Que nous disent Fauré, Liszt et Debussy selon le philosophe-musicien ? Les éditions Albin Michel nous font un très beau cadeau: la publication de textes inédits du philosophe-musicien Vladimir Jankélévitch, textes écrits entre 1929 et 1983 et rassemblés sous le titre de L’enchantement musical.
Et à les lire, on préférerait même se taire, écouter ce que Jankélévitch appelait des « morceaux de temporalité enchantée », morceaux entre le silence et la parole, qui en disent plus que le 1er et la 2nde… mais, et c’est bien la question de la musique soulevée par les philosophes : ces morceaux en-chanté, que nous disent-ils ?
Que nous dit la musique selon Jankélévitch ? Nous dit-elle une pensée, un langage, un objet, ou, au contraire, rien de tout cela ? Et que nous dit, par exemple, le Requiem op. 48 de Gabriel Fauré que le philosophe évoque ici ?
Dit très rapidement, on peut dire que les pensées de la musique se caractérisent par deux interprétations : soit elles la ramènent à une identité autre qu’elle-même et qu’elle exprimerait, ou elles la rappellent à elle-même et tentent d’en dégager une essence.
Mais, pour Jankélévitch, ce n’est ni l’une ni l’autre de ces tentatives que l’on trouve, car la musique de Fauré, par exemple, est la mort selon lui. Elle est la mort, mais pas parce qu’elle exprime la mort ou nous mène au néant, mais parce qu’elle retire toute matière, toute substance, tout corps, parce qu’elle allège. Ni quelque chose ni rien, la musique se fait donc légèreté. Un presque-rien, un je-ne-sais-quoi…
Autre compositeur que chérissait Jankélévitch : Liszt. Et plus précisément, ses pièces, Années de pèlerinage, auxquelles il consacre de très belles pages. Alors, comment saisit-il ces pièces musicales ? Comment parvient-il même à les saisir si la musique allège, si elle n’est pas rien, mais presque-rien, si elle est un je-ne-sais-quoi ?
Charme, mystère, inexprimable, infini… ce sont les mots qui reviennent le plus souvent quand la parole prend le relais de la musique, comme si le langage ne faisait que redoubler l’indéfinissable, celle des impressions glanées au long d’un voyage en Suisse et en Italie comme on l’a entendu avec Liszt. Charme, impression, mystère, finalement, pourquoi vouloir saisir la musique, pourquoi vouloir lui donner une pesanteur ?, c’est peut-être la question que nous pose ici Jankélévitch.
On ne pouvait clore cet « enchantement musical » avec Jankélévitch sans avoir entendu son adoré Debussy. Pas de « décor trop appuyé », de « paysage trop précis », de « bruits trop réels », seulement le pur plaisir des sons qui s’envolent, qui nous pousse à la surprise et non au savoir.
Extraits musicaux
Gabriel Fauré, Requiem, Op. 48
Liszt, Années de pèlerinage, la 2ème année en Italie
Debussy, La mer
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