Emmanuel Macron et la culture : le programme et le concert du Louvre

Le DJ et artistes Richard Orlinski au Louvre dimanche soir, pour la victoire d'Emmanuel Macron.
Le DJ et artistes Richard Orlinski au Louvre dimanche soir, pour la victoire d'Emmanuel Macron. ©Getty - Jean Catuffe
Le DJ et artistes Richard Orlinski au Louvre dimanche soir, pour la victoire d'Emmanuel Macron. ©Getty - Jean Catuffe
Le DJ et artistes Richard Orlinski au Louvre dimanche soir, pour la victoire d'Emmanuel Macron. ©Getty - Jean Catuffe
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Qu'est-ce que la programmation de son concert hier au Louvre dit de lui ? Et quel est le programme du nouveau président en matière de culture ?

Le concert du Louvre : un choix d’artistes invités surprenant et signifiant

Il est intéressant de se pencher sur l’étrange programmation du rassemblement de la victoire d’Emmanuel Macron hier soir au Louvre. Si l’on a beaucoup parlé de la symbolique du lieu choisi, les prestations scéniques et le choix des invités d’Emmanuel Macron ont été étrangement peu commentés et montrés en direct, preuve que cette programmation avait de quoi surprendre. En effet, Nicolas Sarkozy avait fait la fête place de la Concorde en 2007 avec des figures très traditionnelles de la chanson française comme Johnny Hallyday et Mireille Mathieu, qui avait chanté la Marseillaise.

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François Hollande s’était lui aussi, place de la Bastille, entouré de chanteurs français populaires, et identifiés à gauche comme Axel Bauer, Yannick Noah, ou encore Pep’s.

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Cris Cab, Magic System, Richard Olinski : des "entertainers" internationaux ... peu connus des Français

Emmanuel Macron avait choisi, lui, un casting singulier, pas forcément connu et identifié par une majorité de Français, mais très significatif symboliquement. A la surprise générale, c’est Cris Cab, un chanteur de pop américain connu pour ses collaborations avec le producteur Pharell Williams, et que même les grands-messes cathodiques comme les NRJ Music Awards ont du mal à faire venir, qui a symboliquement ouvert cette soirée avec un message de félicitations au vainqueur délivré en anglais. Un choix qui marque à la fois la volonté de parler à un public jeune et de signifier l’ambition internationale d’Emmanuel Macron.

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Lui ont succédé sur scène les chanteurs ivoiriens de Magic System, eux aussi professionnels de l’entertainment, mais aussi symboles de diversité et plutôt marqués à gauche (le groupe faisait partie de la délégation de François Hollande lors de son voyage en Côte d'Ivoire) . Enfin, l’équipe d’Emmanuel Macron a délibérément placé ce rassemblement de la victoire du côté de la fête plus que de celui du meeting, en invitant deux DJ français à clore la soirée, mais là encore le choix d’En Marche est assez surprenant. Car les deux hommes qui se sont relayés aux platines incarnent une certaine idée de la success story à la française : le premier, Michael Canitrot, est l’un des représentant de la dernière génération de la French Touch, et a bâti sa réputation dans les grands clubs français avant de faire carrière à l’internationale et de collaborer avec de grandes marques de luxe, comme Dior ou Cartier. Le deuxième, Richard Orlinski, DJ à ses heures perdues, est surtout connu pour son travail d’artiste plasticien. Boudé dans un premier temps par les galeries parisiennes il est aujourd’hui très coté et collectionné par les stars hollywoodiennes.

Le programme culturel d'Emmanuel Macron : rationaliser et démocratiser la culture

Un programme mis au point au cours de réunions de concertations tout au long de la campagne et qui n’a été finalisé que très tard, le 15 avril dernier, alors que la période de réserve avait commencé**.** Emmanuel Macron promet dans son programme de maintenir le budget de la culture mais indique que les politiques culturelles seront évaluées et que le ministre devra rendre compte de ses résultats. Emmanuel Macron prône le décloisonnement du Ministère de la Culture qui devra travailler avec d’autres ministères avec les collectivités territoriales et en particulier l’éducation nationale, et notamment rendre possible l’objectif que s’est fixé Emmanuel Macron en matière d’éducation culturelle : 100 % des enfants doivent bénéficier d’une pratique artistique (orchestre, théâtre, rencontre avec des artistes), et toutes les institutions et collectivités seront invitées à se mobiliser sur le sujet.

