Quel avenir pour l’Écosse après le Brexit ?

Sur le port de Peterhead au nord est de l'Ecosse, les pêcheurs avaient plébiscité le Brexit. Même s'ils s'estiment trahis par Boris Johnson, ils ne regrettent rien
Sur le port de Peterhead au nord est de l'Ecosse, les pêcheurs avaient plébiscité le Brexit. Même s'ils s'estiment trahis par Boris Johnson, ils ne regrettent rien ©Radio France - Marie-Pierre Vérot
Sur le port de Peterhead au nord est de l'Ecosse, les pêcheurs avaient plébiscité le Brexit. Même s'ils s'estiment trahis par Boris Johnson, ils ne regrettent rien ©Radio France - Marie-Pierre Vérot
Sur le port de Peterhead au nord est de l'Ecosse, les pêcheurs avaient plébiscité le Brexit. Même s'ils s'estiment trahis par Boris Johnson, ils ne regrettent rien ©Radio France - Marie-Pierre Vérot
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Quelques jours après le Brexit, l'Écosse pleure l'Europe, du moins les indépendantistes qui souhaitent quitter le Royaume-Uni et voir une Écosse indépendante rejoindre l'Union européenne. Ils ont le vent en poupe dans les sondages mais tous les Écossais ne seront pas faciles à convaincre.

L'avenir de l'Écosse est en Europe. Christian Allard, du SNP, le parti national écossais n'en doute pas. Embrassant l'horizon depuis les hauteurs du port d'Aberdeen, il explique : "L'Écosse moderne a été construite avec des fonds européens. Ce sont les fonds européens qui permettent l'extension du pont d'Aberdeen, la base pour les énergies renouvelables... même la criée de Peterhead à quelques miles d'ici a été reconstruite avec des fonds européens."

Mais sur la criée de Peterhead, la première du pays, les pêcheurs qui ont voté à plus de 90% pour le Brexit recommenceraient aujourd’hui.

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Comme Peter Bruce, patron de pêche sur le Budding Rose qui ramène dans ses filets morue, haddock, lieu noir, colin… Des poissons vendus au Royaume-Uni mais aussi en Europe, en Espagne et en France. Il sillonne les eaux poissonneuses de la mer du Nord depuis plus de quarante ans.

Peter Bruce patron pêcheur du Budding Rose estime que Boris Johnson a trahi les pêcheurs  pour sauver son accord de Brexit
Peter Bruce patron pêcheur du Budding Rose estime que Boris Johnson a trahi les pêcheurs pour sauver son accord de Brexit
© Radio France - Marie-Pierre Vérot

Trahis à l'entrée en Europe comme au moment d'en sortir

J’étais vraiment pour le Brexit, dit-il, et on verra dans un an si c’était une bonne chose. Ou peut-être dans dix ans. Mais je ne regrette pas. Je pense que si les pêcheurs français avaient été dans la même situation que moi, ils auraient fait la même chose. Vous devez comprendre tous les problèmes que nous avons eus ici avec les quotas depuis que nous avons rejoint la politique commune de la pêche. On a eu cette belle occasion d’en sortir et de récupérer plus de quotas. Maintenant, je suis déçu par cet accord. On s’est fait avoir quand on est entrés en Europe et on a un mauvais accord à la sortie !

Toujours ces fichus quotas. Les pêcheurs de Peterhead s’estiment lésés. Le partage des eaux ne leur semble toujours pas équitable. Et les Français ne réduiront leurs prises que de 25 % sur 5 ans. Le monde de la pêche a le sentiment ici d’avoir été sacrifié sur l’autel d’un accord bon pour le reste du pays mais pas pour lui, qui ne pèse guère dans l’économie britannique.

Mais y avait-il une autre solution, se demande Jimmy Buchan, un ancien pêcheur aujourd’hui à la tête de l’association écossaise des produits de la mer :

Quelle était l’alternative ? Même si c’est un mauvais accord, l’alternative c’était de rester dans la politique commune de la pêche que les pêcheurs détestent. Au moins, on est dehors. Nous serons en mesure de décider de notre avenir. 

"Bon ou mauvais accord, au moins on a quitté l'UE" Jimmy Buchan de l'association écossaise des produits de la mer
"Bon ou mauvais accord, au moins on a quitté l'UE" Jimmy Buchan de l'association écossaise des produits de la mer
© Radio France - Marie-Pierre Vérot

Même si on reste soumis aux quotas, au moins on est beaucoup plus libres de choisir nos lois, nos règlements, nos conditions en fonction de nos stocks de poisson et de la science plutôt que devoir obtenir l’accord de 27 autres pays.

Seul le temps dira si l’accord est favorable, répètent à l'envi les pêcheurs de Peterhead, habitués qu’ils sont à composer avec les éléments comme avec l'adversité.

Vaccin contre le virus du populisme

A plus de 300 kilomètres au sud, dans les Borders, cette région frontalière de l’Angleterre, Peter Whitaker partage le même flegme. Ses troupeaux d’agneaux de qualité remportent tous les concours. Et il ne craint pas le Brexit qu’il a d’ailleurs appelé de ses vœux, furieux qu'il était des errements de la politique agricole commune. Désormais, les exportations vers l'Europe deviendront plus compliquées mais les nouvelles conditions ne l'effraient guère.

Peter Whitaker, qui élève des moutons de qualité dans les Borders ne craint pas les conséquences du Brexit
Peter Whitaker, qui élève des moutons de qualité dans les Borders ne craint pas les conséquences du Brexit
© Radio France - Marie-Pierre Vérot

"On a déjà exporté avec les nouvelles règles, dit-il. Il faut juste UN test sanguin supplémentaire pour UNE maladie. Sinon c’est juste de la paperasse en plus mais nous les fermiers, ajoute-t-il en riant, on y est habitué ! Vous savez, on va conserver nos standards élevés. Et il y aura toujours un marché pour des produits de bonne qualité. Si quelqu’un veut nos agneaux, on trouvera toujours un moyen."

C’est le Covid qui affecté mon business cette année, pas le Brexit.

Le Brexit qui en revanche a fait s’envoler la cote d’amour des indépendantistes et de la Première ministre Nicola Sturgeon. Une part croissante des Écossais serait en effet désormais favorables à l’indépendance. Trois quart des jeunes voteraient pour quitter le Royaume-Uni et rejoindre l’Union européenne. Ce serait d’ailleurs, estime Christian Allard, le meilleur des vaccins contre le virus du populisme qui a nourri le Brexit.

Christian Allard du parti national écossais, ancien député européen pour l'Ecosse, soutient un nouveau refendum d'indépendace
Christian Allard du parti national écossais, ancien député européen pour l'Ecosse, soutient un nouveau refendum d'indépendace
© Radio France - Marie-Pierre Vérot

"Il faut absolument battre ce populisme et, en Europe, la façon de le faire, c'est que toutes les nations qui composent le Royaume-Uni reviennent au sein de l'Union européenne, une part une. Commençons par l'Écosse, l'Irlande du Nord, le Pays de Galles... et pourquoi pas l'Angleterre ?"

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