Cent ans d’histoire de la radio dans ses beaux jours et ses moments tragiques

trois femmes à Hyde Park, Londres, écoutent une émission avec leurs postes de radio alimentés par batterie - vers1930 -  Ullstein Bild
trois femmes à Hyde Park, Londres, écoutent une émission avec leurs postes de radio alimentés par batterie - vers1930 -  Ullstein Bild ©Getty
trois femmes à Hyde Park, Londres, écoutent une émission avec leurs postes de radio alimentés par batterie - vers1930 - Ullstein Bild ©Getty
trois femmes à Hyde Park, Londres, écoutent une émission avec leurs postes de radio alimentés par batterie - vers1930 - Ullstein Bild ©Getty
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Happy birthday ! La radio a 100 ans mais n'a pas pris une ride.

Née en 1921, il y a cent ans, la radio c’était alors le média innovant, populaire et exigeant, qui se cherchait et déployait déjà tous ses atouts : de l’information à la fiction radiophonique, un rendez-vous qui tenait en haleine des familles entières à travers le monde, rassemblées autour de ces énormes postes à ampoules qui trônaient en grésillant en majesté dans le salon. La radio semblait puissante mais à quel point ? Dix-sept ans après sa naissance, les États-Uniens en sont les cobayes involontaires au cours d’une démonstration magistrale.  

Le 30 octobre 1938, CBS annonce l’invasion de la Terre par des extraterrestres tout à fait hostiles, une bonne blague qui surfe sur le succès des romans de science-fiction, en l’occurrence ici La Guerre des Mondes d’HG Wells, mais qui fait mouche tant les faux flashs d’information qui en rythment le récit paraissent réels. L’inventeur de ce premier canular radiophonique de grande ampleur, c’est Orson Welles, un jeune metteur en scène qui n’est pas encore devenu le monstre sacré du cinéma mondial qu’il deviendra avec Citizen Kane en 1941. 

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L’émission aurait créé une panique générale en annonçant cette attaque martienne, un coup de maître pour illustrer la puissance ravageuse de la radio. Mais une panique pas si grande que ça finalement. Alors que l’on évoque encore souvent aujourd’hui cette terreur qui aurait saisi les Américains convaincus par cette mystification radiophonique, après enquête la majorité des auditeurs avaient préféré écouter, ce soir-là, le ventriloque Edgar Bergen, sur une autre fréquence. La surexposition de l’évènement avait fourni une bonne occasion à la presse écrite pour tenter de discréditer la radio, sa jeune concurrente, et la manipulation des foules qu’elle pouvait orchestrer. Cette mise en ondes de La Guerre des Mondes est devenue une légende avec ses morceaux de faux et de vrai, et son auteur Orson Welles avec elle. Rares sont les conférences ou les colloques consacrés à la radio où l’on n’entend pas sa citation déformée et transformée, dont je vous livre une des multiples versions sans guillemets : l’avantage de la radio sur le cinéma, c’est que l’écran n’a pas de limite. Si la démonstration de Welles n’a pas eu les effets d’une intensité apocalyptique qu’on lui a souvent attribué, le mythe est resté, le coup de maître fait figure d’avertissement et de précédent largement exploité a posteriori, après la Deuxième guerre mondiale au cours de laquelle on avait pu goûter des atouts et de la toxicité de la radio, de son rôle dans les liens entre la Résistance dispersée au robinet de propagande fasciste qu’elle avait aussi incarné. C’est la force de frappe de la radio et la conscience que l’on en avait déjà dans les années 1930 que nous raconte cette histoire, celle d’un média qui compte encore aujourd’hui un indice de confiance important, mais qui peut aussi devenir un formidable outil de nuisance. Alors que les responsabilités de la France dans le génocide des Tutsis occupent toutes les Unes du moment, on se souvient des discours toxiques dispensés à l’antenne de la Radio des Milles Collines au Rwanda en 1994 pour exaspérer des haines historiques qui ont abouti à une tentative d’extermination au présent.  

Joyeuse anniversaire à notre radio, avec la conscience de sa joyeuse histoire mais aussi de ses dimensions tragiques.  

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