Investiture de Trump: grève massive des milieux culturels prévue demain #J20artstrike

Affiche #J20artstrike
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Le #J20artstrike, un appel à la « grève » dans les milieux culturels a été lancé pour ce jeudi 20 janvier et sera vraisemblablement très suivi à travers le pays. Et pourrait faire date dans un pays où la majorité des institutions culturelles sont privées et se mobilisent peu.

La guerre semble bel et bien déclarée entre les artistes et Donald Trump. Le nouveau président des Etats-Unis qui prend les rênes du pays ce vendredi a dû renoncer à voir un artiste majeur chanter à sa cérémonie d’investiture, après avoir essuyé plusieurs refus cuisants.

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Déjà largement attaqué alors de la cérémonie des Golden Globes (notamment par l’actrice Meryl Streep), Donald Trump fait aussi l’objet d’un appel à la « grêve » des milieux culturels aux sens large, sans précédents dans l’histoire du pays. Baptisé #J20artstrike, que l’on peut traduire par la grève de l’art du 20 janvier, cet appel a émergé sur internet de manière anonyme le 9 décembre dernier, et invite tous les artistes et toutes les institutions culturelles du pays (écoles d’art, salles de concerts, musées, galeries..) à produire ce jour-là un acte de « non compliance » en anglais, de non-conformité.

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L'appel relayé pour la première fois le 9 décembre dernier
L'appel relayé pour la première fois le 9 décembre dernier

Très vite, plusieurs artistes de premier plan ont signé et relayé, cet appel. Parmi les premiers, l’artiste plasticien Richard Serra, le vidéaste star Joan Jonas et des dizaines puis des centaines d’autres. Plusieurs centaines de galeries d’art ont indiqué qu’elles seraient fermées à New York, mais aussi sur la Côte Ouest. Et très vite les écoles d’art, les salles de concert et surtout les grands musées ont commencé à réagir, certains avec beaucoup de volontarisme d’autres avec plus de précaution.. Parmi les grands noms qui portent le projet on trouve aussi beaucoup de figure majeures de l’université, comme par exemple Hal Foster, l’un des critiques d’art les plus importants aux États-Unis, professeur à Princeton, que j’ai pu joindre hier.

C'est un appel à la grève, mais cela n'en est pas une stricto sens, le mot de grève est utilisé pour sa force rhétorique. En réalité c'est plus un appel aux musées mais aussi à tous les acteurs de la culture, à agir, à trouver un moyens de penser, de questionner différemment, dans la situation d'urgence que nous connaissons. Plusieurs musées ont décidé de rester ouvert mais de ne pas faire payer l'entrée, ce qui est très rare aux États Unis. D'autres musées vont proposer une programmation spéciale. Le Whitney Museum de New York fait fort, avec trois heures de conversations ouvertes encadrées par un groupe d'artistes, mais aussi des visites guidées qui proposent un certain point de vue sur l'Amérique. Ce qui me semble être une réponse extrêmement intéressant. La réponse du musée Guggenheim est plus faible, avec juste quelques pièces exposées dans l'atrium. Les modes de réponses possibles sont donc très variées d'un lieu à l'autre.

Un appel à visée incitative mais aussi punitive

On sait qu'ailleurs l'idée même de se mobiliser fait débat. Et les équipes de directions de certaines instituions ne sont toujours pas parvenues à se mettre d'accord sur la réaction appropriée. La DIA Art fondation de New York hésite par exemple à fermer ou à rester ouverte mais laissera ses employés libres de participer aux différentes marches prévues dans toutes les villes. Faire date et surtout voir qui réagira ou non est l'un des enjeux majeurs de cette action explique Hal Foster.

Il y a une double portée à cet appel. D'une part, il y a toutes ces institutions aux États Unis, comme les musées ou les universités, qui, bien qu"elles soient privées, revendiquent une mission d’ordre public, voire démocratique. Avec cet appel, nous les invitons en fait à incarner, à mettre en œuvre, et à faire vivre pleinement cette mission. Et l'autre pendant de cet appel vient du constat que beaucoup d'acteurs de la scène artistique sont aujourd’hui très liés, voire sont carrément inféodés à l'oligarchie libérale et aux milieux d'affaire. Certains ont des connexions trumpistes. Et une partie de ce projet du :#J20 vise à nommer et à dénoncer ces acteurs. Il y donc t dans cette initiative une portée incitative, mais aussi une portée punitive, on peut le dire clairement.

Déconstruire l'opposition entre le peuple et l'"élite" artistique

A quel point cet appel sera-t-il suivi ? Peut-il diviser le monde de l'art? Quelles en seront les conséquences ? Les questions sont nombreuses. Mais l'une des plus importantes reste de savoir si les artistes et les milieux culturels, qui s'étaient beaucoup mobilisés pour Hillary Clinton, et qui n'ont pas été entendus par le grand public sont aujourd’hui audible. Oui répond fermement Hal Foster.

"Est-on audible ? C'est l'une des questions les plus intéressantes. Et c'est l'un des problèmes auquel on veut s'attaquer avec #J20. Cette fameuse opposition sans cesse rabâchée notamment par Donald Trump entre le peuple et les artistes, écrivains et universitaires qui appartiendraient à une élite déconnecté. Or cette opposition et la notion, même de peuple sont justement des constructions populistes pensées par les gens comme Trump pour parler à la place du peuple, et nous devons la déconstruire. Je veux dire, nous, artistes universitaires sommes aussi des gens, et faisons aussi partie du peuple américain ! Et à ceux qui critiqueraient le caractère uniquement symbolique d'une action comme le #J20, je réponds que vue la gravité de la situation , la force de frappe d'une action, même symbolique peut être réelle et ne doit pas être négligée.