Retraites : que peut faire le gouvernement ?

Devant les députés, le Premier ministre a reconnu qu'il n'y avait pas d'"annonces magiques" pour calmer les craintes quant à la réforme des retraites.
Devant les députés, le Premier ministre a reconnu qu'il n'y avait pas d'"annonces magiques" pour calmer les craintes quant à la réforme des retraites. ©AFP - Dominique Faget
Devant les députés, le Premier ministre a reconnu qu'il n'y avait pas d'"annonces magiques" pour calmer les craintes quant à la réforme des retraites. ©AFP - Dominique Faget
Devant les députés, le Premier ministre a reconnu qu'il n'y avait pas d'"annonces magiques" pour calmer les craintes quant à la réforme des retraites. ©AFP - Dominique Faget
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Édouard Philippe dévoilera à la mi-journée ses arbitrages, au lendemain d'une nouvelle journée de manifestation.

Qu'est-ce qui pourrait sauver la réforme des retraites ?  

C'est désormais dans ces termes que la question se pose pour le gouvernement, tant la situation semble inextricable, à quelques heures des ces annonces d'Edouard Philippe.  

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Inextricable ? Non pas à cause du nombre de manifestants (autour du demi-million hier) : ce n'est pas négligeable, mais c'est loin des cortèges historiques.  

Inextricable, car de nouvelles professions entrent dans la danse : les policiers, par la voix de leurs syndicats, annoncent se mettre en mouvement pour leur retraite.  

Les enseignants restent sceptiques malgré les assurances de Jean-Michel Blanquer.  

Les agents des transports publics demeurent fortement mobilisés.  

Et pour couronner le tout, une nouvelle journée de manifestation nationale est annoncée dans six jours, mardi prochain.  

Du côté de l'Exécutif, la stratégie est la suivante :  

Emmanuel Macron reste en retrait, lui qui fut en première ligne face aux gilets jaunes.  

Il laisse Edouard Philippe dévoiler le cadre général de la réforme ; il pousse les ministres à rassurer le public, chacun dans leur champ d'action. Ainsi, par exemple, Marlène Schiappa a-t-elle posté cette vidéo hier :

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Evidemment, tous ces messages ne visent évidemment pas à convaincre les opposants à la réforme : c'est peine perdue. Ils tentent plutôt de persuader les Français encore hésitants. Cette fraction de l'opinion publique qui ne sait pas trop quoi penser d'une réforme présentée ici comme progressiste, là comme régressive - et dont personne n'a jusqu'ici pu lire ne serait-ce que la première ligne. Les seules hypothèses de débat datent du rapport Delevoye, remis à l'été dernier.  

Dans ce flou, l'opposition et les syndicats se sont engouffrés. Les uns pour publier des simulateurs de retraite aux prévisions alarmistes ; les autres pour exhumer la loi PACTE, une loi votée il y a 6 mois, qui favorise les complémentaires retraites. 

Il n'en faut pas plus pour soupçonner le gouvernement de préparer le terrain pour un système de capitalisation, au lieu du système actuel de répartition.  

Argument repris à gauche, bien sûr, mais aussi à droite : "Vous offrez trois milliards d'euros aux fonds de pension", a tonné Olivier Marleix, député Les Républicains, hier à l'assemblée.

Quelles options ? 

Face à ce mur de défiance, Edouard Philippe l'a reconnu, devant ses troupes : il n'y a pas de discours "magique" pour faire stopper les manifestations.  

Certes, il peut choisir d'assouplir, d'étirer les périodes de transition, mais pas trop.  

Si la retraite nouvelle formule concerne seulement les plus jeunes, ce serait vécu comme une provocation par les syndicats étudiants.  

Par ailleurs, si le nouveau système est plus juste, comme le prétend le gouvernement, pourquoi priver plusieurs générations de cette justice ?  

L'exécutif peut aussi annoncer des exceptions pour certaines catégories ; il a déjà promis de conserver les spécificités du régime des policiers et des militaires... Mais il ne peut pas étendre beaucoup ces exceptions, sauf à tuer dans l’œuf l'idée de régime universel.  

Tout juste peut-il éviter de s'aliéner la CFDT, le seul syndicat majeur favorable au système par points. La CFDT se dit très vigilante à ce que cette réforme ne comporte pas de durcissement sur la durée de cotisation ou le report de l'âge légal.  

Bref, le gouvernement semble assiégé de toute part, sans guère d'issues mis à part la reddition.  

Alors pourquoi cette réforme créé-t-elle une telle crispation ?  

Il y a bien sûr de la colère sociale amoncelée depuis des années.  

Mais au-delà, si l'on prend du recul...  peut-être que dans nos sociétés laïques et séculaires, la retraite a pris la place qu'occupe le paradis dans la religion.  

C'est cet instant de repos, de bonheur fondé sur le mérite accumulé au cours d'une vie.

Et on ne touche pas, on ne réforme pas le paradis.  

Frédéric Says

L'équipe