La passion de Dodin Bouffant de Tràn Anh Hùng et Vers un avenir radieux de Nanni Moretti mettent tous deux en scène des couples au travail, en cuisine comme au cinéma, et laissent le festivalier mi-figue, mi-raisin.
Petite baisse de régime, dans la compétition cannoise, avec ces deux films, un rien boiteux, mais qui ne manquent pas d’intérêt. Le premier marque l’arrivée en compétition, pour la première fois, de Tràn Anh Hùng, Caméra d’or il y a tout juste 30 ans à Cannes du meilleur premier film avec L’odeur de la papaye verte. On reste dans la sensation culinaire avec cette Passion de Dodin Bouffant, dont les scènes les plus passionnantes montrent Benoît Magimel et Juliette Binoche, dans les rôles d’un grand gastronome du XIXe siècle et de sa cuisinière, s’activer avec des ustensiles d’époque et des fourneaux à bois à mitonner de somptueuses et très riches recettes, sous la houlette en coulisses du chef étoilé Pierre Gagnaire. Ça tient de la performance, et c’est assez fascinant, mais la sauce se gâte vite quand les personnages se mettent, dans d’improbables dialogues, à disserter avec force didactisme sur l’origine du vol-au-vent ou les pouvoirs d’isolation thermique du blanc d’œuf battu en neige. Vous l’aurez compris, il y a à boire et à manger dans cette apologie du repas gastronomique français, patrimoine culturel immatériel de l’humanité depuis 2010.
Mal peigné
C’est le cas aussi du nouveau film de Nanni Moretti, Vers un avenir radieux, le couple au travail étant ici un cinéaste et sa productrice de femme. Le cinéaste est comme de juste incarné par Nanni Moretti, qui reprend le personnage de Giovanni, son double vitupérant contre le monde tel qu’il est devenu, qui avait fait les belles heures de son cinéma époque Journal intime ou Aprile, soit avant la canonisation internationale de sa Palme d’or de 2001, La chambre du fils. Moretti, c’est heureux, retrouve avec ce film un rien foutraque et mal peigné, une hargne salutaire, une capacité même à se moquer du personnage qu’il s’est construit au fil des années, dans cette comédie élégiaque, mélancolique et, peut-être, terminale. L’avenir nous le dira…
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