Après une série d’assassinats sadiques, Joseph Vacher est le premier "tueur en série" français. Son procès donne lieu à des réflexions sur la responsabilité pénale et sur le rôle de la psychiatrie. Que nous enseignent les affres de cette affaire ?
- Marc Renneville historien au CNRS, il dirige la plateforme numérique Criminocorpus
L’affaire Vacher : une horreur ! Des crimes sont commis, accompagnés de mutilation et de viols post-mortem. Puisque, quelques années plus tôt, en Angleterre, d’autres crimes abominables ont défrayé la chronique, un surnom est tout trouvé pour ce tueur français : Jack l’Éventreur du sud-est ! Est-il possible de réunir les archives d’un tueur en série ? Oui, en compilant l’ensemble des documents produit par le criminel, quand celui-ci écrit, avec les documents de médecine légale, avec ceux de la justice… Un frisson d’angoisse nous saisit au moment de découvrir la description de ces horreurs. Quand l’histoire est étudiée par l’historien, elle devient passionnante car elle éclaire notre passé, mais aussi notre présent. Quand le cinéaste s’en empare, nous sommes fascinés par le récit. L’affaire Vacher : le juge et l’assassin, le réalisateur et l’historien. (Xavier Mauduit)
Ces crimes nous épouvantent
Car il égorgea sans raison
Des personnes innocentes
Pour son affreuse passion
Pour ces crimes effroyables
Il est un grand coupable
Malgré qu’il serait fou
C’est trop de 8 personnes
Que jamais on l’pardonne
Qu’on lui coupe le cou.
Ces mots extraits d'une complainte de Louis-Modeste Simonet témoignent de la fascination de la société française pour les rebondissements de "l'affaire Vacher". Cette affaire porte le nom de celui qui, vagabond, assassine sauvagement onze bergers et bergères entre 1894 et 1897 dans le sud-est de la France. Son mode opératoire - égorgement, viol, mutilations - et le profil de ses victimes lui valent le surnom de « Jack l'Éventreur français ». Objet de nombreux enjeux juridiques et moraux, cette affaire exceptionnelle témoigne également de l'avancée des méthodes de la police scientifique à la fin du XIXe siècle.
Pour comprendre les dessous de cette affaire, nous recevons Marc Renneville, historien des sciences et de la justice, directeur de recherche au CNRS et fondateur de la plateforme
Criminocorpus.
Il est notamment l’auteur de
Vacher l’Éventreur. Archives d’un tueur en série (Jérôme Millon, 2019),
Crime et folie. Deux siècles d’enquêtes médicales et judiciaires (Fayard, 2003), et il publie en avril
Le Chant des crimes. Les complaintes de l’affaire Vacher (Gaelis, 2021). Il a écrit un article sur l’affaire Vacher dans le
dernier numéro de l’Histoire.
C’est une affaire de mémoire à tiroirs car les crimes s’étalent sur plusieurs années. La principale difficulté pour l’historien est de mettre à distance l’effet de sidération et l’horreur des crimes.
Les complaintes permettent de percevoir l’émotion populaire qui régnait pendant ces affaires criminelles, en particulier au sein des populations illettrées. C’est une sorte de média avant l’heure, chargé d’informer et de raconter l’abominable. Dans "l'affaire Vacher", on découvre que la population est attaché à la mémoire des victimes au-delà de la figure de l'assassin.
"Un monstre prédateur qui réfléchit"
Vacher n’a jamais cherché à faire reconnaître sa folie mais son innocence. On le voit notamment dans ses nombreuses lettres adressées au juge ou directement à la France.
Il est passé par toutes les institutions du XIXe siècle. Toute sa vie est une tentative ratée d’intégration dans la société : il incarne la figure du rejet (jusqu’au rejet de soi-même avec sa tentative de suicide).
Sons diffusés :
Extrait - Le Juge et l'Assassin de Bertrand Tavernier (1976).
Lecture - Lettre de Joseph Vacher du 7 octobre 1897, lu par Olivier Martinaud.
Extrait - Bertrand Tavernier évoque les sources d'inspiration de son film, Le Juge et l'Assassin (1976).
Extrait - Colloque « Les complaintes criminelles en France après 1870 : inventaire, problématisation, valorisation d’un corpus méconnu » (2019) ; complainte "Exécution du tueur de bergers", lue par Catherine Perrier.
Extrait - La Cité de la peur de Alain Berbérian (1994).
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