

L'écrivain et journaliste algérien Kamel Daoud est l'invité de Christophe Ono dit Biot à l'occasion de la parution de son nouveau roman, "Zabor ou Les psaumes".
- Kamel Daoud journaliste, écrivain
Cette semaine, nous passons cette heure avec Kamel Daoud, qui, après l’énorme succès de Meursault contre enquête en 2013, prix Goncourt du 1er roman, traduit dans plus de 20 langues et qui lui a valu une reconnaissance considérable, revient au roman avec Zabor ou Les psaumes, publié chez Actes Sud. L'écrivain et journaliste « revient au roman » car on a pu lire, il y a quelques mois, Mes indépendances, recueil de 182 textes parus dans la presse de 2010 à 2016, du New York Times au Point, en passant, pour la plupart, par Le Quotidien d’Oran. Autant de prises de position sur le refoulé national algérien, sur la condition de la femme, la religion, le pouvoir des hommes et celui de la littérature, et qui nous rappelaient que Kamel Daoud excelle aussi dans cet exercice littéraire qu’est la chronique, produisant des textes qui furent parmi les plus lus d’Algérie. Un recueil qui fut publié conjointement, comme tous ses livres - c’est important et non négociable pour Kamel Daoud - chez Actes Sud et chez Barazkh, son éditeur algérien.
Zabor nous plonge dans un petit village isolé d’Algérie. Présenté par le Coran comme l’un des trois livres révélés par Allah avant le Coran, Zabor ici n’est pourtant pas un livre, c'est un garçon d’une trentaine d’année, orphelin de mère, repoussé par son père, dépeceur de moutons, et qui vit en marge du village, sans femme, mais dans la compagnie des livres. Il compense ou couronne ce statut de paria par le don qui est le sien, le pouvoir, croit-il, de repousser la mort des autres par l’écriture, leur faisant gagner du temps de vie lorsqu’il consigne leur existence dans ses cahiers qu’il achète par dizaines. Un don qui s’accompagne d’une sort de mission, nommer le monde, rédiger une véritable encyclopédie enfermant le monde entier en son sein, sorte de pendant du verbe matriciel du divin, rendu ineffectif par le dogmatisme des religieux. Ce roman propose ainsi une double réflexion : il s’interroge sur ce qui est socialement acceptable dans une société en crise maintenue à bout de bras par des croyances séculaires. Mais il s’adresse également à l’intelligence du lecteur en lui proposant d’approcher d’un peu plus près les rouages de l’écriture et de la lecture, leur force infinie qui peut autant faire d’elles des instruments de soumission que des médiateurs vers une libération de l’esprit. Mais Zabor est aussi, et nous en parlerons durant cet d'entretien, une réécriture contemporaine du sacrifice d’Isaac par son père Abraham...
J'ai construit ma liberté avec les livres. Kamel Daoud
Ses choix musicaux :
- "Khayf aqoul elli bi albi", Fairouz
- "Lulla", Tinariwen
L'équipe
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