Une rencontre par l’image : épisode 3/3 du podcast Chine-Occident, comment l’affaire a mal tourné ?

Dans la rue des antiquaires, la vitrine d’un marchand de pinceaux, Pékin, décembre 1948.
Dans la rue des antiquaires, la vitrine d’un marchand de pinceaux, Pékin, décembre 1948.  - © Fondation Henri Cartier-Bresson / Magnum Photos
Dans la rue des antiquaires, la vitrine d’un marchand de pinceaux, Pékin, décembre 1948. - © Fondation Henri Cartier-Bresson / Magnum Photos
Dans la rue des antiquaires, la vitrine d’un marchand de pinceaux, Pékin, décembre 1948. - © Fondation Henri Cartier-Bresson / Magnum Photos
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Quelles sont les images par lesquelles l’Occident a rencontré la Chine ? Retour sur une rencontre très visuelle, genèse de nombreux fantasmes.

Avec
  • Pierre-Emmanuel Roux historien, maître de conférences à l’Université Paris Diderot
  • Michel Frizot historien de la photographie

La Chine face à l’Occident et l’Occident face à la Chine : c’est l’histoire d’une rencontre et c’est l’histoire d’une confrontation d’images qui se construit avec un double miroir. 

D’un côté, il y a le regard des Chinois sur des Occidentaux avides de s’accaparer le grand gâteau asiatique et qui sont capables des pires cruautés. Elles sont détaillées dans Les Enfers vivants, un petit pamphlet de 1875 publié à Canton : le supplice du fouet jambes entravées, des hommes piétinés au moment de l’appel, des latrines pour prison, ou encore des plaies frottées au sel et au jus d’agrume.

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De l’autre côté, il y a le regard des Occidentaux sur les Chinois, entre mépris et fascination, notamment devant les « supplices chinois ». Le modèle du genre est le lingchi ou démembrement, quand un condamné est découpé vivant, par petits bouts. Des photographies de ce supplice circulent en Occident où elles horrifient. 

Des Chinois fourbes et cruels et des Occidentaux avides et tortionnaires, c’est une guerre de l’image entre des mondes lointains, mais qui sont loin de s’ignorer.

Nous recevons aujourd'hui Pierre-Emmanuel Roux, historien, maître de conférences à l’Université Paris Diderot, il est notamment l’auteur de Les Enfers vivants ou La tragédie illustrée des coolies chinois à Cuba et au Pérou, paru chez Hémisphères Éditions, en 2018. 

Dans la seconde partie de l'émission, Michel Frizot, historien spécialiste de l’histoire de la photographie, directeur de recherches au CNRS, nous parlera de l’exposition " Henri Cartier-Bresson : Chine 1948-1949 I 1958" dont il signe le commissariat, jusqu'au 9 février à la Fondation Henri Cartier-Bresson. Sur le sujet, il est l'auteur avec Ying Lung Su de Henri Cartier-Bresson : Chine 1948-1949 | 1958, publié aux éditions Delpire en 2019.

Henri Cartier-Bresson ne se considère pas comme photo-journaliste, mais comme photo-reporter. Il a un regard très bienveillant, mais il n'est pas un reporter de guerre comme on a l'habitude de les voir. Il n'est pas photo-reporter comme son ami Robert Capa, qui avait traité la guerre civile en Espagne, puis le Débarquement, etc. Il a plutôt une attitude d'anthropologue, en fait. Il répète tout le temps que ce qui l'intéresse, c'est l'homme avant tout. C'est à dire la population, les gens, ce qu'ils font, comment ils se comportent, quelle influence les événements ont sur les gens, mais pas les événements eux mêmes. En Chine, il ne photographie aucun conflit, d'ailleurs il n'a accès à aucun moment de conflit. Il est envoyé pour donner une image de la culture chinoise qui va disparaître. Michel Frizot

_I_l a une manière très particulière de photographier. On peut le voir dans des petits films qui ont été faits à l'époque. Il est très furtif. Il dit lui même qu'il est très rapide. Et puis, dès qu'on a fait une photo s'en aller immédiatement, il faut être un peu comme un prédateur. Il faut avancer à pas de loup et ne pas se faire remarquer pour que les gens ne voient pas que vous êtes là. Faire la photo très vite et partir. Et Henri Cartier-Bresson excelle vraiment dans ce jeu, dans cette méthode, car c'est une véritable méthode. Et pour cadrer, il dit que c'est une question de millimètres entre la photo médiocre et la bonne photo. Michel Frizot

Sons diffusés : 

Lecture par Elodie Huber : Lettre au capitaine Butler, de Victor Hugo, 25/11/1861

Lecture par Camille André : Extrait de la Description illustrée des Enfers vivants, auteur inconnu, 1875, traduction Pierre-Emmanuel Roux, p.240

Archives : 

  • Chronique de Jean Pierre Chabrol : "Intensément vôtre - le supplice chinois", dans La vie à plein temps, le 03/03/1988
  • Henri Cartier Bresson, dans L'aventure moderne, le 09/04/1962
  • Henri Cartier Bresson, dans Profils perdus, le 26/10/1989

Musique : Le tango chinois, par Grand Jojo

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