À Hong Kong, la double peine des jeunes de 20 ans

Le 31 décembre 2019, des milliers de jeunes manifestants formaient une chaîne humaine à Hong Kong, comme un dernier rempart contre le repli autoritaire du gouvernement de l'île.
Le 31 décembre 2019, des milliers de jeunes manifestants formaient une chaîne humaine à Hong Kong, comme un dernier rempart contre le repli autoritaire du gouvernement de l'île. ©AFP - ISAAC LAWRENCE
Le 31 décembre 2019, des milliers de jeunes manifestants formaient une chaîne humaine à Hong Kong, comme un dernier rempart contre le repli autoritaire du gouvernement de l'île. ©AFP - ISAAC LAWRENCE
Le 31 décembre 2019, des milliers de jeunes manifestants formaient une chaîne humaine à Hong Kong, comme un dernier rempart contre le repli autoritaire du gouvernement de l'île. ©AFP - ISAAC LAWRENCE
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Ils n'ont jamais connu leur île sous le drapeau britannique, mais ils ont grandi dans une rare bulle de liberté en territoire chinois. Depuis 2019, c'est la douche froide pour les jeunes Hongkongais : l'étau de Pékin se resserre sur l'archipel, tandis que le Covid les prive de libertés.

Dimanche après-midi, dans l’un des halls de la célèbre université de Hong Kong, dont les bâtiments s’imbriquent et se superposent à flanc de colline, une trentaine d’étudiants se déhanchent énergiquement face à des grands miroirs.

Parmi eux, Mel, petite boule de nerfs avec des longues mèches bleues qui tombent sur son haut de jogging noir. L’étudiante en deuxième année de littérature comparée fait le point sur l’état d’esprit ou l’humeur de sa génération.

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Des jeunes très touchés par le grand mouvement de révolte de l’été 2019, qui a été interrompu par l’épidémie du Covid et la mise en place d’une nouvelle loi sur la sécurité nationale, imposée par Pékin le 30 juin 2020.

"Cela a vraiment été des années dures avec tout ce qui s’est passé en 2019 et ensuite le Covid, l’atmosphère politique ici…"

Mon impression, c’est qu’on essaye juste de survivre et de s’en sortir. On cherche des petits moments de bonheur dans des choses tout à fait quelconques comme danser ou des petites sorties, comme aller pique-niquer avec des amis.

Les 20 ans d’aujourd’hui sont nés peu après la rétrocession de Hong Kong à la Chine. Le destin chinois de l'ex-colonie britannique était donc déjà fixé mais le contrat passé entre Londres et Pékin semblait clair et rassurant. 

Rien ne devait changer pendant cinquante ans sous l’égide du principe "un Pays, deux systèmes", selon la formule énoncée en 1997 par l'ancien numéro 1 chinois Deng Xiaoping. Mais depuis l’arrivée au pouvoir du président Xi Jinping, Pékin n’a cessé de réinterpréter ces engagements. 

Libertés resserrées

Aujourd’hui, les rassemblements politiques semblent déjà appartenir à un autre temps, un monde d’avant la loi de sécurité nationale de 2020, quand la jeunesse hongkongaise prenait tous ses droits pour acquis.

Pour la vice-présidente du syndicat des étudiants de l’université de Lignan, Yanny Chan, la lutte pour les valeurs de Hong Kong doit continuer : 

"On a plus aucune visibilité sur notre avenir. Notre futur a été confisqué par le gouvernement de Hong Kong et même par le gouvernement chinois. Nous ne savons pas quand nous perdrons toutes nos libertés. Comme aujourd’hui : vous avez vu tous les jeunes qu’ils ont arrêtés et qui ne vont pas ressortir ? On perd nos amis…"

Hong Kong est en train de mourir mais on ne peut pas perdre espoir. Voilà ce que c’est d’avoir 20 ans ici : on n’est pas simplement des étudiants, on porte notre ville, l’avenir de notre ville, sur nos épaules. 

Et à 20 ans, porter l’avenir de sa ville sur ses épaules est une lourde charge, surtout quand la situation économique n’est pas favorable. Beaucoup se posent la question de l’exil. Mais pour le professeur Jean-Pierre Cabestan, qui enseigne les sciences politiques à Hong Kong depuis plus de dix ans, peu en ont les capacités. 

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Ils ne veulent pas aller en Chine continentale. Ils ne sont pas tellement adaptés pour aller à l’étranger. Et ça, ils le savent et sont un peu anxieux.

Débouchés limités

"Ils voient bien qu'à Hong Kong, dans la finance, la Bourse, la banque, l’assurance, il y a beaucoup de jeunes Chinois qui arrivent du continent, bardés de diplômes, qui ont étudié à l’étranger, qui sont mieux positionnés pour prendre les postes les plus intéressants." 

La concurrence des jeunes Chinois sur le marché du travail de Hong Kong est une réalité dont June est bien consciente :

Depuis peu, il y a des nouveaux immigrants à Hong Kong. C’est devenu plus compétitif. En tant que jeunesse hongkongaise, Il faut que l’on fasse de meilleures études, que l’on travaille davantage pour pouvoir progresser au sein de la société.

Concurrence sur le marché du travail, moins de libertés et aucune visibilité... Mel préfère danser et ne pas faire trop de projets : "Je n’ai pas franchement un but à atteindre. J’aimerais juste réussir à être heureuse, enfin, si on veut..."

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