Gilles Caron, un regard dans l’histoire

Photos de Gilles Caron dans le film "Histoire d'un regard" de Mariana Otero
Photos de Gilles Caron dans le film "Histoire d'un regard" de Mariana Otero - ©Jérôme Prébois Archipel
Photos de Gilles Caron dans le film "Histoire d'un regard" de Mariana Otero - ©Jérôme Prébois Archipel
Photos de Gilles Caron dans le film "Histoire d'un regard" de Mariana Otero - ©Jérôme Prébois Archipel
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"Histoire d’un regard", de Mariana Otero, sort en salles aujourd’hui. Ce regard, c’est celui de Gilles Caron, photographe prolifique qui a couvert l’actualité particulièrement heurtée et dramatique de la fin des années 1960.

1964-1970 : six années de reportage que la réalisatrice décide d’explorer pour restituer la démarche du photographe à travers son regard au sens propre du terme : elle obtient les 100 000 négatifs conservés sur un disque dur et reconstitue les événements photographiés du point de vue de Gilles Caron, en suivant la succession des photos prises sur le vif pour retracer l’expérience des sens du photographe dans l’action.  

Au cœur du regard de Gilles Caron

A travers l’observation poussée de ces milliers de planches-contacts, Mariana Otero entre dans la fabrique de l’image, dans la subjectivité du regard de Gilles Caron qui le guide au fil de ses clichés. Dans cette succession sans tri, sans sélection, on voit les inédits, les succès de presse comme les ratés, les moments d’attente, de recherche de l’objet du désir du photographe qui se fait attendre. Sous nos yeux se nouent les rencontres, comme celle avec Daniel Cohn-Bendit en 1968. Une série de photos littéralement coproduites par le photographe et le manifestant qui s’échangent des regards entendus, convenant de la pertinence de son face à face avec un CRS devant le rectorat de Paris. Des événements majeurs ou minuscules qui attirent le photographe et déclenche l’histoire qu’il trouvera à raconter. Gilles Caron a disparu - au Cambodge en 1970 - mais il reste ses photos et quelques minutes d’entretien.

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De prise de vue en prise de vue : le cheminement d'un regard

Gilles Caron parcourt en quelques années la vie mondaine et les grands conflits, la guerre du Vietnam, le printemps de Prague, la guerre du Biafra ou encore celle du Tchad. Pour chaque série, Mariana Otero scrute la succession des prises de vue pour comprendre le cheminement d'un regard. Un exercice particulièrement réussi sur l’entrée de l’armée israélienne dans Jérusalem en 1967 lors de la guerre des Six Jours.  Un exercice pour lequel, la réalisatrice convie l’historien Vincent Lemire à déchiffrer le parcours effectué ce jour-là par le photographe tombé par hasard sur un des moments le plus fort par sa portée symbolique, lorsque les soldats de Tsahal atteignent le Mur des Lamentations et l’embrassent comme une terre enfin retrouvée. Une série de photos, son premier reportage qui sera publié partout à travers le monde. 

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Quand l'image porte en elle l'expérience du photographe

Si le jeu de la reconstitution, de son cheminement, de son histoire dans l’histoire est particulièrement ludique, cette séquence en particulier est aussi un exercice sur la construction de l’événement. Ce Mur des Lamentations, personne ne l’attendait dans cette guerre qui ne devait pas atteindre la ville et c’est pourtant une des images les plus diffusées et représentatives de l’imaginaire de ce jour-là, nimbée de religiosité pourtant pas si présente à l’esprit des acteurs de l’événement. Le film de Mariana Otero nous dit aussi que l’image se construit avec l’expérience de celui qui la saisit ou de celui qui la regarde. Les guerres photographiées par Gilles Caron portent en elle les traces d'une autre guerre, celle d’Algérie, qu’il a faite en tant qu’appelé pour le pire. Histoire d’un regard est un bel hommage, mais aussi une belle démonstration de la puissance des images, et de l'idée que celles-ci ne recèlent aucune vérité absolue ni universelle. 

par Anaïs Kien 

Pour plus d'informations : Histoire d’un regard, un film de Mariana Otero, le 29 janvier au cinéma

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