Au cours du XIXe siècle, l'industrialisation démocratise la consommation d’un plus grand nombre d’alcool et en grande quantité. Des voix s'élèvent et l'accusent de tous les maux. Dans la sphère publique comme dans la sphère privée, ces militants de la tempérance obtiennent de durables victoires.
- Didier Nourrisson Historien de la santé.
- Victoria Afanasyeva Historienne, ingénieure d’études en appui à la recherche au sein de l’équipe ISOR (Images, Sociétés, Représentations) du Centre d’Histoire du XIXe siècle de l’Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne
L’histoire de la lutte antialcoolique ; l’écolier, assis au fond de la classe, n’y pense pas trop. Il jette un œil au tableau, puis par la fenêtre. Son regard se pose ensuite une affiche, un de ces superbes tableaux muraux. Il y apprend qu’il existe des boissons naturelles qui sont "bonnes" - le vin, le cidre, le poiré, la bière -, et de "mauvais" alcools industriels, à base de betterave, de pomme de terre, de grain. Il voit les organes sains de celui qui ne boit pas et les organes abimés de l’ivrogne. L’écolier lit le titre de l’affiche : "l’alcool, voilà l’ennemi". Le voici prévenu. Xavier Mauduit
La peur de l’alcoolisme hante le XIXe siècle. La crainte de “l’ivresse du peuple” atteint son apogée en 1871, lorsque l’alcoolisme populaire est déclaré coupable de la défaite face à la Prusse et de la “bacchanale” de la Commune. La consommation excessive d’alcool mène le buveur à outrepasser les bonnes mœurs, à provoquer des émeutes, bref, à être un révolutionnaire en puissance. La dénonciation de l’alcoolisme est d’abord morale : le comportement du buveur met en danger sa famille, mais aussi le corps social.
La consommation d’alcool change d’envergure dans la France du XIXe siècle : les progrès de la révolution industrielle et des transports accélèrent la production et la diffusion des boissons alcoolisées. Les débits de boissons se multiplient, un pour cent habitants dans la France de 1850. Les cafés deviennent les lieux essentiels de la vie sociale, avec des personnages gouailleurs : honorable patron ou l’aguicheuse serveuse s’imposent dans l’imaginaire collectif. Du verre pris à la sortie de l’usine à l’avènement du “repas à la française” arrosé de bout en bout, ce sont de nouveaux usages de l’alcool qui s’imposent dans la France du XIXe siècle.
L’hygiénisme réunit l’inquiétude morale aux considérations médicales. Les tentatives d’encadrement des débits de boissons se multiplient et le militantisme anti-alcoolique compte de plus en plus d’adeptes. Comment les pouvoirs publics ont-ils fait face à ces mutations dans les modes de consommation alcoolique au XIXe siècle ? De quelle manière le militantisme anti alcoolique s’est il structuré ? Au-delà du rôle stéréotypé de “gardiennes du foyer”, quel rôle les femmes ont-elles occupé dans ce mouvement ?
Avec Didier Nourrisson, professeur d'histoire contemporaine à l’Université Claude-Bernard-Lyon-I. Spécialiste de l’histoire des addictions et de celle des pratiques et des comportements de santé, il est l'auteur de plusieurs ouvrages parmi lesquels, avec Thierry Lefebvre et Myriam Tsikounas, Publicité et psychotropes. 130 ans de publicité sur les alcools, les tabacs et les médicaments (Nouveau Monde Éditions, 2010), Cigarette : histoire d’une allumeuse (Payot, 2010), Crus et cuites. Histoire du buveur (Perrin, 2013), Au péché mignon. Histoire des femmes qui consomment jusqu’à l’excès (Payot, 2013) ou encore Une histoire du vin (Perrin, 2017).
Et Victoria Afanasyeva, historienne, ingénieure d’études en appui à la recherche au sein de l’équipe ISOR (Images, Sociétés, Représentations) du Centre d’Histoire du XIXe siècle de l’Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne. Elle est autrice d'une thèse dirigée par Myriam Tsikounas et soutenue en 2020, Cherchez la femme : histoire du mouvement antialcoolique en France (1835-2013), à l'Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne. Elle est fondatrice du blog Histoire (s) du mouvement antialcoolique en France et autrice de « Cafés sans alcool à Paris : œuvre de tempérance par et pour des étrangers à la fin du XIXe siècle », Bulletin de l'Institut Pierre Renouvin, vol. 50, no. 2, 2019, pp. 17-31 et de “Pratiques de mobilisation des femmes pour la cause antialcoolique en France : militantes, enseignantes, femmes de plume (1873-1903)”, Genre & Histoire, 19 | 2017.
Sons diffusés :
- Extrait du film Un singe en hiver (1962) réalisé par Henri Verneuil.
- Extrait du film L'Assommoir (1956) réalisé par René Clément d'après le roman éponyme d'Émile Zola.
- Lecture par Marion Malenfant du décret présidentiel du 29 décembre 1851 sur les débits de boisson.
- Musique Marias Callas, Alfredo Kraus - La Traviatta, Acte I, Libiamo ne' lieti calici.
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