Des Mouettes partout

Extrait de La Mouette dans la Cour du Palais des Papes à Avignon en juillet 2012 dans une mise en scène d'Arthur Nauzyciel
Extrait de La Mouette dans la Cour du Palais des Papes à Avignon en juillet 2012 dans une mise en scène d'Arthur Nauzyciel  ©AFP - BORIS HORVAT / AFP
Extrait de La Mouette dans la Cour du Palais des Papes à Avignon en juillet 2012 dans une mise en scène d'Arthur Nauzyciel ©AFP - BORIS HORVAT / AFP
Extrait de La Mouette dans la Cour du Palais des Papes à Avignon en juillet 2012 dans une mise en scène d'Arthur Nauzyciel ©AFP - BORIS HORVAT / AFP
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La pièce de Tchekhov est une des pièces les plus jouées en France: comment expliquer qu'elle soit devenue à ce point devenu un passage obligé ?

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Tous les ans je constate à quel point Tchekhov est partout dans les programmes des théâtres français, Oncle Vania, Les trois sœurs, mais surtout La Mouette. Alors que les représentations d’une Mouette mise en scène par Thibaud Perrenoud et le collectif Kobal’t s’achèvent dans quelques jours au Théâtre de la Bastille, en région parisienne trois vont prendre le relais dans les quelques semaines qui viennent, une au Théâtre Gérard Philippe dans une mise en scène d’Isabelle Lafon, une au théâtre Le Ranelagh, une au Théâtre 71 mise en scène par Oskaras Korsunovas. La Mouette est partout, et ce n’est pas nouveau.

Il faut rappeler le propos et l’histoire de cette pièce écrite à l’automne 1895, et que Tchekhov résumait ainsi dans une lettre à son ami Souvorine: “Une comédie, trois rôles de femmes, six d'hommes, quatre actes, un paysage (une vue sur un lac) ; beaucoup de conversations sur la littérature, peu d'action, une tonne d'amour”. C’est l’histoire de Konstantin, jeune dramaturge dont la mère Arkadina est une grande actrice reconnue. Il a écrit une pièce nouvelle pour une jeune comédienne extrêmement prometteuse, Nina. La mère et son nouvel amant Trigorine un écrivain à la mode, viennent passer l’été dans une maison au bord d’un lac, Konstantin fait donner sa pièce, sa mère se moque; vexé, il interrompt le spectacle et tente de se suicider, tandis que Nina se laisse séduire par Trigorine. La première de la pièce, donnée le 17 octobre 1896 à Saint Pétersbourg fut un échec absolu, l’actrice qui interprétait Nina, pétrifiée, perdit la voix; Tchekhov lui-même accordait assez peu de crédit à cette pièce qu’il jugeait peu efficace et bizarre. Pourtant dès 1898 une nouvelle mise en scène signée entre autres par Stanislavski fit un triomphe. En France il fallut attendre 1922 et Georges Pitoeff pour voir La Mouette à la Comédie des Champs Elysées. Depuis des centaines de Mouette furent jouées, dont certaines restées dans l’histoire de la mise en scène française, notamment celle d’Antoine Vitez qui en donna aussi une traduction toujours jouée aujourd’hui, plus récemment celle d’Arthur Nauzyciel qui fit l’ouverture du Festival d’Avignon en 2012 dans la Cour d’honneur du Palais des Papes. Alors La Mouette serait-elle promesse de succès? Pas nécessairement, quand on considère par exemple que celle de Thomas Ostermeier, qui a beaucoup tourné et qu’on a pu voir encore l’année dernière avait reçu un accueil critique assez mitigé, même très mitigé pour un metteur en scène habitué à une certaine unanimité. Ce qui est assez frappant c’est que La Mouette séduit tous types de metteurs en scène et de publics: jeunes, vieux, en collectif, tout seul, dans le privé, dans le public, dans le IN, dans le OFF, on la joue dans la traduction de Vitez, dans celle de Marcowitz et Morvan, on en commande de nouvelles adaptations, comme celle de Clément Camar-Mercier à Bastille ou celle d’Olivier Cadiot pour la version Ostermeier. Alors est-ce son propos méta-théâtral qui en fait un objet particulièrement séduisant et/ou facile? Comment comprendre qu’en France on ait un rapport aussi affectif à Tchekhov? Bref comment expliquez-vous ce succès de la Mouette?

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