Jean-Pierre Bacri : "Je n'ai pas besoin que vous m'aimiez"

Jean-Pierre Bacri, en 2008 à Lille pour la présentation du film "Parlez moi de la pluie".
Jean-Pierre Bacri, en 2008 à Lille pour la présentation du film "Parlez moi de la pluie". ©Getty - Franck CRUSIAUX
Jean-Pierre Bacri, en 2008 à Lille pour la présentation du film "Parlez moi de la pluie". ©Getty - Franck CRUSIAUX
Jean-Pierre Bacri, en 2008 à Lille pour la présentation du film "Parlez moi de la pluie". ©Getty - Franck CRUSIAUX
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Acteur de comédies douces-amères, Jean-Pierre Bacri est en tête-à-tête avec Frédéric Taddéï pour parler notamment de la comédie de Pascal Bonitzer, "Cherchez Hortense".

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On parle de Jean-Pierre Bacri comme d'un comédien qui écrit. Il a d'ailleurs reçu quatre Césars du meilleur scénario. Mais c'est oublier un peu vite qu'il a commencé par écrire des pièces de théâtre, et que ce sont deux de ses pièces, une fois adaptées au cinéma, qui ont fait de lui la vedette qu'il est aujourd'hui. 

En tête-à-tête avec Frédéric Taddéï, l'acteur évoque la comédie de Pascal Bonitzer, "Cherchez Hortense", dont il tient le premier rôle, même si, avoue-t-il, la promotion des films est loin d'être l'exercice qu'il préfère : 

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C'est le retour des contraintes. On est obligé de se fabriquer une sorte de langue de bois, qu'on le veuille ou non. Dans un premier temps, on est hyper spontané, parce que ce sont les premières interviews, on est tout neuf, on va chercher dans nos fichiers des mots et des phrases, on se dit : tiens, chouette, je suis en train d'improviser quelque chose !" Puis au bout de trois, quatre interviews, on commence par chercher des synonymes, puis ensuite on répète ce que l'on a déjà dit… Jean-Pierre Bacri

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S'éloignant de plus en plus des plateaux de télévision et des grands-messes du cinéma, Jean-Pierre Bacri confie son désir d'atteindre, en tant qu'acteur, une forme de retenue, de sobriété : "J'essaie de soustraire un maximum. Certains acteurs dont j'adore tellement la sobriété, je me dis il faut arriver là, à cette absence de volonté, cette absence d'ostentation. Et c'est tellement juste tout ce qu'ils font. Souvent, je regarde un film avec Agnès ou avec un ami et je dis "regarde, il fait rien, ce mec, il fait rien et c'est formidable. Regarde ça, il a rien fait, rien." Un idéal difficile à atteindre, surtout lorsqu'on a, comme Jean-Pierre Bacri, l'auto-critique facile :

Je ne me regarde plus du tout au cinéma depuis très longtemps, et je ne vais pas voir les rushs non plus. Il me semble toujours que je suis trop, c'est trop. J'ai toujours l'impression que j'exprime "trop", que je veux "trop" raconter comme je suis intelligent, comme j'ai compris qu'il faut jouer, etc. Je pourrais encore, encore soustraire. Jean-Pierre Bacri

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En 2000, Le Goût des autres d'Agnès Jaoui, dans lequel il joue un chef d'entreprise mélancolique, rencontre un succès à la fois populaire et critique. On commente alors le message du film : trouve-t-on le personnage principal sympathique parce qu'il s'intéresse soudainement au théâtre ? 

Je ne sais pas si on le trouve sympathique pour ça. Non, il me semble qu'on le trouve sympathique parce que c'est la victime. On voit bien qu'il y a des clans et des chapelles dans ce film, et qu'il est moqué par l'élite, par cette petite élite du théâtre, etc. Je crois que c'est à cause de ça, du fait qu'on ne puisse pas imaginer une seconde que ce type a acheté un tableau par goût et non pour plaire à X ou Y. Voilà, ça parle aux gens, j'imagine... Il est sympathique parce qu'il sort de son clan justement. S'il défend son clan, tout simplement, comme le font la plupart des gens, alors non, il ne peut pas être sympathique, il est banal. Mais en l'occurrence, il est ouvert, il s'intéresse à autre chose, il veut sortir de son habitus, comme dirait Bourdieu. Jean-Pierre Bacri

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Le comédien raconte aussi sa rencontre avec Agnès Jaoui, sa fidèle complice, et la façon dont ils travaillent ensemble, complémentaires :

J'ai rencontré au début Jean-Michel Ribes, qui mettait en scène une pièce de Pinter qui s'appelle "L'Anniversaire". Je jouais Goldberg, le rôle titre que j'avais toujours rêvé de jouer et que je jouais très, très approximativement. Et dans un des rôles qui s'appelait Lulu, c'était Agnès qui jouait. Comme souvent, les acteurs sortent ensemble, jouent ensemble, travaillent ensemble et finissent par se plaire. C'est ce qui s'est passé. Jean-Pierre Bacri

Au début, on se faisait croire que j'étais spécialiste des dialogues et elle, des histoires. Mais en fait, chacun amène toujours des choses à l'autre, comme dans une conversation ininterrompue. Au fur et à mesure, quand on est devenu un peu plus expérimentés, qu'on a eu un peu moins peur de l'écriture, on a fini par définir une méthode. Et maintenant, on mélange les savoirs. Jean-Pierre Bacri

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On le dit grand râleur, un peu misanthrope. Le comédien dément, nuance : 

J'ai une grande confiance en l'homme. Vous ne m'entendrez jamais dire c'était mieux avant, mais pour autant je n'ai pas l'impression que la société progresse, progresse, progresse. Elle me plaît comme ça et je crois qu'on est perfectible, bien sûr. Mais je ne crois pas à la fraternité. C'est ridicule "aimez-vous les uns les autres". Mais c'est le problème du socialisme. Le socialisme est né chrétien. C'est ça, un de ses deux parents est un peu stupide. Aimez-vous les uns les autres ? Moi, je dis ne m'aimez pas, je n'ai pas besoin que vous m'aimiez. Rendez-moi la justice. Traitez-moi justement. C'est la plus belle preuve d'amour.

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