

Les météores, ce sont tous les phénomènes aériens sublunaires, comme la neige, la pluie ou l’arc-en-ciel, mais c’est aussi le titre d’un texte trop peu connu de Descartes. À quoi ressemble sa philosophie des météores ?
Savez-vous ce que sont les météores ?
Les météores, ce sont tous les phénomènes aériens sublunaires, par exemple le vent, la neige, la pluie, la grêle ou encore l’arc-en-ciel, météore du grec « meteoros » qui signifie « qui est en haut ».
Mais les météores, c’est aussi le titre que le philosophe René Descartes a donné à l’un de ses textes, peu lu et travaillé, qui traite précisément de ces phénomènes qui ont lieu sous la lune mais au-dessus de nos têtes.
Les Météores de René Descartes est édité chez Rivages poche, collection Petite Bibliothèque, avec une préface de Maxime Rovere.
Que nous dit Descartes à travers ces pages ? Quelle pourrait être une philosophie des météores ? Comment penser la pluie, la neige ou les arcs-en-ciel ? Et comment ces pages nous disent-elles autre chose de ce philosophe d’abord connu pour sa métaphysique et son idée de maîtriser la nature ? Découverte de ce texte trop peu connu…
Ni scientifique ni poète
Nous avons naturellement plus d’admiration pour les choses qui sont au-dessus de nous que pour celles qui sont à pareille hauteur ou au-dessous. Et quoique les nues (les nuages) n’excèdent guère les sommets de quelques montagnes, et qu’on en voie même souvent de plus basses que les pointes de nos clochers, toutefois, parce qu’il faut tourner les yeux vers le ciel pour les regarder, nous les imaginons si relevées, que même les poètes et les peintres en composent le trône de Dieu, et font que là il emploie ses propres mains à ouvrir et fermer les portes des vents, à verser la rosée sur les fleurs et à lancer la foudre sur les rochers. René Descartes
Ce sont les premières lignes que Descartes écrit en ouverture de ses Météores.
D’emblée, le ton est donné : de ce qui se passe au-dessus de nos têtes, nuages, foudre, pluie ou neige, nous en avons d’abord une sensation, un sentiment : de l’admiration, de la fascination, un peu de poésie et beaucoup d’imagination.
Il en est de même pour les philosophes : le ciel les émeut, les inspire et leur fait aussi écrire les pages parmi les plus marquantes de leur philosophie : c’est Montesquieu et sa théorie politique des climats, c’est Kant et sa nuit étoilée, tout autant morale qu’esthétique…
Mais quelle connaissance les philosophes peuvent-ils avoir du ciel en tant que tel, sans se substituer aux scientifiques ni faire œuvre poétique ?
C’est la question qui se pose à travers ces pages de Descartes. Qu’a-t-il voulu nous dire en nous parlant de cette nature ?
Rendre lisible la nature sans la désenchanter
D’où viennent les vapeurs de l’air ? Pourquoi les flocons ont-ils un cœur assez résistant pour ne pas fondre tout de suite ? Pourquoi les éclairs de la foudre ne résonnent-ils pas tous avec la même force ?
Ce sont les questions que tente de résoudre Descartes se positionnant ainsi comme un véritable philosophe de la nature.
Observation, description des effets et recherches des causes, ce qu’il a en tête, c’est d’expliquer le plus simplement possible tous ces phénomènes sublunaires. Ce qu’il veut, c’est rendre compréhensible tout le merveilleux des éclairs, des flocons, des tourbillons, sans pour autant le désenchanter.
Autrement dit, ce qu’il fait, c’est qu’il écrit à la fois comme scientifique et poète.
Là est tout l’enjeu pour un philosophe s’attachant au ciel : le rendre lisible sans en perdre le charme…
Force des images et précision des concepts
Eau, terre, feu et air, ce sont les quatre éléments de la nature.
Forme et matière ; actuel et potentiel ; étendue, figure et mouvement, ce sont les concepts et couples de concepts auxquels Descartes a recours pour rendre compte des météores. Pas très charmant a priori, sans parler du fait que le philosophe lui-même n’avait pas fait grande publicité de ses textes (par peur d’être condamné par l’Eglise) et que ses confrères (Voltaire ou Bachelard ont bien ricané de ses édifices imaginaires).
Mais quand on lit : corps terrestres, exhalaisons, nues, feux qui s’allument en l’air, cercles ou couronnes qu’on voit autour des astres, ou encore, apparition de plusieurs soleils, soit quelques-uns des titres des différents discours qui composent ces _Météore_s, n’est-on pas frappé par la force et la précision de ces images ?
Je parlais la semaine dernière du talent d’écrivain d’un Platon capable de dramatiser les concepts clés de la philosophie en dialogues dignes de grands dramaturges, et c’est ce qu’on a ici aussi : un récit naturaliste à la fois limpide et merveilleux, rigoureux et capable d’exciter l’imagination.
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