Pourquoi a-t-il fallu inventer le Revenu Minimum d’Insertion ?

Le RMI comme réponse de la société à un chômage de masse qu’elle ne parvient pas à juguler.
Le RMI comme réponse de la société à un chômage de masse qu’elle ne parvient pas à juguler. ©Getty - sesame
Le RMI comme réponse de la société à un chômage de masse qu’elle ne parvient pas à juguler. ©Getty - sesame
Le RMI comme réponse de la société à un chômage de masse qu’elle ne parvient pas à juguler. ©Getty - sesame
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Malgré l’existence d’un système de protection sociale très étendu, il existe encore des "trous". Comment traiter cette "nouvelle pauvreté" ?

Plusieurs rapports tentent à l’époque de recenser le nombre de pauvres : celui de Joseph Wresinski, présenté au Conseil économique et social en 1987, l’estime à 2,5 millions. Ce rapport qui propose de considérer la lutte contre la pauvreté comme une priorité nationale et d’instaurer un revenu minimum recueille une forte audience. Dans sa Lettre à tous les Français, François Mitterrand qui brigue un second mandat annonce que s’il est réélu il demandera au gouvernement qu’un revenu minimum soit attribué… "Peu importe le nom qui lui sera donné, revenu minimum d’insertion, revenu minimum garanti," écrit-il, "l’important est qu’un moyen de vivre ou plutôt de survivre soit garanti à ceux qui n’ont rien, qui ne peuvent rien, qui ne sont rien".

Cette décision met donc un terme aux hésitations de la gauche, bien explicitées dans le livre de Jean-Michel Belorgey, La gauche et les pauvres, publié en 1988. Une partie de la gauche craignait en effet que l’instauration d’un revenu minimum ne rende plus aisé un désengagement des institutions sociales intervenant auprès des plus fragiles, ne facilite la suppression des autres aides destinées aux plus démunis et ne légitime une précarisation du travail salarié en permettant le maintien d’une réserve de main d’œuvre aux marges du système productif. D’autres courants politiques craignaient en revanche qu’une telle prestation n’encourage la paresse.

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L'instauration d'une loi originale

La loi instaurant le Revenu Minimum d’Insertion, votée à l’unanimité le 30 novembre 1988 sous le gouvernement de Michel Rocard, propose un dispositif très original censé déjouer ces différents pièges. Il est composé d’une prestation inconditionnelle, d’un montant qui varie avec la composition du foyer (l’allocation est familialisée) et d’une démarche d’insertion. Celle-ci est essentielle. Le débat à l’Assemblée a fait évoluer les projets de la notion de contrepartie à celle d’insertion. Il ne s’agit donc pas d’exiger de l’allocataire une contrepartie au versement de la prestation mais au contraire de demander à la société de tout faire pour réinsérer l’allocataire. Celui-ci signe un contrat qui précise les actions de réinsertion qu’il va engager ; "l’insertion sociale et professionnelle des personnes en difficulté constitue un impératif national" à la charge de la société.

L’article premier de la loi reprend les termes du Préambule de la Constitution de 1946 : "toute personne qui, en raison de son âge, de son état physique ou mental, de la situation de l’économie et de l’emploi, se trouve dans l’incapacité de travailler a le droit d’obtenir de la collectivité des moyens convenables d’existence". L’insertion est prise dans une acception large : elle comprend notamment des actions d’autonomie sociale comme la prise de traitements médicaux, des cures de désintoxication, ou de l’accompagnement social pour les personnes particulièrement abîmées par la vie. La montée en charge du dispositif va être très rapide (...)

Bibliographie

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