Des femmes qui jouent des hommes et inversement

Affiche de publicite pour la piece de theatre Hamlet (Amleto) de William Shakespeare joue au theatre Sarah Bernhardt a Paris. Sarah Bernhardt (1844-1923),
Affiche de publicite pour la piece de theatre Hamlet (Amleto) de William Shakespeare joue au theatre Sarah Bernhardt a Paris. Sarah Bernhardt (1844-1923), ©AFP - LEEMAGE
Affiche de publicite pour la piece de theatre Hamlet (Amleto) de William Shakespeare joue au theatre Sarah Bernhardt a Paris. Sarah Bernhardt (1844-1923), ©AFP - LEEMAGE
Affiche de publicite pour la piece de theatre Hamlet (Amleto) de William Shakespeare joue au theatre Sarah Bernhardt a Paris. Sarah Bernhardt (1844-1923), ©AFP - LEEMAGE
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Le répertoire théâtral contient incontestablement beaucoup plus de rôles masculins. La parité a-t-elle un sens sur une scène de théâtre.

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Le 11 mars dernier, quelques jours après la Journée pour le droit des femmes, Eric Ruf, administrateur de la Comédie Française donnait au Monde un entretien intitulé “le mouvement pour l’égalité des sexes dans le théâtre est irréversible”. Il vantait ainsi son action de ce point de vue au Français, rappelant que pour la saison 2016-2017, il aura accueilli plus de femmes que d’hommes à la mise en scène. En revanche le nombre de femmes comédiennes reste bien inférieur au nombre d’hommes, puisqu’elles représentent environ un tiers des effectifs de la troupe. Et Eric Ruf d’ajouter “c’est déjà très généreux, si je puis dire, au regard du répertoire qui comprend une grande majorité de rôles masculins. Arriver à la parité serait absurde. Ce serait joli sur le papier, mais s’il n’y a pas de rôles à donner aux femmes, elles me demanderaient très vite pourquoi elles ont été engagées, à quoi elles servent, etc.”. Et d’ajouter un peu plus loin: “au Conservatoire, les filles sont plus nombreuses, et l’on se retrouve à être un peu moins exigeant avec les garçons parce qu’il faut des promotions paritaires. Ensuite, dans la vie professionnelle, il y a plus de rôles pour les garçons dans le répertoire, ce qui dessert les filles.” Que faire donc de cette différence historique irréductible? Dans un long article paru au printemps dernier notre collègue Philippe Chevilley revenait sur cette injustice propre au répertoire théâtral, citant notamment la conservatrice-archiviste de la même Comédie Française Agathe Sanjuan, selon laquelle : “il y a beaucoup plus de rôles d’hommes dans le théâtre..; et ils ont beaucoup plus de texte à dire”. Et de préciser que par ailleurs les rôles masculins sont souvent bien plus valorisants et autrement complexes. Une des conséquences en est que tout rôle d’héroïne est lourd d’ enjeux pesants pour la comédienne qui l’incarne, autrement dit, elle est d’autant plus attendue au tournant. Philippe Chevilley rappelle qu’au XIXe siècle la réputation d’une comédienne se forgeait pendant les dix premières représentations qu’elle assurait dans le rôle d’une héroïne du théâtre classique, Emilie dans Cinna, Pauline dans Polyeucte, Phèdre, Bérénice etc. C’est en quelque sorte toujours le cas, chaque prise de rôle féminin dans un grand classique attire tous les regards et les commentaires. Y a-t-il des solutions pour tordre le sort? Jouer plus de pièces modernes et contemporaines, encore que le théâtre reste souvent écrit par des hommes, que l’on pense à Beckett ou Koltès, les personnages sont largement masculins. Ou alors aller à l’encontre absolue du système des emplois et faire endosser des rôles masculins par des femmes. Pour le coup ça a existé historiquement, Sarah Bernhardt a joué Lorenzaccio, Hamlet, l’Aiglon, mais c’était alors une exception, quand l’inverse n’est pas vrai. Traditionnellement les hommes sur scène ont beaucoup joué les femmes, pour des raisons religieuses, morales ou politiques. Pour revenir à l’interview d’Eric Ruf, il suggère en effet la possibilité de faire jouer des rôles masculins par des femmes, rappelle que dernièrement Suliane Brahim jouait Gennaro dans Lucrèce Borgia mis en scène par Denis Podalydès. Rappelons quant à nous que dans cette production particulière, le rôle de Lucrèce, certainement un des rôles de femmes les plus passionnants du répertoire, était interprété par un homme, en l’occurrence Guillaume Gallienne…

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