

Ce 25 novembre, c’est la Journée internationale de lutte contre les violences faites aux femmes.
La forme extrême de ces violences, le féminicide est commis tous les deux jours et demi en moyenne en France ( chiffres 2019). Le site d’information Les Jours publie une enquête sur l’Unité d’accompagnement spécialisée du psychotraumatisme (Usap) à l’hôpital Robert-Ballanger d’Aulnay-sous-Bois (Seine-Saint-Denis). L’Usap a vocation à traiter tous types de traumatismes, mais dans les faits, le service accueille essentiellement des femmes victimes de violences conjugales. Désormais, tous les jeudis, des policiers et policières sont sur place pour recueillir les plaintes. Sophie Boutboul raconte comment la discrétion du dispositif permet à une femme de venir à l’hôpital consulter la police sans que son conjoint ne le sache. (Pour nombre d’entre elles, c’est moins angoissant que de passer au commissariat, où les plaintes sont souvent transformées en mains-courantes.) Et même ainsi, certaines ont du mal à passer le cap des doléances, par peur des représailles. Le reportage évoque ce cas d’une femme « arrivée en réanimation à l’hôpital à la suite de violences. Quand des psychologues de l’Usap ont pris un premier contact, elle ne réalisait pas encore qu’elle avait subi une tentative de féminicide ». Le dépôt d’une plainte permet de lancer l’enquête qui va notamment « utiliser le bornage téléphonique, interroger le voisinage, visionner les caméras de vidéosurveillance » pour repérer le conjoint violent interdit de s’approcher de la victime.
Enclencher cette procédure est primordial pour qu’il y ait des mesures de protection. (Coralie Besselièvre, gardienne de la paix, présente à la permanence de l’Usap)
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Le 3919 est devenu la ligne téléphonique de référence pour les femmes victimes de violence. Un collectif du monde culturel et associatif et de personnalités politiques - dont les Chiennes de garde, Mathilde Larrère, Camille Froidevaux-Metterie ou Clémentine Autain, signent une tribune sur le site de Libération pour dénoncer le projet du gouvernement de lancer un marché public mettant sa gestion en concurrence, « à la manière d’une quelconque offre de services ». Les signataires soulignent qu’il s’agit d’un service d’aide aux victimes « assumé depuis plusieurs décennies par une association dont la qualité des prises en charge a toujours été saluée ». Ils et elles redoutent l’impact sur cette activité de l’arrivée « d’un prestataire dont le degré d’engagement et d’expérience sur cette problématique particulière n’est nullement acquis ».
Migrantes engagées
On les a célébrées comme des héroïnes de la crise sanitaire » dans les hôpitaux, les Ehpad, à domicile : les aides-soignantes, médecins, agentes d’entretien, auxiliaires de vie... La revue Hommes & migrations, éditée par le Musée de l’histoire de l’immigration, est consacrée aux « femmes engagées ».
À l’instar des femmes travaillant à l’usine pendant les grandes guerres, elle peuplent les « espaces utiles », mettant en évidence le besoin et l’importance de migrations parfois très qualifiées.
Camille Schmoll rappelle que les femmes représentent 48% des migrations dans le monde, et 51% en Europe, plus nombreuses que les hommes, donc, même si on ne les voit guère. La géographe s’en prend aux images stéréotypées de la migration féminine, celles de la domestique ou de la prostituée.
Leurs trajectoires migratoires diversifiées recouvrent un mouvement d’autonomisation qui se traduit à la fois, sur le plan politique, par des revendications pour la reconnaissance de leurs droits et, sur le plan personnel, par le développement de leur capacité d’action.
Et de citer l’exemple de ces employées d’une société sous-traitante du groupe hôtelier Accor, « en grève pour protester contre le travail dissimulé et les cadences infernales ». La crise sanitaire a mis en lumière les conditions de travail précaires et discriminatoires des professionnels de santé à diplôme étranger - souligne la sociologue Francesca Sirna, qui a enquêté sur les personnels féminins en éclairant les liens entre parcours migratoires et professionnels au sein de l’hôpital, où la pénurie de main-d’œuvre aggrave ces conditions de travail. Des parcours à obstacles, à l’intersection des rapports de domination, de genre et de race, pour ces femmes en quête d’indépendance.
La dernière livraison de la revue Travail, genre et sociétés porte sur l’intersectionnalité... Dans les généalogies de cette notion, « le travail occupe une place centrale en tant que producteur des rapports sociaux de classe, de genre et de race », résument les coordinatrices du dossier, qui soulignent le potentiel d’émancipation collective de ce concept critique. L’un des articles analyse la manière dont il inspire la stratégie des avocates défenseures des travailleuses asiatiques immigrées aux États-Unis, dans une perspective de mobilisation communautaire appelée à se faire plus « inclusive ».
Par Jacques Munier
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