Alors que le rapport d'enquête du Ministère de la Santé sur les cas des bébés nés sans bras est sorti cette semaine, comment interpréter ces nouveaux combats citoyens autour des questions sanitaires et environnementales ? Nous reviendrons ensuite sur la réforme du bac, très contestée par les profs.
- Emmanuelle Amar Épidémiologiste, directrice générale de Remera, registre des malformations en Rhône-Alpes.
- Frédérique Rolet Secrétaire générale du Syndicat national des enseignants du second degré (SNES-FSU)
- André Cicolella Chimiste et toxicologue, président de l'association Réseau Environnement Santé (RES), spécialiste de l’évaluation des risques sanitaires
- Jean-Marc Huart Ancien inspecteur général de l’Education nationale, directeur général de l’enseignement scolaire
Entre 2007 et 2014, au moins quinze enfants sont nés sans bras dans trois villages de France, dans l'Ain, le Morbihan et en Loire-Atlantique. Rapprochés dans le temps et sur un périmètre géographique donné, ces "agénésies transverses", selon le vocable scientifique, avaient laissé perplexes les médecins locaux. Nombre d'entre eux se sont interrogés sur une éventuelle substance pesticide qui aurait perturbé la formation des membres supérieurs des bébés pendant la grossesse.
C'est à cette question que doit répondre le rapport d'enquête commandé par le Ministère de la Santé et réalisé par Santé Publique France et l' ANSES, l'Agence Nationale de Sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail. Rendu public cette semaine, après plusieurs semaines de retard, le document a été piloté par deux comités : un Comité d'Expert Scientifique (CES) et un Comité d'Orientation et de Suivi (COS).
Censé donner des hypothèses sur les causes externes de ces malformations, le rapport formule surtout la nécessité pour les scientifiques de mener à présent des recherches de terrain. Les familles doivent donc encore attendre avant d'avoir des réponses définitives. Entre temps, elles se sont rapprochées de plusieurs associations, dont le Remera, le Registre des malformations en Rhône-Alpes présidé par l'épidémiologiste Emmanuelle Amar. C'est cette structure qui avait révélé l'affaire à l'automne 2018, forçant les pouvoirs publics à réagir. Emmanuelle Amar est aussi à l'origine du scandale de la Dépakine. Depuis l'ouverture de l'enquête, en février 2019, d'autres malformations ont été recensées, dont trois autour de l'Etang de Berre, une des étendues d'eau les plus polluées d'Europe. L'épidémiologiste dénonce le manque d'actions concrètes proposées par le rapport :
Y a-t-il une volonté de connaître l’origine de ces malformations ? A partir du moment où l’on se base uniquement sur les données administratives, comme le propose le rapport d'enquête, je ne le crois pas.
Face à "l'inertie des institutions" que dénonce la lanceuse d'alerte, ce sont bien de nouveaux combats citoyens qui s'organisent. Avec pour exigence, plus de transparence sur les conséquences du dérèglement climatique. André Cicolella exige aussi une nouvelle manière de s'approprier les problématiques sanitaires :
On est à face à une épidémie mondiale de maladies chroniques : cette transition épidémiologique doit être analysée par un regard différent, prenant en compte une multiplicité de causes et d’effets.
A cette question de démocratie sanitaire, comment la science peut-elle répondre ?
Avec Emmanuelle Amar, épidémiologiste, lanceuse d’alerte, présidente du Remera, le registre des malformations en Rhône-Alpes, et André Cicolella, chimiste, président du Réseau Environnement Santé et membre du COS.
A-t-on franchi un point de non-retour ? La question se pose tant la relation entre le Ministre de l'Education Nationale, Jean-Michel Blanquer, et les enseignants s'est détériorée au fil des mois. Le point d'orgue a sans doute été celui du baccalauréat, où une intersyndicale s'est créée pour protester contre l'absence de concertation et la détermination sans faille du locataire de l'Hôtel de Rochechouart, et proche d'Emmanuel Macron. Lequel n'a pas hésité à qualifier de "prise d'otage", la retenue des copies mise en place par les professeurs en grève. Une crise de confiance qui s'est aussi cristallisée sur l'article 1, qui exige "l'exemplarité" des professeurs. Un élément qui a été vu comme une menace pour celles et ceux qui voudraient contester les décisions du Ministère. C'est ce qu'explique Frédérique Rolet, secrétaire générale du SNES-FSU, le syndicat majoritaire chez les enseignants.
On disposait déjà de tout l’arsenal juridique sur les devoirs des enseignants. L’article 1 sur « l’exemplarité des professeurs » est donc apparu comme une disposition politique.
Suppression des séries, moins d'épreuves écrites au profit d'un grand oral, contrôle continu plus important... Les changement sont profonds. Pourtant, Frédérique Rolet estime qu'ils vont à l'encontre de ce que font les pays européens.
Depuis 20 ans, les pays européens sont revenus au modèle du bac au détriment du contrôle continu. Cela assure de l’égalité de la valeur du diplôme. C’est un cadre commun et structurant pour les apprentissages. Les enseignants conçoivent les exigences et les contenus dans ce cadre.
Le bac version 2021 est censé apporter plus d'égalité entre les élèves - quand on sait que le système scolaire français est le plus défaillant sur ce point selon l'Organisation de coopération et de développement économiques. C'est notamment par la fin des séries que Jean-Marc Huart, directeur du DGESCO, souhaite lutter contre ces déséquilibres.
Les séries actuelles sont inégalitaires : la série scientifique est marquée socialement. Il fallait sortir de tout cela. Les élèves aujourd’hui profitent de la liberté qui leur a été donnée. Ils se sont parfaitement emparés de la réforme.
Au-delà de la manière dont a été conduite cette réforme, quelles peuvent être les conséquences de ces changements ?
Avec Jean-Marc Huart, directeur du DGESCO, et Frédérique Rolet, secrétaire générale du SNES-FSU.
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