
À propos du podcast

du lundi au vendredi de 16h à 17h sur France Culture
Les années «Fifties», plongée dans ces années 50 si proches et si lointaines.
C’était au temps des géants de la route, quand « Gino le pieux », qui pédalait avec un ange sur l’épaule droite, affrontait sur les routes du Tour de France « Fausto le rouge ». Au temps où l’Ange Blanc affrontait Boucher de la Vilette et Bourreau de Béthune, et qu’au rendez-vous sacré des Six Jours chavirait le Vel’ d’Hiv’. Le temps de tous les émerveillements, aussi, au nouveau paradis de la consommation quand déferlaient les robots ménagers, promesses de liberté, s’inventaient microsillons, électrophones et radios à transistors, s’inaugurait le vrai âge d’or de l’automobile, Dauphine et DS 19, annonce pour le grand nombre d’une civilisation des loisirs, sinon du désir. Rapport Kinsey, pilule, bas nylon et gaine Scandale, naturisme et strip-tease : Dieu, ou quelque Diable malin, créait la femme, et plus que Marx ou Staline la véritable révolution, alors, avait nom Marilyn Monroe, Martine Carol, Brigitte Bardot. La Série Noire portait une idée neuve de la littérature et le jazz donnait le tempo de l’époque. Polar, SF, livres de poche mais aussi Tintin et Spirou, Blake et Mortimer inventant la bande dessinée — et puis, déjà, venu d’Amérique, le martèlement frénétique d’une jeunesse rebelle, bousculant dans sa fureur de vivre parents et codes moraux, rythm and blues et rock and roll, musiques du diable assurément : guerre de classes, dès lors, menant le monde, ou conflit de générations ? En tous les cas naissance en mille lieux imprévus et jusque dans le graphisme des réclames, d’une culture populaire ignorant les académismes d’élites dépassées. Et sentiment à reparcourir cette décennie paradoxale, d’un appétit de vivre, d’une joie — souvenez vous de « Signé Furax » ! — d’une croyance inébranlable dans le progrès, quand l’espace même et les étoiles paraissaient s’ouvrir à l’aventure humaine, d’un optimisme que nous ne savons plus.
Et pourtant ! Guerre froide, dans le même temps, guerre de Corée, chape de plomb tombant sur les pays de l’Est, mur dressé à Berlin, bombe A puis bombe H, massacres de Sétif et de Madagascar, enchaînement des guerres coloniales, misère de l’après-guerre, bidonvilles, grèves presque insurrectionnelles, appel de l’abbé Pierre quand les plus pauvres, en 1954, mouraient dans les rues, folie Outre-Atlantique du Maccarthysme, lutte héroïque des Noirs américains pour la conquête des droits civiques, Goulag à l’Est, crimes de Staline, aveuglement tout au long d’une classe intellectuelle compagne de route docile du communisme, sans autre choix dirait-on qu’entre luttes révolutionnaires et « American way of life », Jdanov et MacCarthy…
Que la mémoire n’ait gardé de Bikini que l’émoi d’un mini-maillot de bain, oubliant au passage l’atoll de la bombe H, n’est pas, pensons-nous, sans signification.
Michel Le Bris et Patrice Blanc Francard nous avaient raconté tout au long du mois d’août 2009 les « Années jungle », vision originale des années 20 quand sur les ruines de la guerre s’inventait fiévreusement un monde nouveau. Ils nous reviennent cet été avec « Fifties », plongée dans ces années 50 si proches et si lointaines.
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