

Octobre Rose permet de sensibiliser la population au cancer du sein. Ils frappent 1 femme sur 8. A l'hôpital Foch, un service "d'oncologie et de soins de support" a vu le jour. Les femmes se voient proposer du yoga, des conseils alimentaires, de la lingerie adaptée. Autant d'outils pour mieux guérir
En ce jour d'octobre, le hall de l'hôpital Foch de Suresnes (Hauts-de-Seine) est dûment décoré de rubans roses et plusieurs stands accueillent les malades et leurs proches. L'objectif est de sensibiliser la population au dépistage du cancer du sein, qui touche une femme sur huit au cours de sa vie.
Les stands sont très variés et vont de la lingerie féminine à la nutrition, en passant par des associations spécialisées dans l'aide au retour au travail, l'acupuncture ou le tatouage.
Ne pas tenter de maigrir quand on se soigne pour un cancer
Juliette est diététicienne à l’hôpital, elle a fait une formation de deux ans après le bac et conseille, à présent, les patients en oncologie. Pour participer à Octobre rose, Juliette s'est installée dans le hall, devant une table garnie de boissons enrichies en protéines et de gâteaux et crèmes à base de compléments alimentaires. Elle nous présente son travail et l’une de ses patientes, Paula, qui a recommencé à se nourrir depuis quelques semaines. Comme l'explique la jeune diététicienne, il ne faut pas tenter de maigrir quand on se soigne pour guérir d'un cancer :
« On peut voir sur internet que jeûner, supprimer le sucre, le gluten, le lactose cela peut être bénéfique, or ce n’est pas du tout le cas."
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Quand on perd du poids parce qu’on ne s’alimente pas suffisamment, malheureusement, c’est le muscle qui part en priorité. La dénutrition est plus grave que tout. C’est plus grave que le cancer même. On peut avoir des patients qui répondent bien à la chimio, à la radiothérapie, mais s’ils ne s’alimentent pas en conséquence, cela ne va pas aller.
Des soins lancés en France dans les années 2000 mais pas encore généralisés
Un peu plus loin, le docteur Sakina Sekkate anime une conférence débat pour présenter aux femmes et aux hommes (ils représentent moins de 2% des cancers du sein) les différentes options thérapeutiques disponibles en cas de cancer du sein. Le docteur Florian Scotté rejoint bientôt sa collaboratrice et se félicite du bon déroulement de la journée qu'elle a organisée. Le dr Scotté est chef du service d’oncologie médicale et soins de support, à l’hôpital Foch.
Arrivé en 2017, il a tenu à réunir deux services distincts afin de coordonner une prise en charge globale des malades : le service de cancérologie et l'équipe de soins palliatifs. Comme le précise ce jeune médecin, il existe une définition officielle des soins de support : "ensemble des soins et soutiens nécessaires aux personnes malades conjointement au traitement spécifique - lorsqu’il y en a - et tout au long de la maladie." Cette première définition des soins de support serait née en 1990 en Belgique. En France, la communauté médicale a vraiment mis en place ce type de soins à partir des années 2000. En 2005, dans le cadre du Plan Cancer, la prise en charge globale a été recommandée, mais elle n’existe pas encore dans tous les services de cancérologie. En attendant, le dr Sakina Sekkate initie les visiteurs à l'auto-palpation :
"Le but c'est de sensibiliser les gens et d'expliquer les principes de traitement qui font parfois peur aux gens."
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L’idéal est de palper avec le bout des doigts, comme on joue du piano. Il ne faut pas oublier de palper les aires ganglionnaires. Là, on sent très bien une adénopathie, un petit ganglion, au niveau de l’aisselle. Même l’aspect extérieur du sein est important, par exemple quand le mamelon est rétracté. Cela peut être le signe d'une tumeur derrière le sein. (…) Si vous voyez un aspect « peau d’orange » sur le sein, c’est aussi un signe possible de cancer. Quand on remarque cet aspect, même sans avoir senti une tumeur, ce serait bien de faire une échographie mammaire.
Appréhender au mieux son retour au travail
En cette journée d'Octobre Rose, il n'y a pas que des marques de vêtements ou des entreprises qui s'affichent dans le hall de l'hôpital. A quelques pas du laboratoire la Roche-Posay qui fait la promotion de ses cures thermales, pour retrouver une belle peau après un cancer (cures remboursées par la sécurité sociale sur prescription médicale), il y a aussi des associations qui aident gratuitement les malades. Comme Le Vent Bleu, une initiative lancée en 2014 par Géraldine Magnier.
L'objectif est d'aider les personnes en rémission à retrouver le chemin du travail. Après un cancer, la fatigue dure parfois plusieurs années et il est nécessaire d'oser discuter avec sa hiérarchie d'un aménagement de poste. L'association accompagne donc gratuitement les anciens malades, comme l'explique Pascale, l'une des huit coach professionnelles du Vent Bleu :
« Pour que les patients ne soient pas vicitmes d'une double peine, on propose des coaching gratuits. Nous avons d’autres sources de financement ."
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Une fois que le traitement est fini, que la bataille est gagnée, il y a une rémission. Mais les personnes se retrouvent isolées avec le projet de retourner au travail. Et souvent des peurs, parce qu’il y a des rémanences de fatigue, des problèmes cognitifs qui peuvent durer 2 à 5 ans après la fin d'un cancer. Il faut donc réfléchir et pouvoir partager avec son entreprise des adaptations de postes. Envisager des droits qu’on possède mais qu’on en connaît pas.
Tenter d'éviter un passage aux urgences
A l’hôpital Foch, le service du Dr Scotte comprend 18 lits d’hospitalisation conventionnelle et 18 lits d’hôpital de jour. Dans cette structure de jour – qui a ouvert en septembre 2018 – l’équipe médicale se charge de trois aspects bien précis : l’annonce de la maladie et l'évaluation des besoins (nutritionnels, douleur spécifique, soutien psychologique etc.) de chaque patient.
Elle veille aussi à continuer à orienter les malades – après leur première prise en charge – afin de les soigner au plus près de l'évolution de leur maladie et de tenter d’éviter leur passage aux urgences. Ainsi, de façon régulière, le patient est invité à renseigner sur internet un certain nombre de données médicales personnelles. Celles-ci sont analysées par les médecins qui orientent le malade : soit vers un généraliste, soit vers l’hôpital de jour, soit en hospitalisation complète. Cette forme de prise en charge – basée donc sur un recensement en temps réel des symptômes des patients - permet d’améliorer leur survie, comme le montre l'étude du professeur américain Ethan Basch, présentée à l'ASCO (American Society of Clinical Oncology) en juin 2017. De son côté, le professeur Florian Scotte a montré que les soins de support initiés précocement avaient un impact sur les proches des malades et donc sur les malades eux-mêmes.
L'hôpital Foch devrait par ailleurs inaugurer une "Maison Foch" qui concentrera justement tous les soins de support, du yoga à l'acupuncture sans oublier, bien entendu, la prise en charge médicale. L'objectif étant que tous ces soins puissent être gratuits, ou plus précisément, remboursés par la sécurité sociale. Le projet devrait voir le jour d'ici environ deux ans.

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