En France, 40% des personnes vivant avec le VIH ont plus de 50 ans. Or, après de nombreuses années de traitement, certains malades nécessitent une prise en charge spécifique, bien que non médicale. À Paris, la Maison Daélia leur ouvre ses portes.
Située dans le 16e arrondissement de Paris, la Maison Daélia a été pensée en 2016 pour accueillir des personnes âgées en perte d'autonomie. Il s'agit d'un lieu qui n'est pas médicalisé, mais qui travaille en collaboration avec les médecins et les familles des bénéficiaires. Sur place, tout est fait pour que les personnes âgées soient stimulées, dans un environnement serein et bienveillant.
Célia Abita, la directrice de l'établissement, a conçu la Maison Daélia comme une alternative aux maisons de retraite. Elle, qui en a dirigé une brièvement, a préféré créer sa propre structure pour pouvoir y accueillir des personnes fragiles qui "n'intéressent personne", comme elle dit, "en particulier les personnes âgées porteuses de trisomie 21 et les personnes âgées qui vieillissent avec le VIH". Il s'agit aussi de soulager les familles, aidantes, qui parfois sont très sollicités par leurs proches dépendants.
La Maison Daélia a été imaginée comme un appartement, raconte Célia Abita, sa fondatrice et directrice :
"La grande pièce commune est réorganisée en fonction des activités de la journée"
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Dans cette maison non médicalisée viennent donc des personnes qui présentent des pathologies toutes différentes. Mais Célia Abita raconte qu'elle a elle même grandi dans les années 80 et a été marquée par l'épidémie de Sida. Il lui a donc semblé important de s'intéresser aux personnes âgées de 60 ans et 1 jour et qui sont séropositives :
"Moi, je ne suis pas médecin, mais j'ai eu la chance de rencontrer le professeur Christine Katlama"
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La prise en charge des personnes vivant avec le VIH dans la Maison Daélia se fait en collaboration avec le service des maladies infectieuses de la Pitié-Salpêtrière. Il se trouve que Célia Abita a rencontré il y a quelques années l'une des grandes spécialistes françaises du VIH, Christine Katlama, qui s'est montrée très intéressée par le projet. La professeure de médecine et co-découvreuse du VIH 2 insiste sur l'âge médian des personnes séropositives en France. Cet âge ne cesse de reculer et il existe de plus en plus de personnes âgées qui vieillissent avec ce virus redoutable dans leur organisme. En plus, un très grand nombre de ces personnes "ont vécu une homosexualité sans mariage gay et se sont retrouvées isolées de leur famille", rappelle Christine Katlama :
Christine Katlama revient sur les actions du virus du VIH quand il reste des dizaines d'années dans l'organisme des malades".
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Chaque demi-journée, une ou deux activités sont proposées aux bénéficiaires. Il peut s'agir de séances sur la signification des couleurs, de créations de parfums, de gymnastique assises, de découvertes musicales, de visites de musées, ou encore d'ateliers mémoires. Ces derniers sont très importants car nombre de bénéficiaires ont tendance à souffrir de troubles cognitifs. Dans l'atelier mené par Johana Squinazi, la psychologue clinicienne, tout est fait dans un esprit positif, pour aider les personnes âgées à réussir les exercices qui leurs sont proposés. Et nul ne sait exactement qui souffre de quels troubles, rappelle Johana :
Johana refuse de dire qui, dans le groupe, est séropositif. Il s'agit de ne pas leur coller une étiquette explique-t-elle.
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L'un des objectifs de la Maison Daélia est de soulager les familles qui aident au quotidien les personnes âgées en perte d'autonomie. Célia Abita tient donc à ce que les tarifs proposés par son établissement ne soient pas trop élevés. Ils sont même inférieurs, insiste-t-elle, "à ce que coûte une aide à domicile". Pour 60 euros la demi-journée, les bénéficiaires peuvent assister aux ateliers et déjeuner souvent sur place. Mais Célia Abita aimerait à présent que sa Maison Daélia bénéficie d'une défiscalisation, comme cela est possible - justement- pour les prises en charges à domicile. En effet, sa structure d'accueil se veut une sorte de prolongement d'un foyer familial et par ailleurs, la jeune femme a fait une demande pour que ses équipes puissent aussi intervenir au domicile des bénéficiaires. Pour l'instant, les Hauts-de-Seine ont accepté sa demande, mais Paris n'a pas encore donné son accord. Célia Abita revient sur le modèle économique qu'elle a choisi pour son établissement :
"Le but c'est de prouver que ce système ne pèse pas sur la sécurité sociale, désengorge les urgences et soulage les aidants".
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