Si l’hospice a certes été un lieu d’enfermement et de solitude, il a aussi été et est toujours beaucoup plus que cela : un lieu de socialisation, un lieu de confort mais aussi de travail…
- Mathilde Rossigneux-Méheust Chercheuse au laboratoire de recherche historique Rhône-Alpes et maîtresse de conférences à l’université Lyon 2
- Vincent Gourdon Chargé de recherches en histoire au CNRS, rédacteur en chef des "Annales de Démographie Historique"
Si la mort est une certitude, la vieillesse ne l’est pas : il faut réussir atteindre ce troisième âge, à la fois beau et complexe. Pour l’historien, pour l’historienne, il est difficile d’appréhender les archives laissées par les vieillards : Que nous disent-ils ? Comment entendre leur parole ? Parlent-ils ? Les inventaires après décès permettent d’étudier leur fortune, mais sont-ils riches ou bien sont-ils pauvres ? D’ailleurs, quel est leur univers de vie ? Quelles sont les couleurs, les odeurs, de leur fin grand âge ? Autant de question auxquelles l’historien et l’historienne cherche une réponse dans les archives, mais parfois, il faut fouiller ailleurs : dans sa discothèque ! En 1963, Jacques Brel nous apportait des réponses :
Les vieux ne parlent plus ou alors seulement parfois du bout des yeux
Même riches ils sont pauvres, ils n’ont plus d’illusions et n’ont qu’un cœur pour deux
Chez eux ça sent le thym, le propre, la lavande et le verbe d’antan
Que l’on vive à Paris on vit tous en province quand on vit trop longtemps !
Tiens, il faut penser à remonter la pendule d’argent… vous savez, celle qui ronronne au salon, qui dit oui qui dit non, qui dit qu’elle nous attend.
Nous recevons dans la première partie de l'émission Mathilde Rossigneux-Méheust, chercheuse au laboratoire de recherche historique Rhône-Alpes et maîtresse de conférences à l’université Lyon 2, elle a rédigé Vies d'hospice : vieillir et mourir en institution au XIXe siècle, aux éditions Champ Vallon, en 2018.
Ce qui change fondamentalement avec la Révolution, c’est que des lieux qui étaient des lieux d’assistance, d’accueil de la pauvreté, on passe à des lieux qui deviennent réservés aux personnes âgées. Il y a une spécialisation de ces espaces-là. De la même façon que le XIXe est le siècle des asiles, des prisons, des écoles, de la spécialisation de la prise en charge, et bien les personnes âgées trouvent dans les hospices et les maisons de retraite des lieux qui leurs sont dédiés. On change la qualification de ces espaces et des résidents, néanmoins les murs restent les mêmes, le personnel, du moins le temps d’une génération reste le même, tout comme les traditions d’accueil. Donc, le XIXe est un siècle où l’on va questionner, aménager, penser l’accueil pour cette nouvelle catégorie de l’assistance. Mathilde Rossigneux-Méheust
Le maintien à domicile reste tout au long du XIXe, et encore aujourd’hui, la solution préconisée d’autant plus qu’elle coûte peu cher à la communauté. L’hospice est donc constamment déprécié pour plein de raisons. D’abord parce que l’hospice encouragerait l’oisiveté, l’imprévoyance, et surtout parce que l’hospice serait à l’origine du délitement des relations familiales et des liens intergénérationnels. La vie de famille est valorisée tout au long du siècle, sauf qu’il y a un décalage énorme entre ce discours et les files d’attente de parfois deux ans dans les établissements. Mathilde Rossigneux-Méheust
Le destin des grands-parents varie considérablement suivant le milieu social étudié : ancêtre garant de l’héritage matériel et culturel dans l’aristocratie, éducateur et lien affectif fort dans la bourgeoisie, soutien domestique dans les classes populaires… Car auparavant, on vieillit en famille. L’occasion de faire le point sur l’émergence de la figure des « grands-parents gâteaux » avec Vincent Gourdon, chargé de recherches au C.N.R.S. - Centre Roland Mousnier, il est l'auteur de Histoire des grands-parents, éditions Perrin, 2012.
Sons diffusés :
Lectures par Daniel Kenigsberg :
- Vies d’hospices : vieillir et mourir en institution au XIXe siècle de Mathilde Rossigneux-Méheust, Champ Vallon
- L’art d’être grand-père, de Victor Hugo, Flammarion
Musiques :
- Sensuous par Cornelius
- Wait and then par Gustavo Santaolalla
- La splendeur par Dominique A
Archive : émission Panorama - Journaliste, Martinez Enrique, ORTF, 21/08/1969
Extrait de film : Tatie Danielle d’Eric Chatiliez
Générique de l'émission : Origami de Rone
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