Sarah Bernhardt en faisait-elle trop ? Déclamer d’hier à aujourd’hui : épisode 3/4 du podcast Grand oral, une histoire de l’éloquence

Sarah Bernhardt (1844 - 1923)
Sarah Bernhardt (1844 - 1923) ©Getty - Hulton Archive
Sarah Bernhardt (1844 - 1923) ©Getty - Hulton Archive
Sarah Bernhardt (1844 - 1923) ©Getty - Hulton Archive
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Écouter un enregistrement de la voix de Sarah Bernhardt provoque la surprise, parfois la déception. Comment déclamaient les comédiens d’antan ? Le voyage dans les voix du passé est décidément une archéologie bien singulière !

Avec
  • Julia Gros de Gasquet Comédienne et maîtresse de conférences HDR à l'Institut d’Études Théâtrales de la Sorbonne Nouvelle
  • Marie-Madeleine Mervant-Roux Directrice de recherche émérite au CNRS

Déclamer d’hier à aujourd’hui ! C’est toujours une étrange émotion d’entendre les voix des acteurs et des actrices du passé, quand nous avons la chance qu’elles soient enregistrées. En 1876, Jean Aicard, poète et romancier, mais aussi dramaturge, fait paraître "La Chanson de l’Enfant", dont il dédicace un exemplaire à Sarah Bernhardt, « dont la voix est un chant de lyre ». L’expression est sublime, mais elle n’est pas suffisante pour saisir cette voix. Pourtant, entendre un enregistrement de Sarah Bernhardt permet-il de l’écouter ? Xavier Mauduit

« La Voix d’or », « la Divine », « l’Impératrice du théâtre »… Derrière ces surnoms se trouve Sarah Bernhardt. Sa voix s’est éteinte depuis près d’un siècle, mais son talent résonne toujours dans les mémoires. Son jeu et sa voix apparaissent parfois sous la plume de Victor Hugo, de Marcel Proust, ou de Marcel Proust. Ces évocations littéraires fascinent et provoquent une irrépressible envie d’entendre la comédienne. Sa voix a été gravée, mais une question surgit : ces enregistrements sont-ils fidèles à la voix de la comédienne ? La légende voudrait qu’une nuit de 1903, cette dernière se soit évanouie d’horreur en entendant sa propre voix enregistrée. L’existence d’un tel mythe interroge. Quel effet provoque l’écoute d’une actrice, un siècle après sa mort ?

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Avec Marie-Madeleine Mervant-Roux, directrice de recherche émérite au CNRS (laboratoire THALIM). Elle a notamment codirigé le projet “Le son du théâtre” avec Jean-Marc Larrue et a dirigé le projet “ ECHO” (avec la participation de Julia Gros de Gasquet). Elle a notamment codirigé Le son du théâtre (XIXe – XXIe siècle) (CNRS Éditions, 2016), “Le son du théâtre. 1. Le passé audible”, Théâtre_/Public_, n° 197, 11/2010, “Le son du théâtre. 2. Dire l'acoustique”, Théâtre/Public n° 199, 03/2011 et “Le son du théâtre. 3. Voix Words Words Words”, Théâtre/Public n° 201, 10/2011. Elle est l’autrice de “Peut-on entendre Sarah Bernhardt ?”, Sociétés & Représentations., no 35, printemps 2013, p. 165-182. 

Et Julia Gros de Gasquet, comédienne et maîtresse de conférences HDR à l'Institut d’Études Théâtrales de la Sorbonne Nouvelle. Elle est en charge de la direction artistique du festival de la Correspondance de Grignan. Elle est notamment l'autrice de En disant l’alexandrin, l’acteur tragique et son art, 17e siècle-20e siècle (Honoré Champion, 2006), “Écouter la voix de Maria Casarès dans Phèdre - Une présence au-delà de l’archive”, Revue d’histoire du Théâtre, n°277, 2018 et “Pour une histoire du jeu en France : XVIIe - XXIe siècles. Perspectives et propositions”, Revue d’Histoire du Théâtre, n° 281, 2019. 

La technique ne permet d'enregistrer les comédiens au théâtre que très tardivement dans les années 1920 – 30 avec la radio. En 1903 pour enregistrer, on va dans une petite pièce qui n’a pas encore le nom de studio, sans public, et on dois parler dans un cornet et surtout ne pas bouger de peur de se cogner au cornet et de gâcher l'enregistrement. On ne refait pas de prise ou très peu. Donc, ce qu’on entend oblige la comédienne à faire tout à fait autre chose que ce qu'elle fait sur scène. Pour nous, c'est étrange, mais pour l'époque, c'est très fidèle.  Marie-Madeleine Mervant-Roux

Les salles de théâtre du XVIIe siècle sont très bruyantes, on les imagine dans le noir avec un public assis, mais pas du tout, le public est debout. Depuis 1836, on sait qu'il y a du public sur scène, les fameux "petits marquis". Ça remue, ça parle fort, les comédiens dans ce cadre-là doivent pousser la voix. La question de la déclamation est indissociable des conditions dans lesquelles le jeu se déroule. Julia Gros de Gasquet

Sons diffusés : 

  • Archive - 1961 - Extrait du disque Cyrano de Bergerac d’Edmond Rostand. Acte I, Représentation à l’Hôtel de Bourgogne.  Avec Daniel Sorano dans le rôle de Cyrano. Coffret de trois disques 33 tours Véga, 1962.
  • Archive – 31/01/1960 - RDF/RTF - Extrait de l’émission Au jour et aux lumières - La diction des vers avec Béatrix Dussane.
  • Archive – Enregistrement de Sarah Bernhardt dans Phèdre de Racine (Acte II, scène 5). Disque Gramophone & Typewriter Co, Paris, 1903.
  • Lecture par Marc-Henri Boisse d’un extrait de Louis Jouvet, Le Comédien désincarné (Flammarion, 2009).
  • Archive – 29/01/1958 - RDF/RTF - Extrait de l’émission Théâtre et université - Maria Casarès interprète Phèdre au TNP.
  • Archive – 22/01/1955 - Gérard Philipe dans Le Cid au TNP. 

Liens :

  • Phonobase - disques et cylindres de la Belle Époque en ligne
    10 000 disques et cylindres phonographiques, 500 heures d'enregistrements antérieurs à 1914, à écouter en ligne.
     
  • Entendre le théâtre - Un voyage sonore dans le théâtre français au XXe siècle. Site de la BNF. 

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