

Présent dans les pages du Canard enchaîné depuis 45 ans, Cardon fait partie de ces dessinateurs dont on reconnaît au premier coup d'œil le trait de plume. Auteur protéiforme, il publie "Cathédrale", un livre testamentaire qui contient toute sa vie. Rencontre avec un artiste monumental.
- Jacques-Armand Cardon Auteur de bande dessinée, dessinateur de presse
Cardon, de son vrai nom Jacques-Armand Cardon, est né au Havre en 1936, l'année du Front Populaire. Son enfance est marquée par la Guerre, l'exode, l'absence du père mort en Allemagne, et la culture ouvrière, dont il ne se détachera jamais vraiment. Le Rayon BD ne suffirait pas à raconter toute sa vie, et son parcours, allant de la condition prolétaire en Bretagne comme manœuvre à la base sous-marine, jusqu'au dessin de presse dans le Canard Enchaîné.
Mais nous allons tenter d'évoquer quelques souvenirs, certaines de ses obsessions et parfois même des cauchemars lors de cette rencontre, à l'occasion de la publication de son dernier livre Cathédrale, paru chez Super Loto éditions, une sorte de long poème graphique, biographique, allégorique et halluciné, qui compose un récit dans lequel il a mis beaucoup de lui-même, plus de 60 ans de souvenirs enfouis, qui ressurgissent aujourd'hui en noir et blanc dans un livre testamentaire et monumental.
La Cathédrale telle que je l'ai vue la première fois à Paris, dans les années 1940 et surtout à la Libération où j'avais pris quelques distances avec la condition humaine, m'avait fort impressionné, il fallait que j'en tire quelque chose. La guerre nous avait tellement éparpillés, qu'il fallait regrouper quelque chose dans un récipient. Et la Cathédrale de Notre-Dame de Paris s'est imposée à moi directement. C'est dans ce monument-là où j'ai pensé que la cuisine, ce que j’avais l'intention de dire, ce que la vie me forçait encore à dire pour m'en débarrasser, allait trouver son espace dans ce que représentait cet énorme bâtiment.
Cardon

Cathédrale est le livre de toute une vie, un livre tiroir, qui ouvre des portes et donne des clés sur son enfance, ses expériences décisives, ses rencontres avec Jean-Jacques Pauvert, Cabu, Wolinski ou encore Fred, son travail dans la Revue Bizarre, dans L'enragé ou L'humanité dimanche. Cette rencontre est l'occasion d'évoquer sa longue carrière, son rapport au dessin, au silence et au sacré.
Ce livre s'écrit depuis 60 ans, on est comme un scaphandrier qui descend soi-même pour faire remonter à la surface des épaves ou des visions profondes. Il y a du ressenti physique, des malaises, de l'intranquilité permanente, sans le père qui est là pour vous rassurer, il faut avoir une résilience, essayer de compenser l’absence par un surcroît d'imaginaire. Il a fallu que je me débarrasse noir sur blanc, c'était lourd à porter.
Cardon

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