Municipales : les partis sont-ils les bienvenus ?

Le fronton de la mairie de Névache (Hautes-Alpes) arbore la devise de la République
Le fronton de la mairie de Névache (Hautes-Alpes) arbore la devise de la République ©Getty - Herve CHAMPOLLION
Le fronton de la mairie de Névache (Hautes-Alpes) arbore la devise de la République ©Getty - Herve CHAMPOLLION
Le fronton de la mairie de Névache (Hautes-Alpes) arbore la devise de la République ©Getty - Herve CHAMPOLLION
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Alors que les partis politiques traditionnels connaissent un discrédit et une défiance accrus, les listes citoyennes sont créditées d'un certain engouement pour les élections municipales à venir. Les partis politiques ont-ils encore un sens lorsqu'il s'agit de voter localement ?

Avec
  • Raphaël Challier Doctorant en sociologie à l’université Paris-8 et membre du laboratoire Centre de recherches sociologiques et politiques de Paris,auteur d’une enquête de terrain sur les "gilets jaunes" en Lorraine
  • Sébastien Michon Chercheur au CNRS au Laboratoire SAGE à l'Université de Strasbourg, spécialiste du personnel politique français et européen
  • Vincent Beal Maître de conférences en sociologie à l’université de Strasbourg et chercheur au laboratoire SAGE (Sociétés, acteurs, gouvernement en Europe)

L’organisation des élections municipales de 2020 a été successivement marquée par la crainte que beaucoup d’élus, découragés par l’ampleur de la tâche, ne se représentent pas. Puis, le débat, à la suite de la circulaire Castaner, s’est orienté sur la représentativité politique des listes dans les petites villes rurales. 

Désormais, il se centre autour de la multiplication de listes électorales gommant soigneusement leur appartenance partisane, et leur préférant des étiquettes tels que " liste citoyenne " ou " liste de démocratie participative ".

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Toute la semaine, France Culture va aborder dans différents programmes, les questions et les enjeux culturels de ces élections municipales. Le Temps du débat se trouve en direct d’une région qui, comme d'autres, a vu fleurir ces listes sans étiquette, l’Alsace. 

L'affaiblissement de la nationalisation des élections locales 

D'après le sociologue et politiste Vincent Béal, " on a eu pendant longtemps une sorte de nationalisation des élections locales ", ces dernières étaient " de plus en plus arrimées à des enjeux politiques nationaux ". Les partis politiques traditionnels des années 1990 avaient à ce titre " une prise de plus en plus forte sur ces scrutins en termes de contrôle des investitures ". 

Cependant, déjà lors des scrutins de 2008 et 2014, " on voyait poindre les signes d'un affaiblissement de cette nationalisation des élections locales ", notamment du fait de l'apparition de listes citoyennes. 

A ce titre, le sociologue Raphaël Challier explique qu'" en milieu rural, la politique est beaucoup plus encastrée dans des enjeux ordinaires. [...] La norme, c'est très souvent des listes d’intérêt citoyen où le jeu partisan n'existe pas ".  En somme, " les logiques sociales priment sur les logiques partisanes ", d'après ce dernier. 

Vincent Béal rajoute que le mouvement des Gilets jaunes " fait partie d'un mouvement d'ensemble de relocalisation de la politique" qui témoigne d'une " _volonté d'__entrer dans la politique par des questionnements sur des situations concrètes_ et pas uniquement par un codage idéologique insuffisant ". 

Le Reportage de la rédaction
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Les citoyens "modestes" sont-ils les bienvenus dans les partis ? 

Le sociologue Raphaël Challier interroge la place de ceux qu'il nomme " les citoyens de la majorité modeste de la population " au sein des appareils politiques par rapport aux professionnels de la politique. Il souligne que " _le fait d'aller à une réunion, de_ se porter candidat, en passant par le fait de participer à un congrès, tous ces dispositifs impliquent des _propriétés socialement situées__, qui sont celles des groupes privilégiés_ ".

Il démontre qu'y compris à l'échelle des conseils municipaux, un " tri social " s'effectue au profit des " fractions supérieures de l'espace local ". En effet, " la communauté des communes exige des compétences beaucoup plus techniques [ ce qui contribue ] à exclure les plus modestes ". 

L'Invité(e) des Matins
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L'étiquette " professionnel de la politique " : capital ou fardeau ? 

D'après Sébastien Michon, sociologue spécialiste des professionnels de la politique, " il n'est pas de bon ton de se présenter comme professionnel de la politique, ce n'est pas une identité extrêmement sexy actuellement ".  

En effet, d'après lui, " un certain nombre d'acteurs politiques ont tendance à minimiser des expériences politiques telles que collaborateur politique et au contraire, à mettre en avant des investissements associatifs". 

Le Billet politique
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