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Ouverture élargie des bibliothèques et un "pass culture" de 500 euros à 18 ans

Les deux grandes mesures destinées à garantir la démocratisation de la vie culturelle, sont, d’une part l'ouverture élargie des bibliothèques, ouvertes aujourd'hui seulement 41h par semaine en moyenne dans les grandes villes. Emmanuel Macron veut les ouvrir le soir et le dimanche et garantit qu’il aidera les collectivités à financer ce coût. L’autre grande mesure pour l’accès à tous de la culture, c’est ce pass culture de 500 euros, inspiré de celui mis en place en Italie par le gouvernement de Matteo Renzi, qui sera remis à tous les aux jeunes de 18 ans qui leur permettrait via une application (ce qui suppose un smartphone) de dépenser ces 500 euros pour la culture en allant au théâtre, au musée, au cinéma, ou en achetant de la musique ou des livres sur internet.

Rationaliser l'intermittence et ouvrir la culture au secteur privé

Pour ce qui est de l’intermittence, Emmanuel Macron promet de maintenir et pérenniser le régime, mais en l’adaptant, sans qu’on comprenne très bien comment, bien que l’on croit comprendre que les artistes bénéficiant de l’intermittence seraient par exemple tenus de s’engager à intervenir par exemple dans les écoles. Les propositions d’Emmanuel Macron vont souvent dans le sens d’une plus forte présence du secteur privé : Emmanuel Macron prône le recours affiché et massif au mécénat pour financer le maintien et la restauration du patrimoine, il prône aussi un meilleur partenariat entre « théâtre privé et théâtre public » pour permettre aux spectacles de mieux circuler dans la France entière. Il souhaite aussi simplifier la réglementation audiovisuelle en matière de publicité, et se dit partisan d’une plus grande présence des annonceurs, aussi bien pour l’audiovisuel public que privé, pour « lever les freins à la croissance du secteur »

L'ouverture à l’international et à l'Europe

Le nouveau président a promis dès son arrivée au pouvoir de convoquer un sommet avec tous les dirigeants européens, dédié à la culture et destiné à en faire une priorité commune. Parmi les mesures phares d’Emmanuel Macron, on trouve la création d’un « Erasmus de la culture » destiné aux artistes, aux commissaires d’exposition, qui encouragera la co-création, même si l’on ne connait pas les modalités exactes de sa mise en œuvre. La présence aussi d’un corpus européen obligatoire à l’école dans les matières comme la littérature ou l’histoire de l’art doit contribuer à forger l’identité européenne des jeunes Français. Il s’agit aussi de mettre le paquet sur la francophonie, et Emmanuel Macron veut engager la refonte des différents acteurs chargés de porter à l’étranger les couleurs de la France et sa langue, jugés épars et mal organisés entre eux (Alliance françaises, Instituts culturels, ambassade de France etc..). Surtout Emmanuel Macron veut mettre en valeur le savoir-faire français en matière de culture et favoriser l’émergence d’un Netflix européen.

Taxer les géants du net pour financer la création

Un Netflix européen, qui à l’instar du Netflix américain devra payer des impôts. Car sur les grands du financement de la création en France, Emmanuel Macron indique clairement qu’il veut voir les géants du net payer leurs impôts et contribuer à la création en France. Sur le droit d’auteur au niveau européen et français Emmanuel Macron s’en tient à la position traditionnelle de la France en la matière, à savoir qu’il se dit partisan d’un droit d’auteur fort et d’un meilleur partage de la valeur entre les créateurs et les diffuseurs, même s’il préfère voir l’Etat encadrer les négociations entre les parties que légiférer directement.

Redéfinir le périmètre de l'audiovisuel public et changer le système des nominations

Enfin, le nouveau président en matière de médias veut mieux garantir l’indépendance des journalistes, en obligeant les investisseurs privés à diriger les médias qu’ils achètent par le biais d’un trust ou d’une fondation plutôt que directement, pour éviter les conflits d’intérêt. Emmanuel Macron estime également qu’il faudrait que les acteurs de la presse en ligne puissent jouir de droits voisins, et consolider ainsi leur viabilité économique. Pour ce qui est de l’audiovisuel public, Emmanuel Macron se dit déterminé à redéfinir leur périmètre et envisage au besoin le rapprochement de certains d’entre eux. Point notable : il prône la refondation de leur conseil d’administration, qui serait chargé de nommer les présidents des chaînes, ce qui marquerait un perte de pouvoir pour le CSA, très critiqué depuis sa mise en place par François Hollande. Enfin, et c’était l’une des mesures fortes symboliquement de ce programme, Emmanuel Macron promet d’imposer dans les champs de la culture et de l’audiovisuel la professionnalisation des nominations, « afin qu’elle reflètent la diversité de la société », et une ouverture la plus large possible des recrutements, qui doit garantir la fin de l’entre-soi et des décisions discrétionnaires.

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