Malgré la pandémie, les bénéfices des entreprises du CAC 40 ont battu des records historiques en 2021. La redistribution des richesses produites pourrait être améliorée par les impôts, les taxes, la participation ou l’intéressement, et ainsi réduire les inégalités.
- Gunther Capelle-Blancard Economiste, professeur à l'Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne
- Thibault Lanxade Président du pôle Entreupreneuriat & Croissance du MEDEF
Depuis une dizaine de jours, la plupart des entreprises du CAC 40 annoncent des bénéfices exceptionnels s'élevant à plusieurs milliards d’euros. Les banques, telles que BNP Paribas, le Crédit agricole ou la Société Générale oscillent entre cinq et dix milliards de bénéfices, LVMH atteint les douze milliards tandis que Total emporte la palme grâce à l’augmentation du prix du gaz avec seize milliards de dollars de bénéfices.
Ces chiffres reposent une nouvelle fois la question des investissements nécessaires en sortie de crise mais aussi celle de la redistribution de ces bénéfices entre actionnaires et salariés. Faut-il relancer la participation ? Développer l’intéressement ? Augmenter les salaires ou accorder des primes exceptionnelles ?
Pour ce débat, Emmanuel Laurentin reçoit Caroline Avan, chargée de plaidoyer "Transparence et gouvernance des entreprises" chez Oxfam France, Gunther Capelle-Blancard, économiste, professeur à l'Université Paris 1-Panthéon Sorbonne et Paris School of Business, et Thibault Lanxade, entrepreneur, Président-Directeur Général du Groupe Luminess, chargé d'une mission par le Gouvernement pour développer l'actionnariat salarié, ancien vice-Président du Medef.
Caroline Avan insiste sur la nécessité d'une augmentation des salaires afin de tendre à un meilleur équilibre social : "Sur la question du partage, l’intéressement et la participation sont des mécanismes intéressants qui permettent de complémenter un niveau de salaire. Mais, justement, ce n'est qu'un complément. D’abord, il faut corriger la problématique des écarts de salaires (…) Les formules d’intéressement et de participation aujourd’hui ont tendance à favoriser les plus hauts revenus, qui proportionnellement en perçoivent plus. (...) La question des écarts de salaires est un enjeu de cohésion sociale. Les inégalités de revenus sont citées parmi les plus répandues et les moins acceptables de toutes les formes d’inégalités.".
Gunther Capelle-Blancard estime que le partage, tel qu'il est mis en oeuvre aujourd'hui, se fait au détriment des salariés, et que de nouvelles formes de rémunération, notamment la hausse des salaires, sont primordiales : "Le partage se révèle être de plus en plus défavorable aux salariés. Le pouvoir de négociation des salariés est beaucoup moins fort, les entreprises sont très concentrées, elles acquièrent un pouvoir grandissant. (…) L’intéressement n’est pas une fin en soi. Il y a des cas où ça ne fait pas sens de lier la rémunération à la performance globale de l’entreprise. (…) La participation est exempte de cotisation, on comprend pourquoi les entreprises trouvent que c’est intéressant : c’est une façon de rémunérer les actionnaires sans payer de cotisations. (…) Il faut trouver d’autres formes de rémunération, comme l’intéressement ou la participation. Mais dans ce cas, il s’agit de transférer le risque aux salariés."
Quant à lui, Thibault Lanxade souligne les avantages de l'intéressement et de la participation ainsi les efforts déjà fournis par les entreprises, tout en mettant en lumière la nécessité de ces dernières à s'adapter aux nouvelles réalités du monde social : "Il faut regarder ces méga-profits au travers des dividendes mais également de ce qui est redistribué au titre du partage de la valeur. (…) Il faut faire varier la participation en fonction de la performance des résultats de l’entreprise, c'est la voie la plus solide pour pouvoir garantir des rémunérations élevées. (...) On est en train de sortir du champ où la responsabilité de l’entrepreneur était essentiellement d’assurer du profit, pour rémunérer, pour pouvoir investir. L’objet social de l’entreprise était très concentré sur cette capacité. Aujourd’hui, on demande à l’entreprise d’être plus en phase avec les réalités du monde qui l’entourent."
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