

Après la fin du monde, hier, ou comment accepter et se réjouir de notre impuissance face à cette fin inéluctable, aujourd’hui, une autre fin, qui a déjà eu lieu : celle de la de littérature, grâce à l’essai de Johan Faerber qui soulève cette question : qu’écrire si la littérature est morte ?
Johan Faerber, éditeur, co-redacteur en chef du magazine Diacritik et chercheur en littérature, publie Après la littérature, Écrire le contemporain aux éditions puf collection perspectives critiques.
La fin de la littérature
Que faut-il entendre par « fin de la littérature » ? À entendre Michel Houellebecq, dont les romans sont connus de tous (au moins leurs titres), dont l’idéal serait la poésie, on se demande en quoi la littérature serait morte.
Et en lisant l’essai de Johan Faerber, au vu de la profusion d’auteurs contemporains convoqués : Camille de Toledo, Célia Houdart, Tanguy Viel, Nathalie Quintane, Stéphane Bouquet, pour n’en citer que quelques-uns…, on serait tenté de se poser la même question. Une telle présence d’écrivains ne contredit-elle pas cette fin de la littérature ?
C’est en 2007 que le journaliste Donald Morrison soutient dans une tribune du Time Magazine que « la culture française est morte »… Les réponses ne se sont pas fait attendre : les spécialistes se sont pressés pour lui montrer, au contraire, la vigueur de la littérature.
Mais, au fond, entre l’affirmation d’une fin de la littérature et celle de sa vitalité : de quelle littérature les uns et les autres parlent-ils ? Que faut-il entendre par mort ou vitalité de la littérature ? Et surtout de quelle écriture est-il question ? Que reste-t-il à dire et à écrire, et comment, si comme certains le disent, la littérature finie ?
Ecrire… et lire
En 1957, Albert Camus recevait le Prix Nobel de la littérature. Quand on parle de littérature et de sa disparition, c’est d’ailleurs à ça qu’on pense, à de la grande Littérature, avec un grand L, à de grandes phrases, si belles et si simples, de grands auteurs, à Balzac, Proust ou Camus. Pourtant, à écouter Camus, il ne s’agit déjà plus de grande littérature, séparée et surplombant le monde.
Mais qu’a-t-il écrit, lui, Camus ? Et qu’écrivent les auteurs si ce n’est plus de la grande littérature ? On pourrait croire ces questions dévolues aux seuls spécialistes. Pourtant, il s’y joue quelque chose qui nous touche tous…
Parce que nous sommes tous, plus ou moins, lecteurs, il peut être bon de se demander ce qu’on lit aujourd’hui : est-ce encore de la littérature, ou autre chose, et alors quoi ? Quel rapport avoir avec cette littérature si elle n’est plus sacrée, si elle est plus proche de nous, si elle nous est contemporaine, si elle n’est plus séparée, pour reprendre les mots de Camus ? Et que peut-elle nous donner à lire ?
Ecrire quoi… et comment
Nathalie Quintane fait partie des auteurs cités par Johan Faerber : elle fait partie des auteurs qui s’attachent à écrire sans le poids écrasant de la grande littérature, sans attribuer à celle-ci des tâches consolatrices ou autre, de grandes œuvres…
Au-delà de la question passionnante de savoir ce qu’on lit aujourd’hui, de quoi on nous parle, littérature ou pas, il est ainsi passionnant de se demander comment on le dit et pourquoi. Pas seulement que nous disent les écrivains, mais comment le disent-ils et qu’en attendre ? Et comment nous pouvons, à notre tour, dire, parler, s’approprier les mots et les réfléchir. C’est sûrement la question.
Que lit-on aujourd’hui ET comment fait-on pour écrire aujourd’hui ? Au cœur d’une déclaration de mort, celle de la littérature, de la fin du monde ou du présent qui ne se cesse de s’évanouir, se trouve ainsi paradoxalement une force : comment, avec quel style, sous quelle forme, dans quel but, continuer à écrire et à lire.
EXTRAITS :
- Interview de Michel Houellebecq par Laure Adler (Arte, Permis de penser, 2005)
- Discours d’Albert Camus pour son Prix Nobel (1957)
- Nathalie Quintane au micro de Marie Richeux (France Culture, Par les temps qui courent, 2018)
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