Contre l’érotisme, pour un nouvel art de jouir : épisode 4/4 du podcast L'érotisme

Streap tease (Etats Unis)
Streap tease (Etats Unis) ©AFP - FRILET PATRICK / HEMIS.FR / HEMIS
Streap tease (Etats Unis) ©AFP - FRILET PATRICK / HEMIS.FR / HEMIS
Streap tease (Etats Unis) ©AFP - FRILET PATRICK / HEMIS.FR / HEMIS
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Et si l'érotisme n'avait rien de transgressif ?

Avec
  • Laurent de Sutter professeur de théorie du droit à la Vrije Universiteit Brussels à Bruxelles

A rebours de la révolution sexuelle, Laurent de Sutter soutient que l'érotisme et la sexualité ne nous libèrent aucunement. L'érotisme, ce piment de l'amour, ne peut pas servir à un programme politique quelconque. Il ne conduit qu'à l'orgasme, et oublie les autres jouissances.

Une conclusion : préférez la pornographie à l'érotisme !

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Le texte du jour

« Le strip-tease – du moins le strip-tease parisien – est fondé sur une contradiction : désexualiser la femme dans le moment même où on la dénude. On peut donc dire qu’il s’agit en un sens d’un spectacle de la peur, ou plutôt du "Fais-moi peur", comme si l’érotisme restait ici une sorte de terreur délicieuse, dont il suffit d’annoncer les signes rituels pour provoquer à la fois l’idée de sexe et sa conjuration.

Seule la durée du dévêtement constitue le public en voyeur ; mais ici, comme dans n’importe quel spectacle mystifiant, le décor, les accessoires et les stéréotypes viennent contrarier la provocation initiale du propos et finissent par l’engloutir dans l’insignifiance : on affiche le mal pour mieux l’embarrasser et l’exorciser. […]

Tout ceci, cette conjuration minutieuse du sexe, peut se vérifier a contrario dans les "concours populaires" de strip-tease amateur : des "débutantes" s’y déshabillent devant quelques centaines de spectateurs sans recourir ou recourant fort mal à la magie, ce qui rétablit incontestablement le pouvoir érotique du spectacle : ici, au départ, beaucoup moins de Chinoises et d’Espagnoles, ni plumes ni fourrures (des tailleurs stricts, des manteaux de ville), peu de déguisements originels ; des pas maladroits, des danses insuffisantes, la fille sans cesse guettée par l’immobilité, et surtout un embarras "technique" (résistance du slip, de la robe, du soutien-gorge) qui donne aux gestes du dévoilement une importance inattendue, […] enserrant la femme dans une condition de faiblesse et d’apeurement. »

- Roland Barthes, Mythologies, 1957, dans Œuvres complètes, tome I, Seuil, 1993, p.653-654

Lectures

- Roland Barthes, Mythologies, 1957, dans Œuvres complètes, tome I, Seuil, 1993, p.653-654

- Charles Baudelaire, Fusées, 1867, dans Œuvres complètes, Le Seuil, 1968, p.623

- Lars Ullerstam, Les minorités érotiques, trad. Lise et Hervé Axel, 1964, éd. Jean-Jacques Pauvert, 1965

Extrait

- La sexualité ailleurs que dans l’orgasme (émission L’Atelier intérieur, France culture, 07/04/2014)

Références musicales

- Luce, La Fessée

- KID 606, G Minor

- John Cage, Six mélodies : mélodie n°1

- Iggy Pop, I wanna be your dog

Laurent de Sutter
Laurent de Sutter
© Radio France - MC

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