées et il était écrit : "Les boomers, eux, ont prévu d’aller voter". Il y en avait une aussi pour "les fachos", une avec Alain Finkielkraut, une avec Eric Zemmour, une autre avec Gérald Darmanin. Et le tout avait été relayé par le secrétaire national d’Europe Ecologie Les Verts, Julien Bayou, candidat aux élections régionales en Ile-de-France.
"Pour défendre leurs intérêts, les chasseurs, les boomers et tous les autres iront voter en juin prochain, écrivait-il. Et pour défendre le climat, est-ce que vous, vous pourrez voter ?". S’en suivait une invitation à vérifier son inscription sur les listes avant le 14 mai.
Ces visuels sont restés en ligne peu de temps, vendredi, mais ils ont suscité de très nombreuses et très vives critiques qui ont duré tout le week-end et qui continuaient encore hier. Julien Bayou s’en est expliqué hier soir sur France Info et il a reconnu une erreur :
Je n'ai pas validé ce visuel. Je l'ai fait retiré immédiatement. Il est resté en ligne moins d'une heure, certainement. Et depuis, la polémique s'alimente sur des captures d'écran de ce tweet. C'est une erreur, (c'est) maladroit. Mais moi, je voulais surtout m'adresser aux personnes qui ont pu être blessées, heurtées. Et donc, ce visuel, je l'ai retiré.
Julien Bayou n’aurait donc pas validé cette campagne. Et il s’est excusé auprès de ceux qu’il a pu blesser, les boomers en particulier.
S'agit-il vraiment d'une erreur et d'une maladresse ?
Ce n’est pas certain. Car à bien y regarder, qui cette campagne de visuels stigmatise-t-elle ? Et à qui s’adresse-t-elle ?
Elle stigmatise ceux qu’on appelle les boomers, c’est-à-dire les personnes nées avant 1965, qui ont connu la période des trente glorieuses et sont donc considérées là comme étant en partie responsables du dérèglement climatique.
Elle stigmatise également les chasseurs, éternels ennemis des écologistes, accusés de faire de la nature un terrain de jeu et en l’occurrence un terrain de chasse. Les gens de droite et d’extrême droite sont également visés, les "fachos", Eric Zemmour, Alain Finkielkraut, Gérald Darmanin.
Et on voit donc, en creux, à qui s’adressent les écologistes avec cette campagne. A des électeurs plutôt jeunes, qui ne résident pas à la campagne mais dans les villes, d’une sensibilité politique plutôt ancrée à gauche, qui sont amis des animaux et fortement concernés par la problématique environnementale. Autrement dit, ils s’adressent à ceux qu'on qualifie parfois de "bobos", bourgeois-bohème des centre-ville, qui ont voté pour eux aux dernières élections municipales.
On a donc là une campagne de visuels qui cible une clientèle électorale et qui répond à une règle en politique qui veut qu’au premier tour, on rassemble d’abord et avant tout son propre camp.
Cette campagne était aussi volontairement provocatrice
C’est une autre veille technique politique utilisée en leur temps par Nicolas Sarkozy, Jean-François Copé ou encore Jacques Chirac et beaucoup d'autres. et qui se déroule comme suit :
Vous énoncez ou publiez une énormité, on parle de vous. Ensuite vous démentez ou bien vous reconnaissez une erreur, on parle encore de vous. Bref, vous occupez l’espace médiatique et vous gagnez en visibilité et en notoriété. Or, il faut bien voir que le plus grand handicap de Julien Bayou, à l’approche des régionales au mois de juin, c’est son déficit de notoriété.
Vous ajoutez à cela qu’il est actuellement très difficile, avec la Covid, de faire campagne autrement que sur les réseaux sociaux et vous avez tous les ingrédients de la cuisine médiatique que nous ont servi les écologistes ces jours derniers.
Mais cette séquence, si elle peut éventuellement être utile pour les régionales, pourrait bien être préjudiciable en vue de l’élection présidentielle et même de façon plus durable encore. Car elle dévoile une écologie politique peu engageante, dogmatique, sectaire, communautariste, punitive.
Ce qui est dit là, c’est : "les vieux, on n’en veut pas. Les chasseurs, on n’en veut pas. La droite, on n’en veut pas. Pas plus que les sapins de noël, le Tour de France ou les avions dans le ciel."
C’est comme si Julien Bayou et les écologistes nous avait dit, encore une fois, ces derniers jours qu’ils veulent uniquement d’un monde idéal où il n’y aurait que des gens comme eux et personne d'autre. Un monde un peu inquiétant et pas vraiment désirable.
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