Il y a une aspiration diffuse mais croissante à faire de la politique autrement, et son dénominateur commun est bien souvent la technologie numérique.
Et ça tombe bien car ce sont surtout les jeunes qui expriment ce désir de changement, eux qui sont aussi les plus familiers de cet univers. Dans les Inrockuptibles Agathe Auproux fait le point sur l’extension du domaine de la Civic Tech, soit l’usage des technologies numériques de communication au service de la démocratie. Un écosystème encore émergent en France mais qui pourrait bien donner corps à ce que Pierre Rosanvallon appelle « la démocratie d’exercice ». Pour remédier au défaut de représentation sociale des partis politiques, il suggère d’inventer de nouvelles formes de délibération publique et de contrôle de la transparence politique, afin de « garantir que les gouvernants sont au service de l’intérêt général ». C’est dans cet esprit mais aussi dans l’optique de propositions citoyennes que sont nées des plates-formes avec des objectifs variés. Au niveau local, d’abord, pour améliorer la vie de quartier – comme le réseau Fluicity, implanté dans plusieurs communes en partenariat avec les mairies – et faire remonter les idées sur la gestion des territoires. À l’échelle nationale, pour fournir à chacun des outils de comparaison des différents programmes dans la perspective des élections. Ou pour entrer carrément dans le jeu électoral et proposer des candidats issus de la société civile, comme laprimaire.org. Il y a enfin les Civic Tech de lobbying citoyen, comme make.org, dont le fondateur exprime dans l’hebdomadaire son ambition de « créer une intelligence collective ». Il fait le constat d’une « décomposition citoyenne » causée par « le corporatisme, le communautarisme, l’individualisme ». Face à cela la plate-forme entend relayer les propositions des internautes, confronter les plus fortes d’entre elles aux élus et décideurs, et obtenir en cas d’accueil favorable un engagement concret de leur part. Face au « décalage immense entre les aspirations de la société et la capacité du système à y répondre », selon les termes de notre secrétaire d’Etat au numérique, les Civic Tech proposent un arsenal d’outils pour faire de la médiation citoyenne, ainsi qu’un « début de réponse au malaise démocratique ». Mais gare au lyrisme des commencements, et aux illusions d’optique d’un présentisme à courte vue. Axelle Lemaire prétend dans son élan que le développement de cette démocratie virtuelle pourrait nous sortir de la « république monarchique » qui nous confine dans des pratiques institutionnelles et politiques verticales, et, par un effarant raccourci, que – je cite « le rôle du peuple n’a jamais été fondamentalement repensé depuis la Révolution française ». La ministre semble oublier les saint-simoniens, Proudhon, Marx, 1848, la Commune et j’en passe…
La revue futuribles a consacré sa dernière livraison au « Renouveau des utopies urbaines », et parmi elles, celle des « villes intelligentes », en anglais : smart city
Jean-François Soupizet fait un inventaire détaillé des réalisations, des enjeux et des zones d’ombre, notamment les risques pour la protection de la vie privée et les libertés publiques induits par l’interconnexion des bases de données. Côté positif, les villes intelligentes parviennent à réduire l’empreinte écologique, à soutenir le dynamisme économique et à améliorer la qualité de vie des citadins, en développant notamment la gouvernance en partenariat avec les entreprises et les associations. Elles mettent en réseau les informations maintenues jusqu’alors « en silos » par chacun des services : voirie, distribution de l’eau, du gaz et de l’électricité, ordures, éclairage et transports publics, etc. ce qui permet d’optimiser leurs prestations et de réaliser des économies. À preuve, certains projets spécifiques, comme à Rio de Janeiro pour la détection des inondations en cas de fortes pluies, ou à Santander, en Espagne, où 12 000 capteurs permettent de rassembler les données sur la circulation ou les places de parking disponibles de manière à fluidifier les déplacements. Mais pour Gilles Babinet, responsable de l’économie numérique auprès de la Commission européenne, le véritable enjeu est à terme politique : faciliter les échanges entre les citadins et la commune favorise « une plus grande implication de ceux-ci dans la conduite des affaires de la cité ». À ville intelligente, citoyens engagés…
La revue Hermès s’intéresse au monde secret du renseignement, « un monde fermé dans une société ouverte »
Il était fatal que la revue consacrée à l’information et la communication aborde un jour ce continent noir où afflue la plus grande masse de données jamais imaginable. De la surveillance planétaire au renseignement dans la sphère privée en passant par l’intelligence économique et le datamining dans les entreprises, cette livraison fait le tour de la question. Les technologies numériques y jouent un rôle essentiel, de même que désormais la traque des réseaux djihadistes dans les profondeurs du dark net.
Par Jacques Munier
L'équipe
- Production