

En quarante ans, les jeunes ont perdu un quart de leurs capacités cardiovasculaires, donc de leur capital santé. Pour lutter contre la sédentarité, le dispositif "30 minutes d'activité physique par jour" est mis en place dans les établissements scolaires.
Plus de 80% des enfants et adolescents français ne respectent pas les recommandations de l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS) pour être en bonne santé : pratiquer au moins 60 minutes d’activité physique quotidienne.
Face à l’augmentation de la sédentarité chez les jeunes, les comités d’organisation des Jeux Olympiques de Paris 2024 et le ministère de la Jeunesse et des Sports organisent donc la semaine Olympique et Paralympique dans les établissements scolaires. Depuis lundi, des défis sportifs sont lancés aux élèves afin d’étendre le dispositif "30 minutes d’activité physique par jour", déjà expérimenté dans des établissements depuis un an, comme au sein de l’école maternelle Serge Prokofiev à Paris.
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La plupart du temps, ces sessions sont ludiques. "Ce matin, on a fait le jeu de l'horloge, avec la balle, puis on a joué à accroche-décroche : si une sourit se fait attraper par le chat, elle le remplace", expliquent Caramba et Camille, cinq ans et demi, en classe de grande section. L’objectif du jeu était de lancer et de rattraper la balle, un exercice qui demande aux enfants de sortir les mains des poches et de rester concentrés.

Leur professeur, Adrien Vajou, varie les activités chaque jour pour progresser sur différents apprentissages comme le saut, la course de vitesse, le tricycle ou encore la lutte. Ces 30 minutes d’activité physique, "loin d’être une perte de temps", permettent aux élèves de mieux suivre les leçons. "Quand on revient en classe pour les activités posées, à table, la différence d’écoute et de silence est tout à fait notable. Ça amène une grande sérénité en classe, c’est pour cela que j’aime bien démarrer la journée par du sport." Le plus compliqué, d'après Adrien Vajou, c'est l'organisation : "Dans les écoles les locaux sont souvent petits. Il y a beaucoup de classes à faire passer et peu de temps dans la journée. C’est encore pire en période de Covid car les élèves ne doivent pas se croiser, mais on s’en sort tout à fait !"
Trois heures d'activité physique par jour pour les tout-petits
Ce dispositif s’ajoute à la séance de motricité quotidienne inscrite dans les programmes scolaires. Catherine Tomasso, la directrice de l’école Serge Prokofiev, enseignante depuis près de trente ans en école primaire, constate une augmentation de la sédentarité chez les enfants. "Les enfants bougent de moins en moins. L’OMS recommande que les enfants de l’école maternelle fassent trois heures d’activité physique par jour. À l'école, on y contribue avec notre grande motricité, avec ce dispositif de 30 minutes d’activité physique quotidienne, et aussi avec les récréations." Mais ça n'est pas suffisant. "Les familles doivent compléter le temps d'activité pour arriver aux trois heures quotidiennes", ajoute Catherine Tomasso. La directrice constate que de plus en plus de parents déposent leur enfant de 4 ou 5 ans en poussette. "J'essaye régulièrement de dire aux familles de ne pas porter leur enfant dans les bras et de les laisser marcher."

À partir de six ans, l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS) conseille une heure d’activité physique par jour. Mais la question de la sédentarité s’accentue avec l’âge, et aussi au fil des ans. Les médecins le constatent depuis une vingtaine d’années explique François Carré, cardiologue et médecin du sport :
Aujourd’hui, les professeurs d’éducation physique et sportive en sixième nous disent que trois à quatre enfants sur cinq ne sont pas capables de faire quatre cloche-pieds sur le même pied. Ça veut donc dire qu’il y a un retard de psychomotricité très tôt. Les enfants sont trop assis, et malheureusement devant des écrans. - François Carré, cardiologue et médecin du sport
François Carré aimerait qu'il y ait une prise de conscience des pouvoirs publics comme ce fut le cas pour le tabac. "Ce n’est pas irrémédiable. Il suffit que les enfants se remettent à bouger et diminuent leur temps de sédentarité, et on peut tout changer." Car la situation devient urgente : "Nous sommes face à une bombe à retardement. Un enfant qui ne bouge pas sera un adulte qui ne bougera pas. La sédentarité est quelque chose de très pernicieux." Prendre l'ascenseur au lieu des escaliers, s'asseoir dans le métro pour deux stations… Ces situations en sont les premiers signes. Et chez les adolescents, cela commence de plus en plus tôt. Chez les 9-11 ans, la pression artérielle est "d'autant plus élevée qu'ils bougent moins et ont un temps d'écran plus élevé". Chez les jeunes de 18 ans, il y a de plus en plus de diabète. "Il y a 25 ans, il n'y avait aucun diabétique avant 20 ans, le diabète c'était à 40 ans", s'exclame le cardiologue.
Un phénomène croissant avec la crise sanitaire
La crise sanitaire du Covid-19 accentue la sédentarité, avec notamment plus de temps passé devant les écrans. Anna par exemple, mère de deux adolescents dont Robin, 17 ans, a du mal à faire sortir ses garçons. Ils vont à pied au lycée et pratiquent du sport le mercredi après-midi, mais le week-end c’est plus compliqué. Robin préfère jouer aux jeux vidéo en ligne avec ses amis, plutôt que de les voir. "Il faut forcément que ce soit fortement argumenté avec une grande carotte à la fin pour qu’il se dise 'chouette je vais sortir'", explique sa mère. L'adolescent a passé la plupart de son lycée sous le régime de la crise sanitaire. "Le premier confinement a commencé quand il était en seconde, une l’année où l’enfant change… Donc on a aucune idée de comment il aurait été sans confinement", se questionne Anna. "Il a perdu ses habitudes."
Deux tiers des 11-17 ans sont en situation de sédentarité
Une étude de l’Anses, l’agence nationale de sécurité sanitaire et alimentaire, révèle que deux tiers des 11-17 ans sont en situation de sédentarité, c'est-à-dire qu'ils ne font pas l’heure d’activité physique quotidienne recommandée par l’OMS, et dépassent largement la limite des deux heures d’écran à par jour.
Les écrans sont forcément responsables de l'inactivité physique, mais il faut aussi l’organisation temporelle et spatiale de la vie des enfants : un enfant qui ne peut pas aller à l’école en vélo ou en marchant dans un environnement sécurisé, ne le fera pas. A l'école, L’organisation temporel du travail que les élèves sont très mobilisés dans la journée, surtout en position assise. Cela conduit aussi à diminuer l’activité physique des enfants et des adolescents. - Irène Margaritis, chef de l'évaluation sur la nutrition et les risques nutritionnels à l’ANSES
En plus des risques physiques, cette hausse de la sédentarité a des conséquences sur la santé mentale des enfants et des adolescents, un âge où l'image de soi est très importante.
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