

Noms de rue ou plaques commémoratives, promenons-nous dans la ville de Paris à l'affût de ces inscriptions porteuses de mémoire.
- Philippe Apeloig Designer graphique et typographe
- Florence Bourillon Professeure d’histoire contemporaine émérite à l'université Paris-Est Créteil et membre du CRHEC
Les plaques dans la ville, c’est la mémoire au coin de la rue… Rue de la Fontaine, est-ce parce que s’y trouvait une fontaine ou bien est-ce un hommage au fabuliste du XVIIe siècle ? Les noms de rue et les plaques commémoratives portent notre histoire et notre mémoire. Les voit-on encore, les voit-on assez ?
41 rue des vinaigriers, Xe arrondissement de Paris : « Ici demeuraient André Picout, gardien de la paix, Émilienne Picout, son épouse, assassinés par les nazis le 21 septembre 1944, morts pour la France » ; 10 rue Danton, VIe arrondissement : « Ici est tombé pour la Libération de Paris Ferdinand Kronis, victime civile, 25 août 1944 » ; Square de la Roquette, XIe arrondissement : « De l’appel du général de Gaulle le 18 juin 1940 à la Libération de Paris, le 25 août 1944, dans ces lieux 4000 résistantes ont été emprisonnées pour avoir lutté contre l’occupant. Elles ont contribué à la Libération de la France ». Ces plaques, elles, contribuent à ne pas oublier. Xavier Mauduit
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Les murs des villes sont bavards et racontent des histoires à ceux qui veulent bien les écouter. Qu’elles soient gravées dans la pierre ou apposées sur une plaque de fer, qu’elles soient fraîchement écrites sur un panneau ou presque effacées sur une vieille enseigne, les inscriptions sont partout et semblent nous faire signe.
Ces traces sont parfois simplement informatives. Elles guident le passant ou lui indiquent une boutique à proximité. Ce sont aussi les plaques commémoratives, éclats de mémoire qui nous font signe. Des morceaux de passé se rappellent à nous et nous empêchent d’oublier que la ville est toujours riche de l’histoire de ceux qui l’ont peuplée avant nous. Toutes uniques de par leur format, leur taille, leur message, les plaques commémoratives rendent hommage à des personnages illustres aussi bien qu’à des anonymes, à des Justes, des employés de la RATP, des enfants, des femmes, des hommes… La grande diversité de ces plaques commémoratives fait de ces traces des hommages authentiques et sensibles, loin de toute standardisation.
Les artisans tailleurs de pierre avaient une connaissance de la composition typographique. Ils ajoutaient parfois des ornementations sur les plaques. On trouve des médailles, des drapeaux, des rubans tricolores, quelques fois des photos. Philippe Apeloig
Les plaques de rue sont, elles aussi, héritées d’une histoire politique et symbolique. Leur nom dépend rarement d’une simple logique spatiale. Dès le début du XVIIe siècle, le duc de Sully a l’idée de donner aux rues le nom de personnages illustres du royaume. Cette partie de l’espace urbain échappe à l’usage populaire et devient un vecteur du pouvoir royal. Dès lors, ces plaques, ces noms de rue, ces enseignes et ces panneaux n’ont jamais cessé d’être des vecteurs de mémoire, de doubler leur utilité administrative d’une forte charge symbolique, politique, voire idéologique.
La grande période de mutation des noms des rues de Paris, c'est la Révolution. On a supprimé tous les saints et saintes devant les noms. On a aussi créé les rues qui portent le nom des grandes valeurs républicaines comme la fraternité. Le retour des Bourbons à partir de 1814 va évoquer des changements importants. Pour les éviter, un décret en 1816 décide que le pouvoir central nommera les rues à Paris et dans toute la France. Cette décision concerne aussi les plaques. C'est l'autorité centrale qui va conférer les hommages publics. Florence Bourillon
Quels sont ces fragments de passé qui tapissent les murs de nos villes ? Comment apprendre de nouveau à les voir et à les considérer ? Quelles histoires ces traces nous transmettent-elles ? Pour le savoir, enfonçons- nous dans la ville en compagnie de nos invités, Florence Bourillon et Philippe Apeloig.

Avec Philippe Apeloig, graphiste, designer et typographe. Il a notamment publié Enfants de Paris - 1939-1945 (Gallimard, 2018) et Ces murs qui nous font signe (Éditions Les Enfants de Paris, 2021). À l'occasion des Journées européennes du patrimoine, du 16 au 18 septembre 2021 de 20h à minuit, Philippe Apeloig projettera en très grand format ses photographies de plaques commémoratives parisiennes sur les façades extérieures du Panthéon. Cette projection sera accompagnée d’une lecture de Denis Podalydès.
Et Florence Bourillon, professeur d’histoire contemporaine émérite à l’université Paris-Est Créteil, où elle a notamment été chargée d’un séminaire portant sur l’histoire des plaques commémoratives dans l’espace parisien. Spécialiste d’histoire urbaine et sociale de la France au XIXe siècle, elle a notamment publié Changer les noms des rues de Paris. La Commission Merruau - 1862 (Presses universitaires de Rennes/Comité d’histoire de la ville de Paris, 2012).
Références sonores
- Archive de Roxane de Buisson qui présente sa collection de plaques de rue en pierre à Simone Matil - ORTF, 1972
- Archive de Denise Benoît qui chante "Adieu nos villages" dans Le Cabaret de l'histoire - ORTF, 1971
- Musique Noms de rue par Cora Vaucaire, 1950
- Archive Le Silence de Paris - RTF, 1957
- Lecture d'un extrait de Dora Bruder, Patrick Modiano, 1997, lu par Tatiana Werner
Pour aller plus loin
- Le site officiel de Philippe Apeloig
- Un court-métrage expliquant le projet de Philippe Apeloig, avec la voix de Denis Podalydès
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