Rat noir, rat brun

Si le rat a mauvaise presse depuis des siècles, c'est notamment parce qu'il est friand de nos récoltes.
Si le rat a mauvaise presse depuis des siècles, c'est notamment parce qu'il est friand de nos récoltes. ©Getty - John Downer
Si le rat a mauvaise presse depuis des siècles, c'est notamment parce qu'il est friand de nos récoltes. ©Getty - John Downer
Si le rat a mauvaise presse depuis des siècles, c'est notamment parce qu'il est friand de nos récoltes. ©Getty - John Downer
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Le rat est assez mal connoté en Europe. Pilleur de récoltes et porteur de maladie, il faut dire qu’il cumule… Mais au fait, de quel type de rat parle-t-on précisément ?

En 1284, un joueur de flûte libère la ville d’Hamelin, en Basse-Saxe, de tous les rats qui l’infestaient. Vous connaissez l’histoire reprise par les frères Grimm. 

À cette époque, le mot « rat » désignait tout un lot de rongeurs, si bien que l’on ne sait pas si le Rattenfänger de Hamelin alla noyer des rats, des souris ou même des campagnols, aujourd’hui classés dans une autre famille de rongeurs. Optons pour le plus vraisemblable, les rats. 

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La Fontaine, dans sa fable, distingue le rat des villes et le rat des champs qui, lui, pourrait bien être un campagnol. En ce qui concerne le rat des villes, deux candidats sérieux existent. Tous les deux sont des rats au sens biologique, des muridés, classés dans le genre Rattus

D’un côté, vous avez le rat noir, Rattus rattus, aussi dénommé rat des greniers. De l’autre le rat brun, Rattus norvegicus, dit aussi surmulot. Le rat noir est un peu plus petit que le rat brun. Sa silhouette est plus élancée, sa queue plus longue, ses oreilles et ses yeux plus grands. Son museau est pointu et non biseauté. Il préfère greniers et combles aux caves, entrepôts, ou égouts fréquentés par son cousin. 

Les deux espèces se rencontrent donc peu. Le premier est présent en Europe depuis le VIIIe siècle. On lui doit la propagation des pestes médiévales d’où sa très mauvaise réputation. Il a été supplanté par le second, arrivé huit siècles plus tard du sud-est de la Sibérie et de la Chine. Au XVIIIe siècle, le surmulot est partout, en particulier dans nos villes, où il deviendra rat d’égout et où il n’a pas meilleure réputation que son prédécesseur. 

Depuis que les rats nous fréquentent, ils nous ont accompagné sur nos routes commerciales. On le trouve actuellement dans le monde entier comme espèce introduite et invasive. Dans les îles, ils ont provoqué des bouleversements écologiques, voire des extinctions comme en Nouvelle Zélande ou à Maurice. Omnivore, vorace, prolifique, s’attaquant aux récoltes et aux réserves, porteur de maladies, le rat cumule les défauts qui le font détester. En Occident, les rats sont le plus souvent honnis, ce qui n’est pas le cas dans d’autres contrées, notamment en Asie. 

D'Anthracite à Ratatouille

Dans la langue française, le rat a rapport à la saleté, mais aussi à la richesse. Un logement insalubre sera qualifié de « nid à rats » ou « trou à rats », et l’avare se fait qualifier de « rat » sans doute parce qu’il fait des réserves. 

L’accablement se poursuit dans la bande dessinée. En Belgique, Macherot créé en 1954 la série Chlorophylle. Il met en scène le malfaisant Anthracite, un rat noir aux grandes oreilles dont l’une présente une encoche. Une encoche reprise avec humour dans le très sérieux ouvrage Classification phylogénétique du vivant. Au cinéma, les films de fiction ont souvent associé le rat à l’horreur. Entre 1959 et 2006, on ne compte pas moins de seize films d’horreur ayant des rats comme protagonistes. 

Tandis que les rats restent malsains dans le cinéma pour adultes, en revanche, dans les films d’animations, le rat tend à devenir un personnage aimable. Qui ne trouve pas « Ratatouille », ce rat cuisinier, sympathique ? Un début de réhabilitation ?