

Quel est le point commun entre le pain, la bière, le vin, mais aussi le fromage ? Les Saccharomyces, ces levures ou micro-organismes capables de faire fonctionner leur métabolisme en l'absence d'oxygène et qui donnent le goût aux aliments.
Mon collègue Guillaume se trouve embarqué sur un navire scientifique américain. Au bout d’une semaine, il commence à rêver de bon pain, de fromage, d’un verre de vin, ou encore de bière. Seulement voilà, le bateau est déclaré Dry ship, c’est-à-dire qu’il n’y a pas une goutte d’alcool à bord. Quant au fromage ou au pain, ce sont plutôt les variétés "fromage-plastique " et "pain-caoutchouc ", aussi insipide l’une que l’autre. C’est là que vous ressentez à quel point vous êtes français et vous pensez avec nostalgie à ces trésors de notre gastronomie.
Mais au-delà d’appartenir à notre tradition gastronomique, ces aliments partagent un point commun. Ils résultent de l’activité d’un micro-organisme qui porte le nom biscornu de Saccharomyces cerevisiae. Ce nom signifie "champignon (-myces) à sucres" (saccharo-) utilisé pour la cervoise (cerevisiae). En clair, la levure de bière, appelée aussi levure de boulangerie.
Pour faire sa connaissance, accompagnons le hollandais van Leeuwenhoek qui, en 1680, alors qu’il manipulait un nouveau gadget scientifique, qui sera plus tard appelé microscope, eut l’idée de regarder une goutte de bière. Il y aperçoit des petites boules agglomérées, parfois bourgeonnantes. C’est une levure, c’est-à-dire un champignon unicellulaire. Les cellules de ce champignon restent libres. Elles sont arrondies ou ovales, d’une taille comprise entre six et douze microns.
Des souches de levure adaptées à chaque produit
Notre levure-champignon est capable de faire fonctionner son métabolisme en l’absence d’oxygène. Elle mobilise alors pour sa survie une réaction biochimique que l’on appelle la fermentation alcoolique des sucres. Une réaction très intéressante pour les producteurs de pain et de boissons alcoolisées. Cette reine des levures nous accompagne depuis des millénaires.
Commençons par le pain. Mélangée et pétrie avec de l’eau et de la farine, laquelle contient de l’amidon et du gluten, la levure provoque une fermentation du glucose libéré par digestion de l’amidon. Cette réaction produit de l’alcool et du dioxyde de carbone qui s’évaporent au cours de la cuisson. Au passage, des bulles de gaz se forment. Elles restent emprisonnées grâce au gluten rendu élastique par le pétrissage. Le pain se charge en microbulles, et donc "lève ". C’est ainsi qu’il deviendra moelleux.
Saccharomyces œuvre également à la production de boissons fermentées qui touche toutes les civilisations. Pour la bière, notre levure transforme le sucre du moût de houblon en alcool et dioxyde de carbone, avec des goûts finaux dépendant de la souche utilisée. Quant au vin, la levure est naturellement présente à la surface des grappes. Lors de la vinification, elle se nourrit en transformant le sucre du raisin en alcool. Ce faisant, elle participe à exprimer les arômes du vin.
Les humains, malins, ont sélectionné des souches de levure, adaptées à chaque produit tout en affinant l’expression des arômes selon les goûts recherchés. Pain, bière ou vin, mais aussi fromage, les Saccharomyces sont de vrais petits ouvriers du goût !
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