On the route again, rencontres hallucinées de la Beat Generation : épisode 4/4 du podcast Histoires de routes

Allen Ginsberg à Bénarès achète de la nourriture sur la rive du Gange en février 1963. Photo : Pete Turner
Allen Ginsberg à Bénarès achète de la nourriture sur la rive du Gange en février 1963. Photo : Pete Turner ©Getty
Allen Ginsberg à Bénarès achète de la nourriture sur la rive du Gange en février 1963. Photo : Pete Turner ©Getty
Allen Ginsberg à Bénarès achète de la nourriture sur la rive du Gange en février 1963. Photo : Pete Turner ©Getty
Publicité

Pour la Beat Generation, la route est synonyme d'expérience. Elle offre une errance émancipatrice pleine de promesses de liberté et d'aventures. En fuite, en quête de soi ou de spiritualité, des Amériques à Tanger, de Katmandou à Paris, pour le beatnik, prendre la route est une pulsion créatrice.

Avec
  • Gérard-Georges Lemaire Écrivain, traducteur, éditeur et historien de l’art.
  • Peggy Pacini Maître de conférences en littérature américaine à Cergy Paris Université et membre de l'UMR Héritages.

On the "route" again ! Les rencontres hallucinées de la Beat Generation. 125 000 mots, un rouleau de papier de 40 mètres et des milliers de kilomètres, parcourus ou rêvés, ont été nécessaires à Jack Kerouac pour écrire « Sur la route », son roman phare, comme les phares d’une voiture qui avance à toute alors il fait de l’autostop : « J'ai connu Dean peu de temps après qu'on ait rompu ma femme et moi. J'étais à peine remis d'une grave maladie dont je n'ai rien à dire sinon qu'elle n'a pas été étrangère à cette lamentable et déprimante rupture, à mon impression que tout était foutu. » Sur la route débute par l’évocation d’une rupture, d’homme foutu : « beat » en anglais signifie « cassé », fourbu ». Il est certain que dans l’histoire de la littérature et par le phénomène générationnel qu’elle a produit, le Beat Generation marque une rupture. Xavier Mauduit

Une contre-culture contestataire et libertaire émerge dans l’Amérique puritaine du maccarthysme. Un petit groupe d’auteurs, dont les plus célèbres sont Allen Ginsberg, William S. Burroughs et Jack Kerouac se regroupent et forment le noyau dur de la Beat Generation. Le mot “beat” a trois acceptions. Être beat, c’est d’abord être battu, cassé par la vie et par la société. Mais le beat est aussi le rythme typique de la musique jazz. Enfin, selon la définition de Kerouac, la Beat Generation est aussi “la génération de la béatitude”. Ces auteurs se retrouvent dans leur rejet mutuel des conventions et réfléchissent bientôt à de nouveaux lieux pour mener à bien cette quête de béatitude. 

Publicité

La Beat Generation fut celle du mouvement. Ce voyage est d’abord mental : il s’agit pour ces figures de proue de la jeune contre-culture américaine de s’ouvrir à de nouvelles formes de spiritualité et de religiosité pour proposer une “vision nouvelle” de l’existence, loin de la bienséance de l’Amérique puritaine. Rapidement, ce voyage devient un besoin physique de fuite en avant et de découvertes. Allen Ginsberg, William S. Burroughs, Jack Kerouac et leurs compagnons partent vers l’Amérique du Sud, vers l’Europe ou vers l’Afrique du Nord en quête d’expériences nouvelles et de liberté. Toutefois, c’est l’Orient qui fut leur destination privilégiée. Fascinés par la philosophie orientale et par le bouddhisme, les auteurs beats s’élancent vers l’Inde et vers le Tibet. Dans les années 1960, le hippie trail poursuit ce mouvement en faisant de Katmandou, et de la célèbre Freak Street, le point de ralliement des hippies et des beatniks du monde entier. Pourquoi le voyage a-t-il occupé une place centrale dans la contre-culture américaine des années 1950 ? Pourquoi les hippies et les beatniks firent-ils de l’Orient leur destination privilégiée ? 

