Que vaudront les diplômes Covid ?

Cérémonie de remise des diplômes (Basse-Saxe, Hanovre, 12/06/21)
Cérémonie de remise des diplômes (Basse-Saxe, Hanovre, 12/06/21) - by Moritz Frankenberg/picture alliance via Getty Images
Cérémonie de remise des diplômes (Basse-Saxe, Hanovre, 12/06/21) - by Moritz Frankenberg/picture alliance via Getty Images
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Quelles valeurs pourront bien avoir le bac, le diplôme universitaire et d’école, passés dans les conditions imposées par la Covid ?

Avec
  • Mélanie Luce Présidente de l'UNEF
  • Pierre Mathiot Professeur de sciences politiques à Sciences-Po Lille, responsable de la mission "Baccalauréat 2021 : Un nouveau baccalauréat pour construire le lycée des possibles"
  • Marie Duru-Bellat sociologue, professeur émérite à Sciences Po Paris, chercheuse à l'Observatoire sociologique du changement et à l'IREDU

L’inquiétude monte chez les étudiants : Quelles valeurs pourront bien avoir le bac, le diplôme universitaire et d’école, passés dans les conditions imposées par la Covid ?Le phénomène est évidemment difficile à mesurer, mais il y a bien un vrai sentiment de perte de valeur, comme l’ont montré les résultats d’une enquête menée par trois chercheurs en sociologie de l’université de Pau – Évelyne Barthou, Yann Bruna, Emma Lujan – rendus public le 5 mai dernier.

On peut notamment y lire ces témoignages : « Étant en terminale pendant le confinement, j'ai une vision mitigée de la fin de l'année, et pour cause, j'ai l'impression d'avoir eu mon bac dans une pochette surprise », ou encore « J’ai l’impression de ne pas avoir mérité d’avoir eu mon année et je me demande quelle va être la valeur de mon diplôme une fois sortis de cette crise sanitaire. »

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Il faut dire que les modes d’évaluation ont profondément été revisés avec par exemple le développement des questionnaires à choix multiples (QCM), des soutenances en visioconférence, des épreuves adaptées à des cours suivis presque intégralement en ligne.... Toutes disciplines confondues, 40 % des examens ont ainsi été organisés « à distance » au premier semestre, selon les estimations de la Conférence des présidents d’université. Quant au Bac, il est essentiellement attribué cette année encore au contrôle continue.

Or, on le sait, ces questions prennent une importance particulière en France où le fétichisme de la note, la mythologie de la méritocratie et le poids du diplôme sont très présents. Il y a par ailleurs un aspect presque anthropologique, un rite de passage, qui se joue là. C’est tout cela que la Covid est venue bousculer, révélant des inégalités préexistantes, et peut-être en en créant de nouvelles…

Il faut distinguer le diplôme, ce qu'on donne en fin de cursus : le bac, ou la licence, ou le master et puis par ailleurs le passage d'année en année, de la L1 à la L2, du M1 au M2. C'est pas la même chose. Après sur les examens qu'on a pu faire passer, évidemment on a dû changer les modalités d'examens pour tenir compte des contraintes du distanciel, et par certains aspects le passage au distanciel n'a pas été si négatif que ça, ça nous a obligé à interroger nos manières un peu historique, canonique d'évaluer. Et puis il n'y a pas que les examens dans un cursus pour évaluer les élèves (...), il y a aussi les stages, les soutenances de mémoire (...) tout cela a été perturbé par la situation depuis mars 2020. - Pierre Mathiot -

On a posé plusieurs revendications autour de l'organisation des examens. Ce qui est certain c'est qu'il y a des volontés d'adaptation qui ont été mises en place. Par contre sur beaucoup d'universités, ce sont les étudiants qui ont dû aussi demander des adaptations. Le risque des examens sous Covid c'était, à notre sens, pas tellement de diminuer la valeur du diplôme mais au contraire d'augmenter le taux d'échec. Et par ailleurs ce risque il s'est vérifié : au premier semestre de l'année 2020/2021, il y a un taux d'échec qui a augmenté de 3% (50 000 étudiants concernés) et on attend encore les résultats sur le 2e semestre de l'année en cours. (...) - Mélanie Luce -

Quand on regarde avec un peu distance ce qui fait la valeur des diplômes, il y a deux éléments qui sont assez différents. D'une part, il y a en effectivement les connaissances, les compétences, toute l'expérience qu'on accumule pendant une année d'étude. Mais il y a aussi finalement le classement global des jeunes qui vont se présenter sur le marché du travail. Et la valeur du diplôme c'est le marché du travail qui va la faire. Si l'économie repart, finalement ce qui s'est passé cette année, au niveau des universités, ou toutes les écoles, aura plus d'importance (...). C'est l'économie qui tranchera d'une certaine manière. - Marie Duru-Bellat -

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