On plante facilement des ginkgos en ville. Et pour cause : ils sont incroyablement résistants. Les femelles, toutefois, présentent un inconvénient : leurs ovules sont malodorants.
Début novembre. Quelle est cette horrible odeur qui monte du sol ? Une pestilence bizarre entre vomi et animal en décomposition.
Si vous baissez la tête, vous verrez que cette odeur émane de sortes de petites boules orangées qui jonchent le bitume. Si vous levez le regard, surtout si le soleil est là, vous serez charmés par le jaune doré rutilant de feuilles bilobées.
Ces deux extrêmes, dégoût et splendeur, sont dus au même arbre. Un individu femelle de Ginkgo biloba qui a pondu. J’y reviendrai. La cascade d’or qui vous surplombe a valu à cet arbre remarquable le nom « d’arbre aux écus », sa teinte dorée rappelant la couleur de l’or.
Mais si cet arbre de vingt à trente mètres de haut nous fascine, c’est d’abord parce qu’il illustre un fabuleux défi au temps. Un ginkgo arrive à maturité sexuelle entre vingt et trente ans et sa durée de vie peut excéder mille ans. Celui d’un jardin botanique japonais est âgé de 1 250 ans.
Les ancêtres de sa famille, très proches du Ginkgo biloba, ont d’ailleurs côtoyé les dinosaures. Cet arbre vénérable serait donc invincible. D’ailleurs, il n'a pas de prédateurs naturels, ni de parasites ni maladies connues. Les seules menaces qui pèsent sur lui pourraient être les incendies, les tsunamis, les tremblements de terre ou l’Homme.
Et encore. Il fut la première espèce d'arbre à repousser dans la région d’Hiroshima un an après l’explosion de la bombe atomique. Un Ginkgo biloba situé à moins d'un kilomètre de l’épicentre de l’explosion a d’ailleurs survécu. Bien que calciné, une pousse est repartie de sa souche !
Les mâles dans la ville
Arbre de pays tempérés, le Ginkgo biloba est originaire des montagnes du sud-est de la Chine où il a été protégé par les moines bouddhistes du XIIe siècle. Exporté au Japon, sa feuille est devenue le symbole de la ville de Tokyo.
Le premier ginkgo planté en France est installé en 1778 à Montpellier. Une bouture de cet arbre arrive en 1795 au Jardin des Plantes du Muséum. Les deux arbres sont toujours vivants aujourd’hui. Cela atteste que cette espèce est très résistante aux pollutions. Elle est d’ailleurs devenue un ornement de nos villes enfumées.
Le ginkgo est aussi une curiosité botanique. L’espèce est dioïque. En clair, il existe des pieds mâles et des pieds femelles, qui d’ailleurs n’ont pas exactement la même morphologie générale. L’acquisition des réserves de l’ovule se fait avant la fécondation et la fécondation a lieu après que l’ovule se soit détaché de l’arbre… Bref, le contraire de ce à quoi nous sommes habitués avec les plantes à fleurs.
Au Japon, le ginkgo est surnommé « l'arbre pondeur », à cause de la similitude de ses fruits, les ovules des pieds femelles, avec des œufs. À ce sujet, un dernier conseil. Ne stationnez pas sous un ginkgo femelle à l’automne. Lorsque les ovules mûrs tombent, ils synthétisent de l’acide butanoïque, à l’origine de l’odeur de vomi… D’ailleurs, dans les villes on plante surtout des pieds mâles afin d’éviter ces odeurs nauséabondes. Des odeurs qui attiraient peut-être les dinosaures, mais ce parfum est passé de mode.
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