- Luca Caproni
- Gioacchino Lanza Tomasi Fils adoptif de Lampedusa, éditeur de son oeuvre chez Mondadori
- Francesco Orlando
- Jean-Paul Manganaro traducteur
- Fabien Kunz

Giuseppe Tomasi di Lampedusa (1896-1957) © dr
Par Simone Douek et Céline Ters
« A la porte de son appartement du palais de la via Butera, dans un quartier solennel et abandonné près de la mer, Lampedusa vint m'ouvrir en personne. Je n'eus aucun doute sur son identité. Son aspect physique révélait au premier coup d'oeil une très forte personnalité : il était de ces hommes qui attirent immédiatement, sans le vouloir, l'attention sur eux, fût-ce dans une pièce où se trouvent vingt personnes. » Dans son* Souvenir de Lampedusa* , Francesco Orlando, professeur de littérature française à l'université de Pise, évoque l'homme qu'il a rencontré à Palerme en 1953. Il est l'une des quatre dernières personnes à avoir connu l'écrivain, qui est mort le 23 juillet 1957 sans avoir vu la publication du livre pour lequel il avait essuyé à deux reprises les refus des éditeurs et qu'il avait écrit entre 1954 et 1956 :* Le Guépard* . On peut parler de Lampedusa comme de l'homme d'un seul livre ; c'est sans doute au * Guépard * qu'ont abouti ses talents d'écrivain, qu'il n'a pu développer davantage puisque la mort l'a interrompu. Mais il faut se rappeler qu'il est aussi l'auteur d'une correspondance très abondante, et ce depuis sa jeunesse ; une partie de cette correspondance est éditée, et révèle un aristocrate curieux de quelques capitales européennes, Londres, Paris, Berlin, dont il décrit les paysages et la société avec une précision toujours doublée de cette ironie qui est la marque de son style. Le prince Lampedusa n'a jamais vraiment exercé de métier ; il s'était passionné pour la littérature et l'histoire depuis sa plus jeune enfance, et était devenu un lettré exceptionnel. Il lisait l'allemand, l'anglais, le français, se plaisant à transmettre aux jeunes gens qui l'entouraient les cours de littérature anglaise ou française qu'il rédigeait exprès pour eux, et notamment pour Francesco Orlando. A travers ses écrits, on sent la préoccupation de Lampedusa pour cette aristocratie déchue, pour cette lignée qui s'éteint. « Nous fûmes les Guépards, les Lions ; ceux qui nous remplaceront seront les petits chacals, les hyènes ; et tous ensemble, Guépards, chacals et moutons, nous continuerons à nous considérer comme le sel de la terre », dit le prince Fabrizio Salina, le Guépard. Mais si une oeuvre peut éventuellement éclairer une vie, comme le dit Francesco Orlando, on notera que le prince Salina, tout comme le prince Lampedusa, qui nous tracent de la Sicile un portrait pessimiste, peuvent aussi, ensemble, nous faire partager la violente sensualité qui se dégage de ses paysages brûlés par le soleil.
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