Avec Gérard-Georges Lemaire, écrivain, traducteur, éditeur et historien de l’art. Spécialiste de la Beat Generation et plus spécifiquement de William S. Burroughs, il est notamment l’auteur de Beat Generation : une anthologie (Al Dante, 2004) et de Colloque de Tanger, Anthologie (cipM, 2013), colloque qui s'est tenu à Genève en 1975 et dont il est l'initiateur. Il a également préfacé l’édition française du Festin nu de William S. Burroughs (Gallimard, 2012).

Et Peggy Pacini, maître de conférences en littérature américaine à Cergy Paris Université et membre de l'UMR Héritages. Elle est l’autrice d’une thèse, soutenue en 2007 et intitulée “The Duluoz legend" : Jack Kerouac ou la mémoire franco-américaine. Spécialiste de la Beat Generation, elle a publié de nombreux articles à ce sujet. Elle est notamment la traductrice de la correspondance d’Allen Ginsberg parue sous le titre Lettres choisies (1943-1997). Allen Ginsberg (Gallimard, 2013) et l'autrice du chapitre _“_This is the End. Big Sur de Jack Kerouac, ou la frontière de l’errance” dans l'ouvrage collectif San Francisco, à l'ouest d'Eden (PUP, 2012).

Vivre et écrire et voyager et écrire ne font qu'un ; le récit de la route et le récit de la vie. Il y a d'ailleurs cette phrase "La route est la vie" il y a donc bien cette ligne directrice du voyage. Le voyage avec ses différentes formes. Que veut dire le voyage à cette époque, dans cette Amérique maccarthyste ? Pourquoi prennent-ils la route ? Pour échapper à ce carcan familial chez Kerouac et chez d'autres, oui et non. Se libérer d'un cadre de pensée, dans le cadre d'action aussi. C'est une recherche : partir pour se retrouver, une quête de soi, mais pas seulement, une quête de l'autre et puis, peut-être chez Kerouac, cette quête des racines identitaires mais aussi des racines littéraires. Donc, partir à la découverte d'une Amérique qui a déjà été écrite mais qu'on veut redécouvrir à travers le voyage et à travers sa littérature sous la forme de réécriture. Peggy Pacini

Le festin nu est effectivement en voyage en enfer, c'est d'ailleurs un voyage en grande partie autobiographique. C'est un livre que William S. Burroughs écrit quand il réside à Tanger et qu'il arrive au bout du rouleau, au bout du périple de la drogue, c'est d'ailleurs peut-être ce livre qui lui a sauvé la vie. Gérard-Georges Lemaire

Sons diffusés :

  • Archive - 23/05/1964 - Dominique Aury parle du Festin nu de William S. Burroughs. 
  • Archive - 1974 - William S. Burroughs et Bryon Gysin retournent au Beat Hotel, 9 rue Gît-le-Cœur à Paris ou il ont vécu en 1959. 
  • Archive - 1964 - Radio Canada - Jack Kerouac parle de l'origine du mot Beat. 
  • Archive - 1966 - Qui sont les beatniks ? 
  • Archive - 1969 - ORTF - Maulde Coutau récite Le Monde est un endroit merveilleux extrait du recueil A Coney Island of the Mind (1958) de Lawrence Ferlinghetti.
  • Extrait du film Les Chemins de Katmandou (1969) réalisé par André Cayatte d'après le roman et le scénario de René Barjavel.
  • Musique - Cat Steven - Katmandu (1970). 

Pour afficher ce contenu Youtube, vous devez accepter les cookies Publicité.

Ces cookies permettent à nos partenaires de vous proposer des publicités et des contenus personnalisés en fonction de votre navigation, de votre profil et de vos centres d'intérêt.

L'équipe