

Le pika, un cousin des lapins et des lièvres, à tort considéré comme un rongeur, ne craint pas les températures négatives. Et pour cause, durant la belle saison, il fait des réserves coupant les herbes et les fleurs pour les retrouver dans son terrier en hiver.
C’est la fin de l’été dans les alpages du Valais. Les temps sont durs en cette fin du 18e siècle. La saison a été humide le regain est maigre. Il faut pourtant emplir le fenil si l’on veut que le bétail soit nourri et que les humains disposent de lait et de fromage au cours de l’hiver qui s’annonce. Les chamois et bouquetins paissent un peu plus haut. Ils ne font pas de réserves et subiront les rigueurs hivernales à la recherche de quelques lichens et brins d’herbe. Ils vont souffrir.
Lynx, loups et autres carnivores comptent sur ces herbivores qui n’hibernent pas et qui seront des proies faciles, affaiblies par le jeûne. Les marmottes se gavent des dernières fleurs et herbes fraîches. Pour elles, la survie n’est pas d’engranger, mais de stocker cette nourriture sous la forme d’une couche de graisse qui fondra au fil de leur hibernation. Les ours sont à l’image des marmottes, ils grossissent avant d’aller dormir. Différentes options pour passer la mauvaise saison, particulièrement rude en cette période de "petit âge glaciaire" qui vit le vin geler dans les carafes à Versailles. La plus sûre consiste à faire des réserves : dans un local adapté pour les Hommes, dans ses propres flans pour les hibernants.
Le pika, un cousin des lapins et des lièvres
Mais propulsons-nous 10 000 kilomètres vers l’ouest dans les Montagnes Rocheuses. Nous y retrouvons loups, ours, chèvres des montagnes, marmottes avec des pratiques similaires à celles de leurs homologues alpins. Regardons de plus près. Quel est ce petit animal rondouillard aux pattes courtes, aux oreilles arrondies, à la frimousse sympathique et doté d’une toute petite queue. Long d’une quinzaine de centimètres, on dirait une marmotte miniature.
Il s’agit d’un pika, Ochotona princeps, qui n’a rien d’une marmotte puisque ce n’est pas un rongeur, mais un lagomorphe. Autrement dit un cousin des lapins et des lièvres qui, je précise, ne sont pas des rongeurs en dépit de ce qu’ont pu nous enseigner nos maîtres d’école. On trouve une autre espèce, Ochotona collaris, plus au Nord, jusqu’en Alaska. Une troisième fréquente les pentes de l’Himalaya jusqu’à des altitudes de 6000 mètres. C’est dire qu’ils ne craignent pas les rigueurs hivernales.
Au total ce sont plus de trente espèces qui se distribuent de l’Amérique du Nord à l’Eurasie. Mais revenons dans les Rocheuses et observons nos pikas à la fin de la belle saison. Ils coupent de l’herbe, des fleurs. Mais au lieu de s’en gaver comme une vulgaire marmotte, ils vont les empiler dans leur abri, simple cache sous un empilement de pierres ou terrier creusé dans un sol meuble.
Tout comme les paysans du Valais, ils font des réserves. Car à l’instar de leurs cousins lapins et lièvres, les pikas n’hibernent pas mais en prime, ils stockent. Maintenant, sont-ils partageurs ou égoïstes ? Les deux ! Oui, les deux. Ceux des terriers restent en groupe et sont partageurs. Ceux qui habitent les pierriers passent l’hiver seuls et ne partagent pas.
Je vous laisse deviner lesquels auraient pu inspirer sa fourmi à La Fontaine.
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