Quelle police voulons-nous ?

A Aulnay-sous-Bois, sur le chemin d'une manifestation contre les violences policières le lundi 6 février 2017
A Aulnay-sous-Bois, sur le chemin d'une manifestation contre les violences policières le lundi 6 février 2017 ©Maxppp - PHOTOPQR/LE PARISIEN - Philippe Lavieille
A Aulnay-sous-Bois, sur le chemin d'une manifestation contre les violences policières le lundi 6 février 2017 ©Maxppp - PHOTOPQR/LE PARISIEN - Philippe Lavieille
A Aulnay-sous-Bois, sur le chemin d'une manifestation contre les violences policières le lundi 6 février 2017 ©Maxppp - PHOTOPQR/LE PARISIEN - Philippe Lavieille
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L'affaire Théo, nouvelle affaire de violences policières, va peut-être faire émerger dans la campagne électorale le thème de la relation entre la police et les citoyens. A moins que ce ne soit la seule question de la sécurité publique qui l'emporte. La gauche est attendue au tournant.

Nicolas Sarkozy fait son retour. L'ex-Président de la République est revenu hier dans l'actualité non plus à la rubrique politique mais dans les pages Justice. Une chance doivent se dire certains électeurs de la droite et du centre que nous ne l'ayons pas choisi à la primaire pour nous représenter. Par les temps qui courent, c'est toujours mieux que François Fillon. Quand les choses vont mal, on se console comme on peut. Sale temps pour la droite. Après Jacques Chirac, Nicolas Sarkozy devrait donc être le second ancien chef d'Etat de la Vème République à comparaître devant un tribunal.

Un signe tout à la fois de bonne et de mauvaise santé démocratique. Mauvaise santé parce qu'on attend de la personne qui occupe la fonction suprême qu'elle soit irréprochable. On en débat beaucoup en ce moment. Mais d'un autre côté, on se réjouira du bon fonctionnement de l'Etat de droit. Cet ancien ministre de l'intérieur aurait salué le bon fonctionnement de la chaîne pénale. Lui qui faisait de l'investigation, l'interpellation et la lutte contre la délinquance, les 3 piliers de la police. Comme ce jour de février 2003, et cette phrase devenue célèbre :

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"Organiser un match de rugby n'est pas la mission première de la police. Vous n'êtes pas des travailleurs sociaux, la police n'est pas là pour organiser des tournois sportifs" - Nicolas Sarkozy à Toulouse le 3 février 2003

Le stakhanoviste des interpellations, l'obnubilé de la politique du chiffre avait tancé les policiers. Nicolas Sarkozy avait même viré quelques jours plus tard le directeur départemental de la sécurité publique, Jean-Pierre Havrin, celui qui avait inspiré au gouvernement Jospin quelques années plus tôt, celle qu'on surnomme la "pol prox", la police de proximité. A chaque élection présidentielle, elle est depuis régulièrement regrettée et invoquée comme une solution. Emmanuel Macron dimanche dernier a formulé cette proposition.

Emmanuel Macron à Lyon le 4 février 2017

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Le pas de deux toujours étonnant du candidat d'En Marche ! Mais revenons en arrière. Nous sommes à peu près à la même époque, un peu plus tard, fin février 2007 quand le sujet émerge dans les débats de la Présidentielle. Même Nicolas Sarkozy fait un semblant de marche arrière. Ségolène Royal écrit dans son pacte présidentiel son souhait "d'une police au plus près des habitants, respectée par les habitants et réciproquement." Le troisième homme, François Bayrou, joue sur les mots et trouve une formule de synthèse entre ses deux concurrents. Il parle d'une "police fidélisée".

François Bayrou en 2007

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Cinq ans plus tard en 2012. Les policiers sortent rincés du quinquennat Sarkozy. 12 000 postes supprimés. Ils manifestent en avril et mai en pleine campagne électorale. François Hollande promet bien quelques recrutements. Il promet aussi au citoyen l'instauration du récépissé de contrôle d'identité. La preuve du contrôle. Pour éviter ce que beaucoup de jeunes des quartiers populaires considèrent à force comme une forme de harcèlement. Promesse non tenue. Seul changement depuis deux ans, l'obligation pour le fonctionnaire de police de porter bien en évidence son numéro de matricule. Une occasion manquée sans doute pour la gauche.

Et la question est de nouveau en train d'émerger dans cette campagne. Il y a bien eu l'affaire Adama Traoré dans le Val d'Oise l'été dernier. Et depuis jeudi, il y a maintenant l'affaire Théo à Aulnay sous Bois. Et cette remarque de la sénatrice écolo Esther Benbassa.

Esther Benbassa le 6 février 2017

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Une remarque qu'elle formule avant-hier aux côtés du candidat Benoît Hamon, de nouveau comme le candidat précédent des socialistes pour l'instauration de ce récépissé de contrôle. Il y a en France trois fois plus de possibilités d'être contrôlé si vous n'êtes pas blanc. Trois fois plus de possibilités aussi si vous n'êtes pas blanc que le contrôle se passe mal. Des chiffres avancés par le directeur de recherches au CNRS, Sébastien Roché, hier soir sur notre antenne et qui placent la France dans le tiers inférieur du classement entre la Grèce et la Bulgarie.

François Hollande au chevet de Théo à Aulnay-sous-Bois le 7 février 2017
François Hollande au chevet de Théo à Aulnay-sous-Bois le 7 février 2017
© Maxppp - PHOTOPQR/LE PARISIEN/Arnaud Journois

Dans cette affaire Théo, déjà une image inédite, celle d'un Président de la République se déplaçant au chevet du jeune homme hier après-midi. Une autre gestion politique d'une énième affaire de violence policière faisant réagir hier soir dans sa dernière vidéo mise en ligne sur Youtube, le candidat de la France insoumise, Jean-Luc Mélenchon.

Jean-Luc Mélenchon sur Youtube le 7 février 2017

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L'idéologie. Mélenchon met là les pieds dans le plat et se place là à l'extrême opposé de Marine Le Pen qui a apporté hier soir son soutien entier aux policiers. L'une des questions de cette présidentielle est donc peut-être en train d'émerger : quelle police voulons-nous ? La question que les habitants des quartiers populaires seront eux en droit de poser. Faut-il encore croire aux promesses ?

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